AccueilLa UNETunisie : Comme Essid, Chahed fait des gouverneurs ses "têtes de Turcs"?!

Tunisie : Comme Essid, Chahed fait des gouverneurs ses « têtes de Turcs »?!

L’ex-chef du gouvernement, Habib Essid, avait fait des gouverneurs ses ‘têtes de turc’. On avait fini par croire qu’ils étaient responsables de tous les maux de la Tunisie, tant les mouvements qui les touchaient étaient fréquents. La série avait commencé le 14 février 2015, avec la nomination de deux nouveaux gouverneurs. Puis ça a continué le 09 avril 2015, avec la désignation de 6 nouveaux gouverneurs. A peine un peu plus de quatre mois après, plus précisément le 22 août 2015, Essid remet ça, mais cette fois dans des proportions plus importantes : 11 gouverneurs sont éjectés et 3 affectés dans d’autres régions. Il y en a eu d’autres par la suite. L’actuel chef du gouvernement, Youssef Chahed, a frappé plus fort, dès le début.

Moins d’un mois après sa prise de fonction, il jette déjà son dévolu sur les gouverneurs et fait tomber les têtes, et pas peu : 12, d’un coup. Sale temps pour les gouverneurs. Y avait-il urgence à semer la terreur dans leurs rangs ? Les priorités de la Tunisie sont-elles logées là ? Assurément non, à en croire le discours de haute facture servi par Chahed lors du vote de confiance à l’ARP.

Il est légitime de se demander si Chahed, comme son prédécesseur, n’est pas en train de tenter de faire croire aux citoyens qu’il suffit d’évincer les gouverneurs jugés inefficaces et pantouflards pour régler les nombreux problèmes des citoyens. Essid poussait même le bouchon jusqu’à tancer publiquement les gouverneurs, comme des gamins pris en faute, et leur intimer l’ordre de descendre sur le terrain pour prendre le pouls de la situation du pays, au lieu de se calfeutrer dans leurs bureaux cossus. Bon Chahed n’en est pas encore là, mais vu son démarrage en trombe, on peut parier qu’il en arrivera vite aux séances publiques de flagellation des gouverneurs. Un exercice qui ne mange pas de pain et fait toujours son petit effet sur des citoyens qui désespèrent d’avoir des gages sur le fait que les gouvernants maitrisent bien leur sujet.

Un coup d’épée dans l’eau

Comme l’histoire de la baisse des salaires des membres du gouvernement, changer intempestivement les gouverneurs est, en l’état, un simple affichage, avec tout au plus une portée symbolique qui peut vite tourner court si derrière il n’y a pas des mouvements de plus grande ampleur vers de profondes réformes structurelles. C’est de ça dont le pays a besoin, et pas qu’on lui offre fréquemment des têtes de notables des gouvernorats. On est encore très loin de la hauteur de vue de l’allocution du chef du gouvernement devant des parlementaires exaltés il y a trois semaines. Certes il est encore trop tôt pour évaluer l’action de Chahed, il faudra au moins 100 jours pour cela, mais force est de constater que le départ est un peu poussif, en mal d’inspiration et bigrement arcbouté sur des symboles, fussent-ils très puissants.

Certes le gouverneur a un rôle central, notamment dans les régions de l’intérieur où il incarne l’Etat, mais c’est un Etat sans le sou et endetté qu’il incarne, avec toutes les limites que cela suppose. On peut lui demander de faire de l’activisme, de faire la tournée des marchés, des cafés, de prendre fait et cause pour la veuve et l’orphelin, c’est bien gentil, un brin rassurant pour les citoyens, mais ça ne remplacera pas de vrais moyens pour changer le quotidien des gens. Or des moyens, les gouverneurs et ses services n’en ont pas, ou très peu. Alors tout ce qu’il peut faire en direction de ses administrés, c’est toujours bon à prendre, mais ça restera un pansement sur une jambe en bois.

Le destin des gouvernorats changera réellement quand il y aura une vraie politique de décentralisation, de développement régional, avec des ressources financières conséquentes à la disposition des autorités locales. Le projet a été élaboré, il est parfait sur le papier, mais pour la concrétisation, c’est une toute autre affaire. Tous les gouvernements de la première et de la deuxième République s’y sont cassés les dents. Tant que les choses en resteront à ce niveau, faire valser les gouverneurs demeurera un coup d’épée dans l’eau, qui plus est profondément injuste pour ceux sur qui tombe le couperet…

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