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Tunis : Les nouveaux chevaux de bataille de Moncef Marzouki

D’emblée, force est de reconnaître que la situation de Moncef Marzouki n’est pas aisée. Dans quelques semaines, il va se retrouver en face d’une cinquantaine de postulants à sa succession.

Comparée à 2011, sa situation n’est pas heureuse. D’abord, la ferveur révolutionnaire sur laquelle il a misé depuis son retour précipité en janvier 2011, s’est évaporée et les temps ne sont plus aux surenchères, et l’inventaire des sacrifices dans le combat mené contre la répression et la corruption selon la formule qui lui est chère ne lui sera d’aucun secours cette fois. Ensuite, la configuration politique a radicalement changé. Son parti, le Congrès pour la République (CPR) s’est émietté, et beaucoup de ses composantes ont leur propres présidentiables. Le grand allié qui tenait à le voir sur la liste des gagnants au scrutin d’octobre 2011 pour le propulser à Carthage, a en tête un autre casting qui irait mieux avec la nouvelle conjoncture, mais ne correspond en rien au sien.

Les sortants font généralement valoir leur bilan pour demander à être réélus, mais le bilan de Moncef Marzouki à la présidence de la République ne paraît pas probant. Son inaction durant le mandat qui s’achève a été relevée par tous les observateurs. Il était absent dans toutes les initiatives du Dialogue national (sauf une seule, celle de Dar Dhiafa qui n’a rien donné) et de tous les combats menés contre l’intégrisme et le terrorisme. Il n’a pas été enthousiaste dans la défense des valeurs du travail, de la probité et de la concorde dans une société qui commence à perdre ses repères et ses atouts. Et même les timides mesures prises par le gouvernement Mehdi Jomâa pour circonscrire la contrebande, rationaliser les subventions et instaurer une dynamique qui valorise le labeur et l’effort productif, n’ont été ni saluées ni encouragées par la président de la République, et les députés se réclamant de sa mouvance politique ont été les plus virulents à les combattre. D’ailleurs, les mêmes observateurs ont remarqué que de telles initiatives et positions qui sont au centre de la mission présidentielle ne peuvent être prises par un Président qui a de très mauvais rapports avec la principale centrale syndicale du pays.

Il nous surprend parfois par des positions à travers lesquelles il suggère une démarche bien particulière dans le traitement de quelques dossiers (relations très spéciales avec les Ligues de Protection de la Révolution/LPR , débat avec les salafistes, proposition d’absoudre les crimes des terroristes qui n’ont pas du sang sur les mains, opposition à l’extradition de Baghdadi Al Mahmoudi). l’approche originale qu’il suggère à chaque fois peut être en soi louable, mais elle aboutit constamment à un fiasco et les développements montrent , soit que les gens que le président de la République défend ne sont pas suffisamment mûrs pour entendre ses appels (l’arrogance des LPR, le dogmatisme des salafistes et les penchants criminels des terroristes ), soit que l’opinion publique n’est pas réceptive à ses suggestions, soit encore qu’il gère ces affaires tellement mal que le bien-fondé de sa logique se perd dans les explications et les justifications découlant des bavures du parcours.

Les conseillers et les responsables qui parlent en son nom à la Présidence de la République, à l’ANC ou dans les médias finissent par convaincre les Tunisiens que leur Président est en décalage par rapport à tout ce qui se passe dans le pays et ce qu’il propose n’a rien à voir à ce qui est attendu de lui.

On a été interpellé par ces réflexions à la lecture du contenu de l’interview accordée par la président de la République sortant à Al Jazeera, vendredi, et la déclaration qu’il a faite après le dépôt de sa candidature, samedi.

Une seule idée assez originale, il est vrai, mais tout à fait dangereuse ressort de ces deux « témoignages ». Marzouki juge que l’argent sale qui peut fausser le jeu électoral est plus dangereux pour le prochain scrutin que le terrorisme lui-même.

Evidemment, cette déclaration n’est pas fortuite, mais elle s’intègre dans une stratégie déjà adoptée de manière systématique par Ennahdha et les autres formations islamistes radicales. Il s’y conforment dans leur conduite personnelle et dans leurs interventions aux médias, et l’application de cette stratégie s’est déclinée surtout dans leur attitude face au projet de loi contre le terrorisme. Ils veulent banaliser le phénomène du terrorisme et effacer dans la conscience collective des Tunisiens tout ce qui peut souligner la gravité du terrorisme et éradiquer de leur esprit tout ce qui se rapporte au danger de l’entreprise terroriste de ses acteurs, de leurs défenseurs et des soutiens dont ils bénéficient. Cette stratégie vise à faire oublier ces évidences et enraciner en lieu et place une phobie du retour de l’ancien régime et de ses symboles et de l’argent sale qu’ils amènent à un environnement sain et clean dont les rapports internationaux ne cessent de vanter la propreté (cf le dernier rapport de la BM publié, cette semaine, sur la propagation des malversations financières en Tunisie).

Cette stratégie, qui veut faire perdre au Tunisien ses repères, n’est pas tunisienne. Ces inspirateurs sont des théoriciens et des stratèges qui viennent du Moyen-Orient, l’argent ( celui-là n’est pas propre du tout) qui est payé pour la mettre en œuvre provient également du Moyen-Orient et les principaux objectifs de ses commanditaires sont précisément le démembrement de l’Etat et la démolition des acquis de la société moderniste en Tunisie.

Et puisque la première manche a été prise de court par la marée humaine qui a émergé spontanément, fin juillet 2013 , après l’assassinat de Mohamed Brahmi et le sit-in Arrahil, et la mise en œuvre de ce projet a été brutalement interrompue , plusieurs candidats aux présidentielles et aux législatives sont actuellement mobilisés pour terminer cette « mission historique ».

Mais est-ce qu’ils réussiront ?

Aboussaoud Hmidi

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