AccueilLa UNELe binôme Ennahdha-UGTT sera-t-il le ticket gagnant ?

Le binôme Ennahdha-UGTT sera-t-il le ticket gagnant ?

Les Tunisiens vont-ils avoir de la suite dans les idées sitôt les processus constituant et gouvernemental conclus manifestement sans encombre et celui électoral en passe de l’être ? La réponse à cette question pèsera inéluctablement de tout son poids sur ce qui reste de la période de transition qui, faut-il le dire, a duré plus que de raison sans pour autant, fort heureusement, donner lieu à d’irrémédiables convulsions voire des désastres comme c’est le cas dans les autres pays du Printemps arabe, plus précisément et par ordre de gravité, la Libye, la Syrie et l’Egypte.

Désormais, la mère de toutes les échéances est évidemment celle des élections législatives et présidentielles dont les dates n’ont pas été encore fixées. Tous les partis politiques, grands et petits, sont en train de fourbir leurs armes pour figurer dans le peloton de tête et s’octroyer le maximum de chances de gouverner le pays sous la Deuxième République, ce qui dicte aux uns et aux autres de se repositionner sur l’échiquier politique et offrir des programmes à essence politique, économique et sociale qui puissent leur attirer les suffrages des électeurs. Forcément, pareille perspective commande une fondamentale recomposition de la scène politique, fatalement selon la loi darwinienne de la sélection naturelle.

Si les analyses les moins iconoclastes plaident pour l’émergence ou pour être plus précis la réémergence des deux principales forces politiques du moment, à savoir le mouvement Ennahdha et le parti Nidaa Tounès, il y en a d’autres qui parlent d’un binôme Ennahdha-UGTT. Cette projection , on la doit à l’un des plus grands spécialistes américains de l’Afrique du Nord qui a travaillé sur cette région pendant plus de trente ans, à savoir William Laurence, directeur du Projet Afrique du Nord à l’International Crisis Group ( ICG). D’abord, il donne peu de crédit aux multiples sondages d’opinion qui placent dans un mouchoir, et dans une égalité presque parfaite le parti de Béji Caïd Essebsi et celui de Rached Ghannouchi, et constate que les sondeurs sont des « prédicteurs notoirement mauvais », comme ils l’ont été, lors des élections de 2011. Surtout, la force des libéraux, des gauchistes et des syndicats est montée en flèche, cependant que l’étendue de leur popularité n’a pas été vérifiée avec exactitude.

William Laurence croit dur comme fer que les deux grandes et majeures formations sont les syndicats qui ont joué un rôle prépondérant dans la Révolution et les islamistes qui ont longtemps joué un rôle majeur dans l’opposition contre le régime déchu de Ben Ali, et constate que, contrairement à l’Egypte, l’armée tunisienne est en dehors du coup, et même la police n’a pas un grand rôle politique. Il exprime, au demeurant, sa conviction que si des élections étaient organisées dans un avenir proche, elles seraient remportées par Ennahdha au motif que ses récentes tractations politiques devraient arranger ses projets sur le long terme, rappelant , à ce propos, que le puissant syndicat , l’UGTT, n’est pas un parti politique, et plusieurs de ses membres sont des islamistes, alors qu’il n’existe aucun autre parti politique national jouissant d’un soutien électoralement avéré à travers tout le pays. Au final, William Laurence affirme que le mouvement Ennahdha pourrait ne pas gagner le nombre de sièges qu’il avait remportés, lors du dernier scrutin, mais il s’en tirera bien. Et ce faisant, les islamistes et les syndicalistes de l’UGTT continueront à éprouver le besoin de s’entendre et de faire cause commune.

Il est généralement admis que telle est l’analyse faite sienne par Washington, une projection certes intéressante, mais qui pèche par une certaine incongruité s’agissant du sort qui serait celui de Nidaa Tounès, un parti qui ne cache pas ses ambitions pour les prochaines échéances électorales et qui revendique des flux toujours plus nombreux d’adhérents, non seulement à Tunis, mais aussi dans l’essentiel des régions du pays, et encore parmi la diaspora tunisienne. Et il ne peut échapper à personne que son président, Béji Caïd Essebsi, ne fait pas mystère de ses projets présidentiels en se mettant en réserve de la République. Ne vient-il pas de le confirmer, dans sa récente interview au site Le Point ? D’autant que la Constitution récemment promulguée lui ouvre un boulevard vers le palais de Carthage en abandonnant sans autre forme de procès le plafond de l’âge à la candidature à la magistrature suprême.

D’aucuns y verraient le commencement d’exécution d’un deal passé entre Nidaa Tounès et Ennahdha par le truchement de leurs leaders, Béji Caïd Essebsi et Rached Ghannouchi, lors de leur fameux et toujours énigmatique tête-à-tête de Paris, bien que ce putatif marché soit vigoureusement démenti de part et d’autre. Il n’en demeure pas moins que Béji Caid Essebsi ne s’est pas fait faute de rappeler que c’est lui qui a amené le parti islamiste à lâcher du lest pour rendre possible l’épilogue qui a été celui du Dialogue national, sous peine d’être bouté hors du pouvoir par la force. Le rappel n’est pas anodin et confirme que rien ne pourra être fait sans Nidaa Tounès , et surtout sans son leader historique.

Mohamed Lahmar

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