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La fraude a trouvé un terrain favorable pour se développer, selon Fayçal Derbel

La fraude a trouvé ces dernières années un terrain favorable pour se développer davantage dans les entreprises tunisiennes. Tel est le constat de Fayçal Derbel, président du Centre Tunisien de Gouvernance d’Entreprise. Pour lui, plusieurs raisons expliquent ce développement. Interview.

Quel rapport entre fraude et entreprise en Tunisie après la révolution ?

Il faut dire que la fraude a été propagée plus qu’il ne le faut avec des proportions qui deviennent relativement inquiétantes. C’est vrai que nous ne disposons pas des chiffres précis sur les cas de fraude qu’ils soient le fait des employés, des dirigeants sociaux, des associés ou des actionnaires

D’après ce que nous sommes en train de voir au sein des entreprises- puisque nous sommes en train de suivre les affaires un peu partout-, nous remarquons malheureusement que les cas de malversation, les d’abus sociaux et les cas de conflit d’intérêts sont en train de se propager. En nombre, ces cas sont en train d’augmenter.

Nous pouvons même les voir à travers les états financiers des entreprises ou les rapports de certaines entreprises, particulièrement, celles opérant dans le secteur bancaire. Nous remarquons que les avoirs et les liquidités des banques sont réellement exposés à des opérations d’extorsion et des détournements que ce soit de la part des personnels ou de la part des étrangers. Nous sommes en train de voir cela de manière fréquente et il est extrêmement important de mettre en place des mécanismes nécessaires permettant de réduire ce fléau.

Comment faire ?

C’est à travers les sites Whistleblowing. Il s’agit du système de dénonciation, jugé très efficace. C’est pourquoi il est important de mettre en place les couvertures nécessaires et la protection nécessaire des personnes qui vont procéder à cette dénonciation.

Aussi, il est utile de demander aux entreprises une certification de leur système du contrôle interne étant donné qu’il constitue la meilleure sauvegarde au sein de l’entreprise contre tout acte de fraude.

Il est utile encore de certifier les systèmes de reporting d’enregistrement comptable. Important aussi de renforcer l’organe du contrôle au sein de l’entreprise et de responsabiliser davantage les organes du contrôle que ce soit externe ou interne.

Il faut, en outre, demander à certaines entreprises d’avoir deux commissaires aux comptes. Ce qui est réellement inquiétant, c’est que les plus grandes entreprises n’ont qu’un seul auditeur. Je prends le cas des grandes sociétés du transport ferroviaire ou les sociétés de distribution de l’eau ou la Steg qui sont des entreprises qui font des milliards de chiffres d’affaires et qui emploient des dizaines de milliers de personnes. Ces sociétés n’ont qu’un seul commissaire aux comptes alors que d’autres entreprises nettement moins importantes possèdent deux commissaires aux comptes. C’est vraiment surprenant.

Quelles sont les raisons qui sont derrière la prolifération de la fraude ?

La fraude a trouvé ces dernières années un terrain favorable pour se développer davantage dans les entreprises tunisiennes pour diverses raisons.

Tout d’abord, on a un climat de laxisme et d’impunité qui se sont propagés au sein de l’entreprise. C’est une culture qui reste désormais incompatible avec le monde des affaires.

Ensuite, il y a une crise de valeurs. On accorde moins d’importance aux valeurs d’éthique et de déontologie.

Une récente étude a été menée par le Centre Tunisien de Gouvernance d’Entreprise (CGTE) en coordination avec le PNUD. Pouvez-vous nous en présenter les principaux résultats ?

C’est une étude portant sur 100 jugements prononcés par les tribunaux de première instance et la cour d’appel dans des dossiers de fraude et de malversation.

Il s’est avéré que le moyen le plus efficace est la dénonciation ou le « Whistleblowing ». C’est pour cette raison que nous appelons les gens à adopter cet outil. IL s’est avéré aussi que la proportion des hommes est beaucoup plus importante que celles des femmes : 92% sont des fraudeurs concernés par ces dossiers.

Aussi, la tranche d’âge 31 et 35 ans est la tranche la plus touchée par ces opérations de fraude. Les montants d’achat mis en en jeu sont extrêmement importants surtout lorsqu’il s’agit de fraudes commises par les dirigeants sociaux. Je parle essentiellement des abus des biens sociaux et les conflits d’intérêts portant sur des montants qui dépassent parfois 800 milles dinars en moyenne par entreprise, ce qui est réellement important. Et puis, la fraude la plus courante est celle du détournement de fonds, c’est-à-dire la fraude basique, ou bien les prélèvements dans la caisse de la société.

Dans ces conditions, est-il possible de réduire la fraude ?

Il faut réduire au maximum possible les cas de fraude. Donc, il est important de mettre en place les outils nécessaires pour relever ce défi. Si le nombre des opérations de fraude était de 2000, en 2013, on souhaiterait qu’il soit de 600 en 2014, c’est-à-dire qu’on réaliserait une baisse de 40%. Mais, on n’arrive jamais à zéro fraude. C’est impossible.

Quel serait le rôle du secteur privé dans ce processus ?

Le secteur privé doit mettre en place tous les outils nécessaires et il doit être convaincu que frauder signifie porter atteinte à toute la communauté. C’est un acte de destruction de toute l’économie.

Wiem Thebti

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