AccueilLa UNETunis : Au pays du printemps arabe, on assassine la presse !

Tunis : Au pays du printemps arabe, on assassine la presse !

Voltaire disait que «Je ne suis pas d’accord avec ce que vous dites, mais je me battrai pour que vous ayez le droit de le dire ». Aujourd’hui 16 septembre 2013, toute la presse tunisienne boycotte les trois présidences, toutes coupables de l’état de déliquescence de la liberté d’expression, le seul acquis tangible de la Révolution du 11 janvier 2011. Le 13 septembre aura été le vendredi noir de la liberté d’expression en Tunisie. Pas moins de 3 journalistes étaient devant le juge d’instruction. Pour l’un d’eux, le mandat de dépôt a été imaginé de manière machiavélique pour s’assurer d’un minimum de prison et exécuté comme un enlèvement policier. Ben Ali, avec Zied El Hani même et avec Taoufik Ben Brik, ne faisait pas pareil !

– «Si on veut connaître le baromètre de la liberté d’expression d’un pays, il ne faut pas aller voir le Premier ministre, mais le dessinateur de presse». Plantu

Ainsi parlait de la presse, ce célèbre caricaturiste et critique acerbe de la vie politique française, qu’est Plantu s’exprimant dans l’une de ses interviews.

Ben Ali est en cavale. Abdelwaheb Abdallah, symbole de la répression de l’information, était aussi tombé. «On le regretterait presque », dira un observateur averti, tant l’ancien régime y mettait la forme, même dans ses dépassement contre les journalistes, la liberté de presse et la liberté d’expression et tant le nouveau pouvoir en place fait fi de toutes les procédures et lois, appliquant ce qu’il veut, contre qui il veut, de la manière qu’il veut et quand il le veut. Ceux qui ont pris leur place au Palais de Carthage, dans les bureaux de La Kasbah (siège de la primature) et au Bardo (siège de l’ANC), se révèleront être par la suite être de vrais maîtres en la matière. Des vérités et des documents cachés, des déclarations publiques reniées, les vrais coupables de leur «diffamation» oubliés, les journalistes qui les invitaient pris à parti et devant leur justice traînés, des journalistes publiquement et sur les plateaux TV insultés, les journalistes toujours empêchés de l’accès à leurs dossiers et d’autres journalistes par l’argent des Chinois achetés, d’autres sur leurs ordres renvoyés, d’autres dans les radios publiques mis au frigo et de dire autre chose que leurs points de vue ou leur propagande empêchés. D’autres médias ont été exclus de la publicité sur ordre de ministres d’Ennahdha, d’autres nommés aux plus hauts postes des médias publics, sur leurs ordres aussi. La liste est tellement longue et dépasse, en seulement 2 années, ce que n’a fait Ben Ali qu’en 23 années !

Une des toutes premières batailles d’Ennahdha, après avoir remporté les élections d’octobre 2011, avait était livrée aux médias. Le dessein était clair est net : La mettre au pas. «Avant, vous ne faisiez pas cela, pourquoi maintenant », disait le parti au pouvoir à l’adresse des journalistes qui critiquaient Ennahdha et son premier gouvernement. Incapable de rallier la presse tunisienne à sa cause, Ennahdha s’essaie à toutes les manières de faire taire toute voix discordante de la presse et la mettre à la solde du pouvoir en place. Quelques semaines après la formation de son gouvernement, Hammadi Jbali, SG d’Ennahdha entame une campagne média contre la presse et annonce des nominations au sein des principaux médias publics. Il est suivi en cela par le chef de son parti. Rached Ghannouchi accuse les journalistes de manque de patriotisme et demande la publication de «la liste noire» pour mettre ces journalistes au pilori. Il est aussitôt appuyé par son ministre des Droits de l’homme qui insulte la presse et la traite, devant sa base à Bizerte, de «torchon», en disant qu’ils «n’ouvraient la bouche que dans les cabinets dentaires». Les graves menaces proférées contre les journalistes de la TV, quelques jours plus tard, et les attaques physiques et verbales subies plus tard par les journalistes venus couvrir la manifestation de l’UGTT, deviendront le pain quotidien de la presse tunisienne. Les multiples rapports de l’Observatoire de la liberté de la presse et les communiqués des ONG étrangères et de la société civile tunisienne, en seront témoins.

– «S i l’on ne croit pas à la liberté d’expression pour les gens qu’on méprise, on n’y croit pas du tout».

Pour une photo, pour une caricature, pour les déclarations d’un invité sur un plateau TV ou Radio, c’est le journaliste qui est mis en accusation et traîné devant la justice. Même le Palais de Carthage s’y met, en se cachant derrière le Chargé du Contentieux de l’Etat. Et alors que d’anciens ministres d’Ennahdha attendent toujours d’être officiellement accusés, tant les preuves étaient évidentes, alors que les meurtrier de Belaïd et Brahmi, courent toujours, la presse est vite appelée devant le juge d’instruction et subitement mis aux arrêts comme Nassreddine Ben Saïda ou encore Zied El Hani.

Les relations de François Mitterrand avec la presse évoluaient en dents de scie, mais il disait aussi que «la démocratie, c’est aussi le droit institutionnel de dire des bêtises» et que «la liberté de la presse présente des inconvénients. Mais moins que l’absence de liberté». Avant lui, le linguiste et philosopha américain, Noam Chomsky, disait, quant à lui que «S i l’on ne croit pas à la liberté d’expression pour les gens qu’on méprise, on n’y croit pas du tout». Les dirigeants d’Ennahdha ont longtemps vécu en France et dans les pays occidentaux. C’est la liberté de la presse qui les a fait connaître et permis de continuer leurs combats. Ils n’y ont cependant rien appris, ni la langue de Molière, ni la conception occidentale de la démocratie encore moins le rôle de la presse dans la démocratie.

La liberté de la presse et la liberté d’expression ont été jusqu’ici, les seuls et uniques apports de ladite «Révolution». Point d’emplois, point dignité, point de développement économique dans les régions, point de sécurité, point de nouvelle Constitution, point d’élection et point de nouvelle république ! Seules les libertés de presse et d’expression ont jusqu’ici pu se matérialiser, bien malgré la résilience des partis au pouvoir.

Les islamistes d’Ennahdha étaient revenus au pays, le cœur plein de rancune et la tête pleine d’un projet, politique de société qui ne peut pas s’accommoder de la liberté d’expression, ni ne pouvait souffrir la liberté de presse. Il fallait donc les assassiner. Apres Chokri Belaïd et Mohamed Brahmi, c’est maintenant la presse qu’on assassine dans le pays du printemps arabe !

Ka. Bou.

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