AccueilLa UNERached Ghannouchi se dépense en boniments sans convaincre

Rached Ghannouchi se dépense en boniments sans convaincre

Rached Ghannouch a affirmé, dans l’interview accordée au journal londonien Al-sharq Al-Awsat , parue en date du 1er juin 2013, que les élections auront lieu cette année, et que seuls leurs résultats détermineront s’il va y avoir ou pas , alliance entre Ennahdha et les autres partis laïcs .

Dans l’interview réalisée à Washington en marge d’une conférence organisée par Brookings , Rached Ghannouch a souligné que le dialogue entre les partis politiques et les représentants de la société civile a conduit à l’abandon de la mention de la Charia comme source principale de la législation ,et rendu possibles des accords sur beaucoup de thèmes majeurs dans la constitution , ajoutant que celle-ci n’est pas pour la majorité mais pour tous les Tunisiens .

Il a affirmé que l’islam est plus grand que n’importe quelle formation politique qui s’en réclame, qu’aucun parti ne représente à lui seul cette religion et que seul le vote déterminera qui est valable et qui ne l’est pas . Il a saisi l’occasion pour se démarquer de quelques expériences islamistes en spécifiant l’Afghanistan qui a donné, a-t-il dit, une idée sur l’islam fondée sur les châtiments corporels.

Ghannouchi a fait valoir que le Tunisien est porté ,par tempérament, vers la modération , et que la société tunisienne finira par se positionner au centre, aux dépens des extrémismes qu’ils soient de gauche ou de droite .

Il a prédit que le salafisme penchera vers la modération, comme cela a été le cas pour l’extrême gauche des années 1960 et 1970, qui a fini par s’intégrer dans la société et composer avec l’Etat.

Sa visite entre dans le cadre de son souci d’informer les Américains, à travers médias et think tanks, de la situation dans le pays, et de solliciter le soutien de l’opinion publique américaine au changement démocratique en Tunisie, attirant l’attention sur la portée de la réussite de l’expérience tunisienne pour toute la région du Moyen-Orient, du fait que le Printemps arabe a été déclenché par la révolution tunisienne.

Les djihadistes sont, pour Ghannouchi, des citoyens comme les autres, et donc justiciables, leur rappelant que démocratie ne signifie pas faiblesse.

Répondant aux inquiétudes exprimées par l’administration américaine après les jugements cléments prononcés contre les accusés impliqués dans l’attaque de l’ambassade US, à Tunis, il indique que les problèmes des salafistes ne doivent pas constituer un obstacle dans la relation de la Tunisie avec les USA. Il rappelle que les autorités tunisiennes ont fait appel du verdict, et dit s’attendre à des jugements qui refléteraient l’opposition des autorités à toute violence ou attaque contre les représentations diplomatiques.

Evidemment ,Rached Ghannouchi a parlé de son parti en toute assurance en affichant optimisme et sérénité .Il ne voit pas d’alternative à Ennahdha qui n’est cependant pas un parti éternel , malgré ses 40 ans , insinuant que les partis ne naissent pas du jour au lendemain , comme des champignons , faisant allusion au parti Nidaa Tounès et son chef Béji Caïd Essebsi qui sont crédités du tiers des suffrages , dans les prochaines législatives , devançant ,ainsi , Ennahdha , et son présidentiable favori, Hamadi Jebali .

Pour les observateurs , l’interview, de par son ton et sa teneur, est destinée à répondre aux inquiétudes conjointes de l’opinion publique tunisienne et de celle internationale et particulièrement américaine , après le verdict clément à l’encontre des accusés dans l’attaque de l’ambassade US ,en septembre dernier .

La filigrane de l’interview est déjà connue .Ces mêmes expressions, Rached Ghannouchi les a répétées à plusieurs reprises ,ces derniers mois , surtout à des journalistes étrangers des médias Le Figaro , de JDD , The Independent , France 24 , ou encore BBC Arabic .

Le discours est toujours ouvert et rassurant. Le ton incisif , manquant de verve et même d’émotion ,ce qui donne à sa rhétorique le statut d’une récitation d’écolier .L’argument est sélectif à merveille : il omet de parler de sujets qui font l’unanimité contre le parti islamiste, à savoir les Ligues de la Protection de la Révolution (LPR) ou la loi sur l’immunisation de la révolution .Il ne donne aucune indication sur les avancées de l’enquête sur l’assassinat de Chokri Belaid , et ne saisit pas l’occasion ,au moins pour regretter d’avoir demandé la libération des accusés dans l’assassinat de Lotfi Naggadh ,afin de dédouaner la mouvance islamiste de tels actes que la vie publique tunisienne n’avait pas connus auparavant .

Il choisit à sa guise les références qu’il puise dans l’histoire politique ancienne ou contemporaine de l’islam, et en tire les conclusions qu’il veut, pour donner l’impression de toujours convaincre l’interlocuteur occidental, qui a d’autres soucis au moment de la conduite de l’interview, le prenant à témoin sur un terrain qui n’est pas le sien.

Sur le sujet salafiste, ce qui est reproché à Ennahdha, ce n’est pas tant sa position actuelle, qui est somme toute proche de la norme internationale, mais le mauvais usage du salafisme et la protection qui lui était fournie, depuis la révolution. Les observateurs ont remarqué qu’Ennahdha a passé plus de temps à protéger les salafistes, même lors des forfaits d’Abdalliah, le 12 juin 2012, et de l’attaque de l’ambassade américaine, le 14 septembre 2012, qu’à discuter de ce qui était attendu d’eux dans une démocratie. Dire, donc , qu’ils sont de simples citoyens justiciables ne convainc pas et n’éclaire pas toutes les zones d’ombre des rapports entretenus entre les composantes islamistes ,qui ont amené le même Rached Ghannouchi à dire de ces salafistes qu’ils sont ses propres fils , et des djihadistes qu’ils méritent qu’on discute avec eux comme cela a été le cas avec Al-Jamaa Al-Islamia, en Egypte, pendant les années 1990 .

Le ton utilisé et l’argumentaire exposé donnent à penser, tout de même, que Ghannouchi est en train de saisir la portée de l’isolement interne et international de son parti, mais il a encore du chemin à faire pour arrêter des mesures qui mettraient fin à cet isolement.

Il insiste sur l’apport du dialogue dans l’amélioration du projet de la constitution, mais ne prend même pas la peine de répondre aux accusations qu’adressent les députés démocrates à Ennahdha pour son refus d’introduire les dits accords dans les nouvelles formulations.

Les propos de Rached Ghannouchi, dans cette interview et dans d’autres, passent pour être de la pure langue de bois. On en a lu de pareils venant du chef islamiste, dans plusieurs journaux occidentaux, surtout après les évènements qui ont suscité l’inquiétude de l’opinion occidentale (Alabdallia, assassinats de lotfi Naggadh et de Chokri Belaid, attaque contre l’ambassade US, affrontements de Bir Ali Ben Khlifa et de Chaambi ).

Le ton était toujours rassurant, mais l’écart par rapport à la réalité donne l’impression que Ghannouchi parle d’un autre pays. Il n’avance ni chiffre, ni date, ni donnée précise qui pourraient indiquer qu’il parle de la Tunisie .Il évoque des principes et des théories générales, qui pourraient faire de la Tunisie une démocratie islamiste, mais omet de faire référence à ses positions antérieures qui ne concordaient pas avec ce nouveau discours, quitte à en faire son autocritique.

Or, la démocratie est basée sur l’autocritique et la remise en question de tout ce qui n’est pas compatible avec l’esprit démocratique dans les anciennes positions. Et ce n’est que de cette manière que Ghannouchi peut convaincre ses interlocuteurs de sa bonne foi.

Double langage, tentative de changer les règles du jeu en trichant, de fausser les règles de fonctionnement démocratique par la violence, tels sont les griefs qu’on peut formuler à l’égard du discours de Rached Ghannouchi , et auxquels il n’a pas pris la peine de répondre . Mais, l’élément nouveau est que l’opinion interne et internationale sont de plus en plus éveillées et alertes, pour ne pas être bernées par des promesses sans lendemain.

Aboussaoud Hmidi

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