AccueilLa UNETunisie-Emprunt national : Des craintes sur l’investissement et la croissance !

Tunisie-Emprunt national : Des craintes sur l’investissement et la croissance !

L’objectif de 500 millions de dinars qui devraient être levés grâce à l’emprunt national n’a pas encore été atteint. Le ministre de l’Economie et des Finances, Hakim Ben Hammouda a confié à Africanmanager que plus de 400 MD ont été levés jusqu’à jeudi dernier, mais sans en dire plus. Une déclaration qui suscite quelques craintes concernant le montant levé à ce jour, notamment avec la décision récente du ministère de tutelle de proroger les délais de souscription à l’emprunt national, jusqu’au 27 juin 2014, pour la catégorie (A) réservée aux personnes physiques (d’une valeur nominale pour chaque titre, de 10 dinars).

A vrai dire, depuis son lancement, le 12 mai dernier, l’emprunt national n’a cessé de susciter des doutes. Une note récente élaborée par l’expert économique, Moez Labidi, dans le cadre d’une série réalisée au titre de NABES Lab, a révélé que des craintes très légitimes sur l’investissement privé s’imposent, estimant que le recours à l’emprunt public est souvent pénalisant pour l’investissement et la croissance, via l’effet d’éviction (crowding-out effect) qu’il génère.

Selon cette note, l’absorption d’une partie des capitaux disponibles sur le marché local par l’Etat pour financer ses dépenses, prive les entreprises privées d’une partie des fonds disponibles, poussant ainsi les taux d’intérêt à la hausse. « En captant une bonne partie de l’épargne nationale pour financer l’investissement public, dans un pays où les sources de liquidité se tarissent, les autorités tunisiennes risquent-elles d’évincer l’investissement privé , et du coup, d’affecter négativement une reprise, déjà embryonnaire, et d’alimenter la hausse du chômage ? ».

La situation, selon l’étude, pourrait aussi se compliquer davantage si la mobilisation des ressources auprès du public ne bénéficie pas de l’enthousiasme espéré. D’ailleurs, lors de la présentation du premier bilan de l’opération d’emprunt, un appel solennel a été lancé pour inciter les institutions financières à souscrire aux titres du Trésor, a montré l’étude, soulignant qu’une telle démarche est à la fois contreproductive du côté de l’investissement privé, et irrationnelle pour l’état des finances publiques. Elle se présente comme contreproductive dans la mesure où les souscriptions seront certes pénalisantes pour les stratégies de placement des OPCVM (Organisme de placement collectif en valeurs mobilières) et pour les futures lignes de BTA (Bons du Trésor assimilables). Mais l’impact négatif qui sera le plus ressenti, touchera les décisions d’investissement où il faut s’attendre à un tarissement des fonds alloués à l’investissement privé, et un recours moins fréquent au marché financier. Le record d’introduction en bourse (12 entreprises), enregistré en 2013, devient un objectif hors de portée, en 2014, souligne la note de Nabes.

Cette opération d’emprunt national est aussi économiquement irrationnelle, puisque l’Etat serait amené à verser aux institutions financières (établissements de crédit et institutionnels) impliquées dans l’opération, une rémunération dépassant celle des BTA (avec un spread de 26 points de base sur 5 ans, de 17.4 pb sur 7 ans et 10.8 pb sur 10 ans). Les retombées de l’effet d’éviction seront ainsi majorées par une surcharge d’intérêts au niveau du service de la dette.

Toujours selon l’étude de Nabes, des craintes subsistent sur la finalité de l’opération de l’emprunt national. « L’impasse financière qui frappe la Tunisie a ramené les dépenses d’investissement à jouer le rôle de variable d’ajustement de l’équation budgétaire. La hausse vertigineuse des dépenses de compensation, le gonflement de la masse salariale et le côté incompressible du service de la dette, expliquent une telle orientation », a souligné l’étude.

Le citoyen tunisien reste convaincu que l’Emprunt national se présente beaucoup plus comme une réponse à l’impasse financière qu’une inscription dans une dynamique de croissance fondatrice d’un nouveau modèle de développement, comme le laissent entendre certaines déclarations gouvernementales. La destination prioritaire des fonds collectés par le Trésor ne pourrait être ni les projets de développement régional ni d’infrastructure, mais plutôt les dépenses improductives.

Notons que cette note a été réalisée par l’universitaire et l’économiste, Moez Labidi, et fait partie d’une série réalisée dans le cadre de NABES Lab destinée à enrichir le débat économique en Tunisie. Ces notes sont basées sur les recherches économiques disponibles et les auteurs sont des chercheurs universitaires.

NABES est la North Africa Bureau of Economic Studies Intl, une institution d’études et de recherches économiques dirigée par l’ancien gouverneur de la Banque centrale de Tunisie (BCT), Mustapha Kamel Nabli.

Kh.T

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