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Tunis-Stupéfiants : Une loi « soft » pour les drogues douces, mais le plus dur reste à faire !

En Tunisie, c’est connu, fumer un joint, cela coûte excessivement cher. Les lois peu nombreuses d’ailleurs, qui punissent la consommation de stupéfiants, depuis l’aube de l’Indépendance, sont dures et les peines prononcées sont automatiques, ne laissant aucune latitude aux juges pour au moins faire jouer le bénéfice des circonstances atténuantes. Résultat : les prisons sont surpeuplées et les pensionnaires sont à hauteur du 1/3 des condamnés pour trafic, usage et consommation de stupéfiants, principalement des drogues douces, autrement dit la résine de cannabis ou la « zatla » pour employer  le terme le plus répandu.

Sous la première République, il n’y avait nullement lieu d’aborder le problème, surtout sous l’angle répressif. Le tarif était mécanique et uniforme. Le consommateur, le délinquant primaire cela s’entend,  écopait dans tous les cas de figure d’une année de prison ferme et d’une amende de 1000 dinars. Le récidiviste en prenait davantage, alors que le trafiquant était passible d’une peine d’au moins 5 ans de prison ferme, le commerce des stupéfiants constituant un crime.

Comme on peut le voir, l’arsenal mis en place par le législateur ne pouvait souffrir aucune exception, et les tribunaux avaient les mains si liées qu’ils ne pouvaient faire autrement qu’appliquer la loi, même  si telle n’était pas l’ intime conviction des magistrats. D’autant que nombreux étaient ceux qui comparaissaient en correctionnelle pour la première fois et ils sont loin d’être des repris de justice, se recrutant le plus souvent parmi des jeunes sans histoires, des étudiants, des fonctionnaires, des adolescents…

C’est pour lutter contre cette rigueur « injustifiée » de la loi que des voix ont commencé à s‘élever pour demander une révision radicale de la législation, certains réclamant même une dépénalisation pure et simple. Les hommes politiques sont entrés en lice, et ceux d’entre eux qui étaient candidats au Parlement et à la magistrature suprême ne furent pas en reste. C’est le cas notamment de Béji Caïd Essebsi, avocat de formation, qui a promis de changer la loi pour qu’elle soit proportionnelle à l’infraction, essentiellement en termes sociaux.

Un nouveau projet de loi a été  adopté en Conseil des ministres et attend de passer devant l’Assemblée des représentants du peuple (ARP), après avoir été soumis à une consultation publique.

Les nouveautés introduites par la nouvelle législation sont conçues au bénéfice surtout du délinquant primaire, c’est-à-dire de celui qui est cueilli pour la première fois. Dans son cas, les dispositions de la  loi 52 datant de 1992 ne sont plus rigoureusement applicables en ce sens que le tribunal saisi n’est plus tenu d’appliquer machinalement la peine invariable stipulée, mais aura désormais la latitude de s’appuyer sur  l’article 53 du code pénal relatif à l’atténuation des peines, pour toutes les infractions en rapport avec les stupéfiants.

Et puis, il y a l’instauration d’autres formes atténuées de sanction, la libération conditionnelle, le sursis, et surtout les travaux d’intérêt général, autant de peines « soft » pour une variété limitée d’infractions dites mineures, essentiellement la consommation.

Il n’en demeure pas moins que,  comme c’est le cas pour la loi 52, le maximum de la peine prévue doit être prononcée si l’infraction est commise dans un lieu public comme les mosquées, les hôtels, les cafés, les restaurants ou encore les jardins publics.

Enfin, 3ème nouveauté, le nouveau texte privilégie  la prévention et le traitement médical de la toxicomanie avec en plus une disposition stipulée par  l’article 11,  aux termes de laquelle « les frais de désintoxication sont affiliés à la sécurité sociale, à travers le système d’assurance maladie de la personne soignée ». Ainsi, l’Etat se charge des frais de diagnostic et de soins pour les personnes arrêtées ou transférées en prison pour des affaires de consommation de produits stupéfiants », comme le prévoit l’article en question.

Le mérite immédiat de cette législation est de désencombrer les prisons avec une population carcérale composée de jeunes condamnés pour consommation de stupéfiants, et surtout d’éviter tous les drames d’ordre social, familial et professionnel qui en découlent. Car, le plus souvent, un délinquant primaire qui se trouve jeté du coup dans un univers carcéral, pris dans le tourbillon de la promiscuité, aura peu de chances de revenir au statu quo ante qui était le sien, ouvrant la porte à la récidive et à une carrière criminelle de plus en plus probable.

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