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Tunisie : BCT-Gouvernement : Bras de fer ou juste une mise au point légale ?

Le 5 avril 2012, et dans une première du genre, depuis au moins 23 ans, la Banque Centrale de Tunisie (BCT) publiait un communiqué, qui a sans doute pris au dépourvu  le Gouvernement de Hamadi Jbali, lequel  s’était abstenu de tout commentaire. Ce communique intervenait, fallait-il le rappeler, sur fond de crise, latente et jamais explicitée, entre le Gouvernement et l’institut d’émission qu’est la BCT. L’actuel Gouverneur Mustapha Kamel Nabli, ancien ministre au tout début de l’ère Ben Ali et ancien haut fonctionnaire de la Banque Mondiale, avait été nommé pour 6 ans par le Gouvernement de Béji Caïed Essebssi et le Gouvernement de la troïka avait à peine caché sa volonté de le remplacer, depuis sa prise du pouvoir après les élections de la constituante, en octobre 2011. Un nom, proche de Hamadi Jbali, avait été lancé comme une sonde, avant d’être démenti. Le bras de fer avait pourtant continué, par la tentative de mettre la BCT sous la tutelle directe du chef du Gouvernement, par le biais du décret instituant ce qui avait été convenu d’appeler la «mini-constitution». La tentative avait alors été jugée comme une incursion dans l’indépendance de l’institut d’émission par rapport au pouvoir exécutif et même un débat, au sein de l’Assemblée Constituante, s’en était suivi, finissant par renvoyer la tentative de mise de la BCT sous la tutelle directe de Hammadi Jbali. C’est à notre sens, tout cet arrière-plan qui a enflammé, jeudi 5 avril, les titres des journaux. Cela, d’autant plus que la position de la BCT intervenait une journée après la remise par Jbali à Mustapha Ben Jaafar, du programme économique et social de son gouvernement pour l’année 2012. Un programme déjà fortement critiqué par le reste des partis politiques représentés à la Constituante.

Ce communiqué, «est d’abord destiné au marché et vise à clarifier les positions. Il était important, que le marché sache que les dispositions de l’article 26 de la loi sur la  répartition des pouvoirs, restent toujours valables et qu’il n’est pas du ressort du gouvernement de déterminer de façon autonome la conduite de la politique monétaire. L’inscription donc de cette mesure au sein du programme du gouvernement était incompatible avec les lois et les institutions», a indiqué  à Africanmanager le Gouverneur de la BCT qui défendait visiblement encore l’indépendance et les prérogatives de l’institut d’émission tunisien par rapport à l’exécutif tunisien. Un Gouvernement qui est sous pression, économique, monétaire et sociale et qui a besoin d’ouvrir toutes les vannes pour garantir la réussite de son «plan Marshall» pour la Tunisie de l’après Révolution.

Conscient de tout cela, mais aussi de la conjoncture politique, et surtout économique encore fragile de la Tunisie, Mustapha Kamel Nabil précise, pour lever toute équivoque, que «c’est juste une mise au point des rôles de chacun. Notre position ne concerne pas le contenu du programme du Gouvernement et la mesure elle-même qui prône l’adoption d’une politique monétaire expansionniste et de taux d’intérêt bas, sur lequel par ailleurs nous n’avons pas été consultés, mais sur l’aspect institutionnel, légal et le rôle de chacun». Le Gouverneur de la BCT défendait, en fait, simplement ses prérogatives et celles de toute l’institution. Il rappelle alors que «pour nous, et selon la loi, le contenu de la politique monétaire se devait d’être fait au sein des organes délibératifs de la BCT ».

Questionné ensuite, par Africanmanager, sur le contenu de la décision elle-même, Mustapha Kamel Nabli qui nous a semblé être loin de l’idée de toute polémique et de confrontation, assure d’abord que «toute politique monétaire et de taux d’intérêt ne s’exprime pas dans l’absolu. Il n’est pas logique de déterminer, de définir de but en blanc, l’orientation de la politique monétaire, car elle reste toujours contingente et se doit d’évoluer d’un moment à l’autre». Précision, presque technique, faite, le Gouverneur de la BCT précise, d’aplomb, que «il y a déjà une politique monétaire en Tunisie, qui fait l’objet d’un suivi et tout changement reste du seul ressort du conseil d’administration de la BCT et ne peut être annoncé à l’avance par quiconque». Point à la ligne !

Sachant que l’une des prérogatives statutaires de la BCT est de veiller à contrôler l’inflation, nous essayons pourtant de pousser la barrière de communication de Mustapha Kamel Nabli, dans une tentative de le faire réagir sur le programme du Gouvernement Jbali, notamment pour savoir si une telle politique monétaire expansionniste pourrait impacter les prix et l’inflation. Il finit alors par lâcher que «oui, bien sûr », avant de se rattraper que «cela dépend aussi du contexte » et d’indiquer que «si en 2011, la BCT avait, en effet, suivi une politique relativement expansionniste, c’est parce qu’on avait alors jugé que l’effet sur les prix n’était assez sérieux par rapport à l’impératif d’encourager l’investissement et les entreprises tunisiennes qui étaient en difficulté. C’était alors, dans le contexte spécifique de l’année 2011. Pour 2012, il est trop tôt pour se prononcer sur le contexte et donc sur la politique à mettre en place, et jusqu’à présent, au mois de mars, nous maintenons la même approche monétaire et nous estimons qu’il n’y a pas de raisons pour changer».

Khaled Boumiza

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