AccueilLa UNETunisie-Conférence sur l'investissement : "Un petit tour et puis s'en va"?

Tunisie-Conférence sur l’investissement : « Un petit tour et puis s’en va »?

Le moins qu’on puisse dire est que la chef de la diplomatie européenne, Federica Mogherini, en visite ce mardi 1er novembre en Tunisie, où elle a été reçue par le président de la République et le ministre des Affaires étrangères, n’a pas été avare en appels et gages de soutien au berceau des Printemps arabes. « Je voudrais passer un message très fort, très clair aujourd’hui pour tous les Européens : la Tunisie est vraiment un partenaire privilégié, spécial, et il y a une unité extraordinaire sur ça », a dit Mme Mogherini, avec un ton tout ce qu’il y a de plus passionné et sincère. A ceux qui en doutaient – de sa sincérité -, la Haute Représentante de l’Union pour les Affaires étrangères et la politique de sécurité a ajouté ceci : « Investir en Tunisie, dans le présent et le futur de la Tunisie, spécialement dans la jeunesse tunisienne, est une priorité stratégique » pour l’UE, ou encore « la réussite de la Tunisie est quelque chose d’extrêmement important ».

Après cette grosse dose de compassion et d’appels vibrants à investir dans cette Tunisie qui peine à enclencher la vitesse supérieure dans sa transition, notamment économique, on pourrait se dire banco, les sous, des investisseurs, entendons-nous bien, vont pleuvoir sur la Tunisie comme jamais. Et bien ce n’est pas si simple. Certes il y a bien l’aide européenne qui va être portée à 300 millions d’euros en 2017, comme l’a rappelé Mme Mogherini, mais c »est bien maigre au regard des besoins du pays, que la délégation tunisienne a chiffrés à 20 milliards d’euros lors de son déplacement à Bruxelles pour « vendre » un plan Marshall à des pays européens qui demandant à juger sur pièces, beaucoup d’entre eux étant déjà en proie à des difficultés économiques, notamment au Sud du continent.

Elles est sympa Mme Mogherini, elle a même gratifié la Tunisie d’un beau chèque de 90 millions d’euros, étalés sur 5 ans, pour financer la dépollution du lac de Bizerte. Donc on ne peut douter de l’élan compassionnel de l’Europe. Sauf que pour aller au-delà, cette bonne vieille Europe, amie de toujours, a besoin de signaux tangibles sur la bonne marche de la Tunisie avant de plaider sa cause auprès des bailleurs de fonds, avec à leur tête la BERD, le FMI et la Banque mondiale. D’ailleurs les Européens l’ont clairement signifié à la Tunisie dans un épais document de 70 points, ou plutôt exigences, si le pays veut s’offrir une chance de voir la couleur des 20 milliards qu’il a demandés à l’Union européenne. Sans cela, pas un euro. Idem pour la Conférence internationale sur l’investissement. Cet événement sur lequel la Tunisie compte énormément pour relancer une croissance famélique, pour tonifier une économie amorphe et donner des emplois à des centaines de milliers de jeunes pourrait être un simple « petit tour et puis s’en va » si le cahier des charges des investisseurs n’est pas pris au sérieux.

Chahed à Paris pour convaincre, mais c’est gagné

On ne peut pas douter une seconde du fait que les autorités tunisiennes ont mis le paquet pour ameuter les troupes en vue de cette grand-messe des investisseurs. Même le secrétaire d’Etat américain, John Kerry, y a mis du sien, dans la foulée du président Béji Caïd Essebsi, lors du forum USA-Afrique à New York, pour convaincre les investisseurs de miser sur la Tunisie. Ce rendez-vous aura également un parrain de choix : Le Premier ministre français, Manuel Valls. Par ailleurs le battage médiatique autour de cet événement a tellement bien fonctionné que, parait-il, on a déjà enregistré près de 1800 pré-inscriptions. Le chef du gouvernement tunisien, Youssef Chahed, se rend à Paris ces 09 et 10 novembre pour bien bétonner son dossier et ferrer les candidats français pour qui la manifestation présente un intérêt. Mais voilà, tout ça ne garantit en rien le succès de la conférence, succès d’ailleurs qu’on ne pourra mesurer qu’à l’aune des promesses fermes d’investissement au terme de la rencontre.

En attendant force est de constater que le pays ne s’est pas mis dans les meilleures dispositions pour appâter les investisseurs. Le projet de la loi de finances 2017 est pour le moment un vrai fiasco, rejeté par tous, même par l’UTICA et l’UGTT, qui y voient un simple matraquage fiscal sur les plus vulnérables et les plus accessibles – les employés et les entreprises -, laissant de côté des pans entiers de l’économie et ne prévoyant rien de bien consistant pour combattre l’évasion fiscale, sport national des plus fortunés de ce pays depuis des décennies. La seule mesure qui va dans le sens de plus de justice fiscale qu’on y a trouvée et qui a bien, il faut le dire, des allures de mesurette vu qu’elle ne touchera qu’une poignée de nantis, c’est une taxe de 1000 dinars pour les heureux proprios d’une piscine. Autant dire des cacahuètes, des clopinettes pour les caisses publiques. Même l’idée des caisses enregistreuses dans les cafés et les restos, qui avait été vendue à grand renfort de propagande autour de l’équité fiscale, a été abandonnée en rase campagne, donnant une image désastreuse d’un pays impossible à réformer, puisqu’à chaque fois qu’on rentre dans le dur, qu’un chantier est âpre, coriace, le gouvernement bat en retraite et court au plus facile : Le bâton fiscal pour ceux qu’on peut aisément ponctionner…

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