Quelquun disait que «La révolution nenlève pas les privilèges. Elle en change seulement les bénéficiaires ».
Linformation avait dabord était rapportée par Mohamed Ammar, journaliste tunisien travaillant au Qatar. Notre collègue avait publié un article sur un site au sujet des affaires de corruption et de malversations qui continuent, après la fuite de Ben Ali. Linformation faisait état dun accord pour une autorisation relative à un important projet industriel, donnée pour un proche dun ministre nahdhaoui.
Il sagit, en fait, dun accord pour le projet de montage dune cimenterie dans la région de Tataouine au Sud tunisien. Cette autorisation aurait été donnée au frère du ministre de lInvestissement et de la Coopération internationale. Il sagit en fait et après petite enquête, de Lassad Bettaieb, le cousin germain du ministre Riadh Bettaieb. Cet accord a été donné au cousin du ministre, au cours de cette année 2012. Le DG de lindustrie que nous avons joint par téléphone, nous précise cependant quil ne sagit que dune «autorisation de principe donnée au nom dune entreprise » dont il dit ne pas se rappeler le nom.
Joint par Africanmanager, le ministre Riadh Bettaieb nous confirme, en effet, que Lassad est son cousin et quil a reçu juste un accord de principe du ministère de lIndustrie pour étudier son projet une fois présenté. Cela, on la remarqué, est quelque peu différent de l «autorisation de principe», tel que nous lavait confirmé le DG de lindustrie Kamel Oueslati, après que le chef de cabinet de Lamine Chakhari nous a orientés vers lui.
Au cours de notre entretien téléphonique avec le ministre Riadh Bettaieb, celui-ci nous rappellera dabord quil na pas daffaires en Tunisie et quil a même mis en veilleuse toute activité en France (en société avec le ministre de lAgriculture, Mohamed Ben Salem dont le gendre, Salim Ben Hamidane, faisait partie en tant quemployé). Il nous indique ensuite que, selon lui, un tel projet de cimenterie ne devrait être accordé quà une personne qui disposerait des capacités financières requises et après étude, par un conseil ministériel, de lutilité dun tel projet concurremment avec dautres déjà en cours de finalisation. Nous avons aussi parlé à Lassad Bettaieb. On nous dit quil serait ingénieur de formation et quil aurait travaillé dans un grand groupe tunisien du côté de Hammam-Lif. Lui, il a promis de nous rappeler sans le faire.
Cette «autorisation de principe» dont il a bénéficié a été probablement accordée, au cours de la même réunion pendant laquelle Shell aurait eu laccord pour létude du projet de gaz de schiste. Les deux noms nous ont été en effet confirmés par le directeur général de lindustrie au ministère de Lamine Chakhari. Pour le schiste, le DG parlait du gaz du Sud. A moins quil ne sagisse dun autre projet dont on ne connait pas le bénéficiaire.
Chakhari et les enjeux du schiste prohibé après luranium du phosphate.
On ne sait pas dans quelles conditions a été donnée «lautorisation de principe » pour ce projet et si les ministres se seraient rendu mutuellement service ou pas. Ce qui est sûr, cest que le ministre de lIndustrie a déjà rendu public deux communiqués, «en réponse à des informations publiées par certains médias. Le premier est relatif au gisement de phosphate de Sra-Ouartane. Un mémorandum a été signé avec la société minière dexploitation presquen catimini, pour un site stratégique et qui contiendrait, selon Mohamed Balghouthi, co-fondateur du CRET (Comité de Réflexion sur l’Economie Tunisienne) de luranium et des terres rares aux utilisations industrielles.
Il y a ensuite laffaire du gaz de schiste. Encore une fois, le ministère de lIndustrie nen parle quaprès la fuite de linformation concernant un accord signé avec le pétrolier Shell. Cest alors que le ministre de lIndustrie publie un communiqué. Comme pour le phosphate de Sra-Ouartane, le ministère nie dabord avoir signé un quelconque accord. «Aucun permis d’exploration du gaz de schiste n’a été accordé », dit le communiqué avant de poursuivre que « la commission consultative des hydrocarbures a examiné une demande présentée par la société Shell pour la réalisation, en 2013, de travaux de prospection d’hydrocarbures traditionnels (pétrole et gaz) et non conventionnels (gaz de schiste)». Tout cela, sans parler des risques environnementaux, avérés dans plusieurs pays, et notamment la pollution de lair et de leau que pourrait engendrer un tel projet.
Force est donc de se poser une question. Pourquoi le ministère dun gouvernement provisoire est-il pressé de signer de tels accords, même de principe, en toute discrétion ?
Khaled Boumiza