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Comment la Tunisie a-t-elle pu tenir et résister 11 mois ? Le pourra-t-elle en 2012 ?

La BCT (Banque Centrale de Tunisie) vient enfin de tirer la sonnette d’alarme sur la situation économique du pays. Et bien que le communiqué du 16 novembre soit intervenu après dix mois durant lesquels de précédents communiqués mensuels où le ton était plutôt mitigé, avec certains communiqués parlant même d’amorce de reprise, on ne peut que saluer la position courageuse de cette grande institution républicaine, «gardien du temple». On ne peut aussi que soutenir son indépendance, celle de la politique monétaire qui ne doit être entachée d’aucune connivence avec la politique, pas celle qu’a comprise, candidement, le futur premier ministre sur les ondes d’Express FM, et soutenir son intégrité et sa souveraineté.

Au-delà des querelles de personnes et des régimes qu’a connues la Tunisie, la question qui se pose aujourd’hui est double. D’abord, que faire maintenant ? Ensuite, comment la Tunisie a-t-elle pu survivre, durant ces onze derniers mois, et que serait-elle devenue sans les acquis hérités de 2010, en   particulier sans les 13 milliards DT de réserves en devises et les 1,4 milliards DT de recettes fiscales reportées de 2010 sur 2011 ou de dépenses budgétaires de 2011 anticipées en 2010 ?

Et si la deuxième question appartient déjà à l’histoire et mérite, sans auto-flagellation, profonde  méditation, la réponse à la première question sera certainement apportée par le prochain gouvernement de Hamadi Jbali et sera pareillement inscrite dans le budget de l’Etat 2012 et la  loi de Finances du même exercice  dont on ne sait toujours que peu de choses, à moins d’un mois de la fin de 2011.

Toujours est-il, pour répondre quand même à la seconde question, que la Tunisie a joui, au cours de la dernière décennie, d’une forte stabilité macroéconomique, en dépit de ce qu’on peut lire dans le volumineux rapport de la Commission d’Abdelfattah Amor au sujet duquel il y a beaucoup à dire. Personne ne peut en effet nier que le problème de la Tunisie, au cours des deux dernières décennies, était davantage un problème de répartition des richesses et de la croissance qu’un problème de croissance simple ou de stabilité macroéconomique.

Durant les cinq dernières années, et tout en s’en tenant à des données, vérifiables à tout instant, on peut relever les principales évolutions suivantes : Les ressources en devises, qui étaient en 2004 de 3550 millions DT, ont culminé  à 13003 MDT en 2010. La dette extérieure qui était en 2004 à 55 % du PIB, n’était plus qu’à 38 % l’année dernière. Les actifs accrochés des banques qui se situaient en 2004  à hauteur de 24,5 % des encours des crédits, n’en étaient plus qu’à 12,1 % de ces encours.

Depuis le début de l’année 2011, la situation économique de la Tunisie ne cesse de se dégrader. D’un matelas de devises couvrant 147 jours d’importation, le pays en est revenu à 112 jours, et cette chute continuera, selon les spécialistes, au moins jusqu’à mai et même juin 2012 et peut-être plus si le secteur touristique ne reprend pas. En 11 mois, la Tunisie a puisé dans ses réserves et consommé 2500 millions DT en devises. Elle s’est endettée de plus de 2000 MDT. Cela veut dire plus de 4500 MDT en ponction sur ses disponibilités en devises. Force est donc de se poser la question de savoir ce  que serait-elle devenue sans les réserves en devises accumulées à fin 2010 ?

Dans le même ordre d’idées, et d’après le communiqué du 16 novembre 2011, le déficit courant aurait atteint 5,7 % du PIB, fin octobre 2011. La Tunisie terminerait vraisemblablement l’année 2011, selon des économistes avertis, à plus de 7 %, soit le niveau le plus élevé jamais atteint durant les 25 dernières années. La dette extérieure passerait de 38% à 43 % du PIB au moins, fin 2011. Que serait alors devenue la Tunisie sans les efforts déployés pour la maîtrise la dette et ramener son taux de 55 % en 2004 à 38 % à fin 2010 ? Que seraient devenues les banques tunisiennes sans les efforts d’assainissement poursuivis sans relâche, et qui ont pu ramener le taux des actifs accrochés de près de 25 % en 2004, à 12 % en 2010. Une partie de ces actifs a certes été transférée, après provisionnement, aux sociétés de recouvrement. Mais ne s’agit-il pas là d’une pratique mondiale alors que la Tunisie n’a pas eu recours, comme l’ont fait d’autres pays, aux «Bad Banks » ou carrément au «rate off».

Enfin, que serait devenu le budget 2011 et quel aurait été le déficit, si ce n’étaient les recettes fiscales de 1050 MDT au titre de 2010, reportées sur 2011, dont plus de 700 MDT au titre de bénéfices de la BCT des deux années 2008 et 2009 et d’une prise en charge anticipée des dépenses de 2011 de près de 300 MDT dont le plus grande partie a bénéficié à la société Tunisie Autoroutes qui a pu ainsi continuer la réalisation de son programme ? Sans ce report, d’un montant total de 1400 MDT, le déficit budgétaire de 2011 aurait été de 8 % contre un excédent budgétaire en 2010. Force est ainsi de conclure que ces acquis ont permis à la Tunisie de VIVRE SANS TRAVAILLER en 2011.

Force est aussi de constater, encore une fois loin de toute auto-flagellation politiquement politicienne, que ce ne sont pas là les acquis du régime déchu, loin s’en faut. Ben Ali et ses familles étaient trop occupés à piller le pays pour se soucier de la stabilité macroéconomique du pays. Ils étaient trop aspirés à affiner, chaque jour plus, leur système de corruption et de mainmise sur les richesses du pays, pour se soucier de l’avenir économique des citoyens. Ces acquis, ce sont ceux du peuple tunisien, qui a su se surpasser, maîtriser ses dépenses, se serrer la ceinture et s’en tenir à l’essentiel. Des acquis réalisés par une élite de cadres, intègres, imbus du sens du patriotisme, des cadres qui se sont ingéniés, face au système mafieux et corrompu, à préserver l’essentiel, parfois au risque de mettre en péril tout leur avenir, à préserver l’essentiel pour que le pays puisse rebondir à temps, éviter un endettement excessif et massif à même d’accabler les générations futures, développer une infrastructure digne d’un pays émergent, assainir en profondeur les finances publiques et l’actif des banques. Et ce ne sont là que quelques exemples de ce qu’ont quand même pu réaliser ces cadres qui ont assuré et assurent, depuis un an, la survie de l’économie tunisienne.

L’heure est certes actuellement, en Tunisie, à la Révolution, à la justice révolutionnaire, aux avocats inquisiteurs, aux juges d’instruction, aux fiches anthropométriques et aux tribunaux de la Révolution. Viendra cependant le temps où le peuple demandera aussi qu’on rende hommage à ces cadres qui ont su préserver les chances d’un nouveau rebond économique à leur pays, redisons-le, parfois au risque de compromettre toute leur carrière, pour que soient préservés les intérêts de leur pays.

Grâce à la Révolution et à ces acquis réalisés par des cadres de la Nation, la Tunisie peut espérer quand même et malgré la situation presque catastrophique de son économie,  rebondir et faire aboutir la réussite de sa Révolution. Pourvu que le prochain gouvernement se mette en place, mette de côté les calculs politiques et se mette à l’œuvre pour mobiliser toutes les énergies, non pour de possibles élections municipales qui nécessiteraient d’autres ponctions financières et une œuvre sociale socialisante qui mettrait encore plus à mal son économie !

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