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Qui a tué chokri Belaid ? une question essentielle, mais pas uniquement

Lors de son assassinat au Mexique par Ramon Mercader sur ordre de Joseph Staline, un certain 20 août 1940, Léon Trotsky, avant de rendre l’âme, ordonna à ses gardes du corps qui étaient prêts à tuer l’assassin, de le laisser en vie : « Ne le tuez pas, cet homme a une histoire à raconter. » Trotsky meurt quelques heures plus tard et Ramon Mercader, livré aux autorités mexicaines, décline une fausse identité et invoque des différends personnels avec Trotsky pour expliquer son crime .Il est pourtant condamné à la peine la plus sévère au Mexique à l’époque : vingt ans de prison.

Cette histoire m’est revenue en mémoire , lorsque j’ai appris comme tout le monde , à l’approche de l’anniversaire de la mort de Chokri Belaid , que son tueur Kamal Gadhgadhi , a été tué avec 6 autres terroristes à Raoued , après 20 heures de siège de la maison qui les abritait .Et beaucoup de Tunisiens ont associé ces deux évènements ( la mort de Gadhgadhi et l’anniversaire de l’assassinat de Chokri Belaid ) et en ont conclu que ce crime horrible et inédit en Tunisie risque de ne pas être élucidé , entrevoyant une volonté de clore le dossier à cette date fatidique .

On a, en fait, trois volontés qui s’affrontent au sujet de cette affaire : d’abord, les assassins et les commanditaires qui ont un plan bien préparé , et des moyens et des interférences pour en dissimuler les éléments les plus pertinents . En face, on a la famille et l’IRVA , qui se débattent et mènent un combat acharné pour dévoiler toute la vérité sur l’assassinat .Enfin , on a les autorités dont la volonté est presque neutralisée par cette lutte sans merci menée par les uns et les autres .

Les Ansar Chariâa ont été désignés, le 28 août 2013, par Lotfi Ben Jeddou ministre de l’Intérieur , comme les commanditaires du crime , relayant le chef du Gouvernement, Ali Laârayedh, la veille (le mardi 27 août ) qui les a déclarés officiellement organisation terroriste étant donné leur double liaison au groupe terroriste Okba Ibn Nafaa et à Al Qaida au Maghreb Islamique (AQMI).

La disparition de Kamel Gadhgadhi va laisser un trou béant dans la reconstitution du puzzle de l’affaire , du fait qu’il figurait en bonne place dans l’organigramme des Ansars Chariâa . Il était en lien direct avec Abou Iyadh, déjà en fuite et bien protégé par des groupes islamistes libyens, mais rien n’indique que l’arrestation de Gadhgadhi ait servi la vérité sur l’assassinat, justement parce que les professionnels du renseignement et du crime organisé parviennent à dissimuler la vérité de leurs plans et agissements , même pris en flagrant délit .

La famille et les proches du Secrétaire général du Parti Unifié des Patriotes Démocrates, Chokri Belaïd affirment, chaque mercredi dans leurs sit-ins , que les autorités tunisiennes tergiversent à divulguer l’identité exacte des meurtriers ainsi que celle des commanditaires, qu’elles connaissent . Les membres de la famille de Chokri Belaïd sont allés jusqu’à exiger du ministre de la Justice de dessaisir le juge d’instruction de l’affaire parce qu’il n’a pas convoqué telle personne , entendu tel témoin ou n’a pas utilisé son pouvoir pour obliger tel responsable à se présenter à son bureau pour être entendu .

Parallèlement, l’Initiative pour la Recherche de la Vérité sur l’Assassinat de Chokri Belaïd (IRVA), créée, le 25 avril 2013, a adopté une stratégie de choc . Elle a critiqué parfois avec virulence le déroulement des investigations et déploré que l’enquête ait été orientée vers des pistes qui ne mènent nulle part .Et le 7 /11/2013 , elle a carrément accusé , par la voix de Me. Mokhtar Trifi, le ministère de l’Intérieur d’avoir dissimulé les preuves relatives à l’assassinat de Belaïd, en « cachant délibérément le rapport balistique relatif à l’assassinat, effectué par un laboratoire néerlandais ».

Le 12 septembre, déjà, l’IRVA avait révélé un document interne du ministère de l’Intérieur prouvant que certains responsables de la sécurité avaient été avertis de la menace d’assassinat contre le député Mohamed Brahmi. Le ministre de l’Intérieur, Lotfi Ben Jeddou, qui a reconnu l’existence du document, a affirmé n’avoir pas été mis au courant à temps, expliquant que c’était la procédure habituelle et le fonctionnement de la hiérarchie.

En troisième lieu, il y a les institutions de l’Etat ( Intérieur et Justice ) qui subissent une grande pression politique et ne paraissent toujours pas outillées pour mener l’enquête selon les normes professionnelles requises . Le cours des investigations a été sinueux et les autorités ont fait preuve d’une grande hésitation, à tel point que l’opinion publique a acquis la conviction que cette affaire ne va pas trouver le chemin de la résolution.

Mais devant ces enchevêtrements, comment cette enquête va-t-elle avancer pour tirer au clair cet assassinat et celui qui l’a suivi , celui de Mohammed Brahmi ?

Aboussaoud Hmidi

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