AccueilLa UNETunis-BCE à Sousse : Il improvise, menace, règle des comptes et se...

Tunis-BCE à Sousse : Il improvise, menace, règle des comptes et se met à nu !

L’allocution du chef de l’Etat tunisien aux journées de l’entreprise de la ville de Sousse, aura certainement été l’évènement de ce rendez-vous. Il y est arrivé sous une forte escorte  sécuritaire, mais surtout avec son compère politique Rached Ghannouchi qui partira avec lui. Comme à son habitude, dans de telles manifestations, il délaisse le document écrit que son service de communication a auparavant distribué, pour se livrer à  sa gymnastique favorite, l’improvisation. Une «Impro» ponctuée de ces mots dont il a seul le secret et qui ont certainement posé un problème aux traducteurs  des journées. Une improvisation aussi qui commence comme toujours par une citation coranique. Mais une Impro qui lui permet surtout de répondre à ses détracteurs, de régler des comptes ou de glisser des messages dont il a parfois seul le sens.

C’est ainsi, par exemple, comme lorsqu’il cite d’abord Talleyrand qui disait que  «tout ce qui est excessif est  insignifiant » et qu’il y ajoute cette autre citation du penseur tunisien Hichem Djaït, en précisant la date de son interview et son support, disant que «la Tunisie est un Etat faible et ne peut devenir forte en laissant grandes ouvertes les portes des libertés sans limites. Nous sommes pour le liberté, mais dans le cadre du respect de la loi». Il avait, auparavant, assuré que ««je suis le garant de la liberté d’expression», lorsqu’il débutait son discours en évoquant les critiques dont il fait l’objet. A qui destinait-il donc cette mise en garde en matière de liberté ? Est-ce aux médias ou à certains politiciens et que préparerait-il pour faire appliquer la loi ? Seul BCE le sait !

  • Que voulait dire le chef de l’Etat ? Menaces ou représailles ?

Parlant de la guerre contre le terrorisme, il met d’abord en exergue les liens qui existent entre la Tunisie et la Libye. Mais aussi l’impact négatif de ces liens sur la Tunisie. Et de dire ensuite, en évoquant à peine ce qui se passe en Syrie et les frappes russes, françaises et américaines, que «nos priorités sont différentes de celles des grandes puissances qui considèrent que la Syrie est la première chose dont ils doivent s’occuper». Ensuite, et comme en écho aux effets de ces frappes sur la migration des terroristes vers la Libye pour fuir ces frappes, il précise que «pour nous, la priorité doit être la résolution de la question libyenne. Les grandes puissances ne veulent jusqu’à présent pas être convaincues de cela, mais la conjoncture le leur imposera et  nous nous occupons tous de cette question et en priorité les Etats voisins de la Libye, dont l’Algérie, L’Egypte … ». Cela, sans oublier de rester diplomatiquement correct en commençant par dire que «nous nous intéressons bien sûr à la question syrienne et espérons que sa situation s’améliorera ». BCE serait-il en train de s’adresser à ces puissances étrangères, dont des représentants étaient présents, comme l’ambassadeur de France, pour menacer de se retirer de la coalition contre Daech s’ils ne dirigeaient  pas leurs frappes contre  leur nouveau sanctuaire libyen ? Serait-il en train de menacer de s’en retirer en réaction à la parcimonie des aides financières de ces mêmes puissances ? Seul BCE qui laissait ces messages énigmatiques, a la réponse !

  • Défiance à l’opposition, ou nouvelle promesse de circonstance ?

BCE a aussi réglé ses comptes avec ceux qui rejettent toujours son initiative de réconciliation économique, et en profite pour la remettre à jour. Il commence d’abord par rappeler que «cinq années après la révolution, nous sommes incapables de résoudre le problème du chômage [ndlr : Le ministre de l’Emploi qui n’était pas présent en prendra certainement un coup] et cela est une honte pour tous (ndlr : Pas d’applaudissements. Silence dans la salle). Notre problème n’est pas uniquement l’augmentation des salaires, mais aussi et surtout de créer de l’emploi à ceux qui n’en ont pas». Et BCE de faire ensuite le lien avec son initiative, dans ce qui ressemble à une tentative de culpabilisation de la classe politique, sans oublier d’aiguillonner Ennahdha en disant que  «mêmes ceux qui sont avec nous ne disent rien» dont le Cheikh, au premier rang des présents, reste de marbre. «J’ai été contacté par plusieurs grands investisseurs étrangers. Après quelques temps, on les retrouve dans un autre pays que je ne voudrais pas nommer . Et lorsqu’on leur demande pourquoi, ils répondent qu’ils n’ont pas trouvé le climat propice à l’investissement. Nous trouvons que l’administration est immobile et ne fait rien pour encourager l’investissement. Les ministres que je connais me disent qu’ils ne veulent plus travailler. Ils sont 10 mille dans ce cas, car ils ont peur des poursuites. Les investisseurs locaux aussi ont peur des poursuites. On me dit de lire dans la presse ceux qui appellent à… et à leur demander des comptes et à et à… pour ne pas que je dise un autre mot (ndlr : Eclat de rire dans la salle). Jusqu’à quand ça va durer tout ça ?

Et le chef de l’Etat de répondre lui-même à sa question, en affirmant que «je sais que la majorité des Tunisiens sont d’accord et que la majorité à l’ARP y est favorable. La vérité est que la majorité respecte la minorité, mais que la minorité n’a aucun respect pour la majorité, et cela est un problème. Cela, nous l’engagerons bientôt », dit-il, sûr de ce qu’il annonce. Cela fait cependant plus d’une année que BCE avait lancé son initiative de réconciliation économique sans qu’elle n’arrive même à l’ARP. Entre-temps, l’IVD de Sihem Ben Sedrine s’active et le fait savoir sur ce même dossier pour essayer d’enterrer l’initiative de BCE.

  • BCE se découvre. Pourquoi l’a-t-il fait en public ?

L’air grave, même lorsqu’il se fend d’une blague qui fait rire l’assistance, tout au long de son discours de plus de 35 minutes, BCE en profite pour répondre à tous ceux qui lui en avaient voulu d’interférer dans la crise de Nidaâ Tounès. BCE a, semble-t-il, utilisé un char pour tuer une mouche. «Certains pays qui nous aident m’ont personnellement contacté, et de manière publique, dont les Américains et le FMI, pour dire leur intention de réviser leurs positions concernant cette aide et pour me critiquer personnellement en me rappelant qu’ils s’étaient engagés [ndlr : financièrement à soutenir la Tunisie], car ils avaient confiance en moi personnellement. Ils nous avaient promis de garantir un crédit de 500 MUSD et ils révisent désormais leur position. On devait aussi recevoir une partie de l’argent du FMI et il nous a signifié sa volonté de reporter cela pour 2016. Un autre grand responsable, dont je tairais le nom, d’un pays qui devait nous aider, m’a contacté pour me dire comment cela pourrait-il arriver dans le pays que je dirige. Cela devient donc un problème national qui est en relation avec la coopération internationale avec la Tunisie et avec l’image de la Tunisie à l’extérieur. J’ai donc estimé qu’il est de mon devoir d’intervenir et que ceux qui veulent dire que cela n’est pas constitutionnel le disent».

L’explication est de poids, un poids lourd. Elle a cependant l’inconvénient de mettre à nu un chef d’Etat qui avoue, en déni à la  sacro-sainte souveraineté nationale à chaque fois soulevée par l’opposition, avoir laissé des parties étrangères s’ingérer dans une affaire strictement tuniso-tunisienne. En l’avouant, BCE prêtait plus, consciemment ou inconsciemment, le flanc à ses détracteurs. Véritable briscard de la politique, il brise  l’obligation de réserve et se met à nu devant ses opposants. Pourquoi l’a-t-il fait ? Bourde ou paroles bien pesées ? BCE seul le sait !

- Publicité-

1 COMMENTAIRE

  1. Pourtant ça aurait été plus facile pour le président d’ordonner à son fils de se retirer du parti pour que les choses se règlent à nidaa, mais , apparemment, il est plutôt pour faire durer la crise en se fendant à multiplier les initiatives.

LAISSER UN COMMENTAIRE

S'il vous plaît entrez votre commentaire!
S'il vous plaît entrez votre nom ici

Réseaux Sociaux

108,654FansJ'aime
480,852SuiveursSuivre
5,135SuiveursSuivre
624AbonnésS'abonner
- Publicité -