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«La PME n’est pas une priorité pour les banques commerciales tunisiennes», selon Sadok Bejja

Dans une interview accordée à Africanmanager, le directeur général de la promotion des petites et moyennes entreprises auprès du ministère de l’Industrie, Sadok Bejja, a affirmé que les banques tunisiennes n’accompagnent pas la restructuration financière des entreprises en difficulté.

Il a dans le même contexte ajouté que la réticence des établissements bancaires s’explique également par l’asphyxie financière de ces entreprises.

Le responsable a par ailleurs souligné la nécessité de repositionner le fonds de la restructuration des entreprises en difficulté pour qu’il touche les différentes sous-composantes de la restructuration financière. Interview :

Pouvez-vous nous faire le tableau la situation des PME en difficulté ?

Au départ, il important de noter qu’on a deux types de entreprises : entreprises ayant des difficultés structurelles et profondes et d’autres qui ont des difficultés  conjoncturelles.

L’entreprise économique, considérée comme un moteur de croissance et une source de richesses, a en fait subi plusieurs effets d’ordre national et international.

Sur le plan local, les maux de la Tunisie sont réellement les maux de nos entreprises, et ils sont trois : le terrorisme, la contrebande et la fragilité du gouvernement faute d’achèvement de la transition politique

Ces facteurs ont eu des répercussions sur les entreprises opérant dans différents secteurs et sur le rythme de leurs activités, déjà en baisse considérable.

Avez-vous des chiffres exacts sur les pertes engendrées par ces facteurs ?

Je ne pense pas qu’il y a une étude ou une analyse fiable qui peut déterminer l’impact de la contrebande ou du terrorisme sur l’activité de nos PME, mais les trois facteurs mentionnés sont à l’origine de leurs difficultés.

Ces facteurs ont aussi créé un climat d’instabilité sociale, ce qui s’est traduit par la montée de la grogne sociale.

Une instabilité qui a par aussi provoqué une évolution du taux d’absentéisme, qui a doublé pour atteindre 25% dans le secteur industriel. Ajoutons à cela une hausse de la masse salariale contre une chute considérable de 10% de la productivité.

Ce climat a certainement affecté la position non seulement des donneurs d’ordre, qui sont devenus frileux par rapport au site tunisien, mais aussi des investisseurs nationaux et étrangers.

Ce climat d’instabilité a aussi touché les institutions financières, qui sont devenues très sensibles par rapport à l’asphyxie financière des entreprises économiques.

Mais pourquoi ?

Plusieurs entreprises demeurent aujourd’hui incapables d’honorer leurs engagements financiers envers les établissements du financement.

Quel est le nombre des entreprises en difficulté ?

Le nombre des entreprises économiques qui ont des difficultés conjoncturelles s’élève à environ 600.

Comment agir alors ?

Depuis la révolution, plusieurs mécanismes ont été mis en place pour aider l’entreprise à reprendre progressivement son rythme de production.

A partir de 2014 et lorsqu’on s’est rendu compte de l’asphyxie financière des entreprises économiques, un fonds de restructuration financière d’une valeur de 100 millions de dinars a été créé pour soutenir ce genre d’entreprise.

153 entreprises ont bénéficié de ce fonds sur un total de 200 fixées d’ici la fin de cette année.

L’initiative est bonne, mais elle ne semble pas toucher l’ensemble des entreprises en difficulté. Qu’en-pensez-vous ?

Ce fonds revêt certes une importance particulière, mais il reste insuffisant pour gérer la situation de l’ensemble des entreprises en difficulté. Car, il ne répond pas aux besoins étant donné que le nombre des entreprises dépasse les 200.

L’autre raison est liée à la nature du fonds puisqu’il a ciblé uniquement les entreprises financées par la BFPME et les Sicars régionales.

Alors ?

Pour pallier cette insuffisance, surtout face à une certaine réticence constatée au niveau du refinancement des entreprises de la part des banques, un autre fonds a été mis en œuvre en vertu de la loi des finances 2015, d’une valeur de 200 millions de dinars.

Ce fonds a ciblé toutes les banques pour pouvoir couvrir l’ensemble des entreprises économiques.

Quel le nombre des entreprises qui ont adhéré à ce programme ?

Malheureusement, aucune entreprise n’y a adhéré.

Pourquoi ?

On n’a pas programmé les mêmes mécanismes adoptés lors de la mise en place du premier fonds de restructuration financière.

Une commission nationale a été en fait créée et un expert a été désigné, chargé de l’élaboration de l’étude de restructuration financière. Cette dernière est prise en charge par le fonds. Outre la désignation d’un expert, l’étude devrait dégager les besoins financiers de l’entreprise, à savoir le rééchelonnement de la dette, le fonds de roulement et enfin le renforcement ces capitaux.

Pour le fonds de 200 millions de dinars, il a été mis en place alors que le ministère des Finances n’a pas consulté les différentes parties intervenantes.

Dans pareille situation, l’entreprise en difficulté n’a pas un vis-à-vis. Et c’est légitime étant donné que les banques ne sont pas favorables à la restructuration financière.

Une chose est sûre : la PME n’est pas une priorité pour les banques commerciales tunisiennes.

Comment convaincre les entreprises d’adhérer à ce fonds ?

C’est un travail d’administration. On doit repositionner ce fonds pour qu’il touche les différentes sous composantes de la restructuration financière.

C’est pour cette raison que notre département de l’Industrie va faire de nouvelles suggestions au cours de l’élaboration du projet de loi de finances pour l’exercice 2017.

Dans cette situation de morosité économique, les entreprises en difficulté sont-elles capables de sortir de l’ornière ?

Les entreprises sont capables de gagner ce pari. Sur le plan statistique, le nombre d’entreprises qui ont des difficultés conjoncturelles  a certes évolué, passant de 300 avant la révolution à 600 actuellement, mais il a gardé le même rythme au niveau des entreprises ayant des difficultés structurelles, avec une moyenne de 250 par an.

C’est un excellent indicateur puisque le nombre des entreprises en difficulté structurelles n’a pas changé.

Donc, on reste très optimiste et nous croyons qu’elles ont de fortes chances de redémarrer sur des bases solides et reprendre leur rythme habituel.

Tout est possible, surtout que les prémisses de la relance sont là. On cite également l’amélioration de plusieurs indicateurs dont notamment l’évolution des investissements déclarés et l’exportation. Ajoutons à cela l’amélioration du climat social.

Avec ces chiffres, on est sur la bonne voie et on estime que 2017 sera l’année de la relance économique.

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