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Tunisie : La stratégie US pour la sécurité en Tunisie a échoué. Voici pourquoi !

Alors que la communauté internationale se désintéresse du bouillonnant fief tenu par Daech en Libye  déchirée par la guerre, la Tunisie voisine se retrouve  dans un environnement sécuritaire précaire qui menace les progrès réalisés par sa  jeune démocratie. En tant que seule et unique « success story » de l’ère post-printemps arabe, la Tunisie est sur le fil du rasoir dès lors qu’elle a à concilier entre  les exigences d’une démocratie naissante  et le défi croissant du radicalisme national et étranger, selon « National Interest », la revue de politique étrangère US paraissant à Washington .

Les inquiétantes conditions de sécurité de la Tunisie ont amené les Etats-Unis  à augmenter leur aide et assistance en matière de lutte contre le terrorisme, bien que les indices disponibles suggèrent que l’accent mis sur le strict domaine de sécurité cache les pressions socio économiques et politiques sous – jacentes qui mettent en péril la fragile démocratie de la Tunisie. Alors que s’intensifie l’engagement tuniso-américain en matière de  sécurité, les décideurs doivent se méfier de la tendance actuelle de placer plus que de raison les solutions basées sur la sécurité au-dessus de significatifs investissements dans la gouvernance, nécessaires pour assurer la pérennité de l’expérience démocratique en Tunisie.

À la suite des deux horribles attentats perpétrés par des terroristes affiliés à Daech visant des cibles civiles en mars et juin 2015, les États-Unis ont accordé à la Tunisie le statut  d’allié majeur non membre de l’Otan (MMNA) et triplé leur aide en matière de sécurité pour la porter à environ 100 millions dollars en 2016. La désignation de la Tunisie au statut MNNA s’est traduite également par l’accélération des fournitures  des équipements de défense aux forces armées et de sécurité tunisiennes , tout en facilitant les procédures et les délais d’examen et de livraison. Avec l’aide des États-Unis, la Tunisie a  construit un mur sur ses frontières méridionales de 125  miles,  équipé d’un système de surveillance électronique et de  tranchées  servant de tampons pour dissuader la contrebande et le commerce parallèle autant que les infiltrations de terroristes et de trafiquants. Bien que ces efforts visent à juste titre les réseaux transfrontaliers qui facilitent les trafics d’armes et le passage des terroristes à travers les frontières tunisiennes, l’environnement de sécurité le long des régions frontalières est plutôt opaque et ne se prête pas aux solutions axées sur la sécurité comme c’est communément admis.

Sous la plume du chercheur an matière de sécurité Peter Kirechu, la revue « National Interest » estime que les approches axées sur la  stricte sécurité peuvent conduire à une meilleure identification, à l’interception et l’arrestation des  recruteurs et des jihadistes potentiels, mais elles sont finalement insuffisantes. À moins que les États-Unis veuillent faire fructifier leurs investissements en matière de sécurité et de statut MNNA octroyé à la Tunisie pour encourager les investissements réciproques en matière de gouvernance, ces groupes continueront à incuber et à rentrer dans les grâces des  jeunes désenchantés pour en faire des combattants étrangers, avec des effets néfastes sur la sécurité globale de la Tunisie.

Ce qui manque à une approche efficace !

Les États-Unis se concentrent et  à juste titre sur les origines les plus graves des  problèmes de radicalisme en Tunisie: des zones frontalières poreuses avec l’Algérie et des djihadiste installés en Libye.  L’appui technique et de formation fourni par les USA a joué jusqu’ici un rôle central dans la lutte contre le terrorisme intérieur de la Tunisie, la contrebande et les trafics. Les fournitures d’armes haut de gamme, d’équipements de surveillance et de moyens de transport aérien avancés peuvent améliorer la sécurité des frontières, mais une approche efficace de lutte contre le terrorisme exige des services de sécurité adaptés qui soient  sensibles aux griefs locaux et qui soient regardés  comme les gardiens légitimes des communautés locales.

Jusqu’à présent, l’intérêt  attaché par le gouvernement tunisien à ces deux facteurs a été, au mieux, terne et sans éclat.  La police est considérée comme corrompue et répressive  et ses fonctionnaires  impliqués dans le racket transfrontalier et l’usage excessif de la force. En outre, alors que l’armée est gratifiée d’une bien meilleure réputation,  la corruption menace d’éroder son prestige actuel. Il y a aussi la possibilité que , malgré les relations privilégiées en matière de sécurité entre la Tunisie et les États-Unis, un tel engagement puisse cultiver la dépendance plutôt que les réformes institutionnelles nécessaires pour utiliser, distribuer et dépenser efficacement les ressources de l’ État pour d’efficientes  mesures antiterroristes. Comme on le voit ailleurs dans le Golfe, et peut- être davantage en Egypte, le statut MNNA octroyé à la Tunisie ne peut pas nécessairement se traduire par les réformes sécuritaires nécessaires à la stabilité à long terme.

Cette préoccupation est loin d’être sommaire et hâtive et son impact est visible dans toute la région. Mais en dépit de cette tendance malheureuse, les investissements américains en aide militaire et de sécurité sous le président Obama n’ont jamais été inférieurs à 73 pour cent de l’aide globale à la région. A l’inverse, les crédits pour la démocratie et les programmes de gouvernance ont maintenu une faible moyenne de 4,8 pour cent de la programmation globale au Moyen-Orient et Afrique du Nord tout au long de la présidence d’Obama. Cette tendance met en évidence le déséquilibre asymétrique entre l’aide à la sécurité et les urgentes réformes économiques et de gouvernance nécessaires pour barrer aux  communautés marginalisées la route de la radicalisation.

A moins que les tranches de dépenses de défense et de sécurité aillent de pair  avec une pression sur les États bénéficiaires pour faire progresser les réformes dans les domaines de la sécurité et de la  gouvernance, les États-Unis continueront de jeter l’argent par les fenêtres  dans les Etats partenaires fragiles mais encore importants tels que la Tunisie. Le soutien du secteur de la sécurité de la Tunisie doit porter sur davantage  que de rapides expéditions d’armes et d’accès aux armements et à la formation. Au lieu de cela, les États-Unis doivent  conditionner leur aide à des améliorations mesurables en matière de professionnalisation et de réformes de gouvernance.

Un objectif réalisable, si…

L’augmentation de l’assistance à la sécurité, en l’absence du renforcement des conditions de reddition des comptes, la protection des droits de l’homme et les réformes institutionnelles ne conduiront qu’à une nouvelle répression et à la méfiance. Cet objectif est réalisable si le gouvernement s’emploie activement à révoquer les agents et les fonctionnaires impliqués dans des pratiques de corruption et / ou des violations des droits de l’homme. Le renforcement de la  sécurité globale de la Tunisie dicte au gouvernement de restaurer sa  confiance auprès des  citoyens, en particulier parmi les  régions et les communautés marginalisées.

L’article se conclut sur des propos tenus par le « pionnier «  de l’insurrection menée par Al – Qaïda en Irak, Abou Moussab al-Zarqaoui qui avait affirmé que « si la ville côtière tunisienne de Ben Gardane était située à côté de Fallujah, l’AQUI, la filiale locale d’Al-Qaïda aurait libéré l’Irak ». L’évaluation plutôt optimiste de Zarqaoui s’est avérée inexacte, mais il est difficile d’ignorer son regard prémonitoire sur la transformation des villes et des communautés les plus marginalisées de la Tunisie en puissant réservoir pour jihadistes à l’étranger. Que six mille Tunisiens de villes telles que Ben Gardane aient  contribué à l’ascension notoire de Daech,  cela est suffisant pour être motif d’inquiétude. Les deux dirigeants américains et tunisiens doivent reconnaître que les lacunes en matière de gouvernance constituent la menace la plus urgente pour la démocratie inachevée de la Tunisie, et réagir en conséquence, conclut le National Interest

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