AccueilLa UNETunisie : Ennahdha miné par ses contradictions internes !

Tunisie : Ennahdha miné par ses contradictions internes !

L’échec essuyé par Hammadi Jbeli dans la formation d’un nouveau Gouvernement à base politique élargie, et l’argumentaire pas très convaincant avancé pour expliquer cet échec, ont poussé les observateurs à se pencher sur les véritables causes de ce fiasco politique qui précipite le pays dans une crise inédite.

Les raisons, il faut les chercher dans les divergences au sein de la troïka, et surtout à l’intérieur du parti majoritaire Ennahdha.

Ce parti, qui paraissait, au moment de la prise du pouvoir, lors de la campagne électorale et même en période de pré-campagne, assez uni et serein, devient méconnaissable au bout de 12 mois de règne. Est-ce l’usure du pouvoir ? Est-ce l’impatience de ses militants meurtris par 2 décennies de répression et de privations, qui voient leur situation empirer malgré la nomination des leurs aux différents postes politiques ? Est-ce l’amertume qui se répand dans les rangs du parti islamiste prenant pour devise le vieil adage : « les élus de la Jahilia sont les élus de l’Islam », une référence aux postes politiques décernés aux gens de l’extérieur déjà largement récompensés durant leur « exil ?.

Rien d’étonnant à tout cela, car les partis et formations politiques qui avaient mené un combat acharné contre des régimes avec lesquels ils ne partageaient rien – et c’est le cas du combat d’Ennahdha contre le régime Bourguiba – Ben Ali – ont vécu de pareilles crises. La longue lutte et les contraintes de l’action politique placent les adhérents dans des postures divergentes , et poussent les partis à s’organiser en tendances, qui coexisteraient au début ,mais qui finiraient le plus souvent en clans régis par des luttes à résultante nulle : « ou moi ou toi ».

Les partis d’obédience communiste ou socialiste qui avaient lutté contre le capital, le fascisme, le nazisme, le tsarisme … ont été traversés de luttes internes théorisées sous forme de luttes de courants ou de lignes politiques et idéologiques .Ces tendances coexistaient, au départ, pacifiquement ,mais finissaient ,au bout d’un certain temps, dans le sang ,vu l’enjeu qui était toujours lié au pouvoir .

Ces tendances mettent généralement du temps à prendre forme , mais les circonstances peuvent accélérer leur développement , et pour paraphraser Gide, on peut dire que « La Révolution peut faire éclore bien des contradictions somnolentes ».(Gide parlait de sympathie et de qualités).

Le 9ème congrès d’Ennahdha, en juillet 2012, a été vécu par tout le monde au sein du parti islamiste comme une confrontation entre les clans , et chaque clan voulait sortir vainqueur de l’épreuve : ceux qui ont écopé pour « Attandhim » et pour les autres par des peines lourdes , et à l’opposé , ceux qui s’en sont bien sortis ,en accompagnant le « cheikh » dans son exil londonien doré , et qui apparemment n’ont manqué de rien, bien que Ghannouchi ait tenu à souligner, lors des assises du congrès , qu’ils étaient sans le sou , et pourchassés par les polices du monde . O,r après quelques semaines du congrès , on commençait à apprendre que les intéressés étaient de grands possédants .

Les luttes régionalistes n’étaient pas absentes, mais étaient feutrées, et s’exprimaient à travers votes et alliances.

Le dossier du bilan de l’islam politique , des sacrifices inutiles et mal partagés , ajouté aux dossiers du trésor du parti et du leadership de Ghannouchi étaient des bombes à retardement qui piégeaient le congrès et minaient l’unité du parti . Le choix de tout remettre au congrès prochain dans 2 ans était perçu davantage comme un sursaut qui relevait de l’instinct de conservation qu’un élan qui reflétait une décision réfléchie ouverte sur le long terme.

Les positions qui ont suivi ce rendez- vous ont illustré l’impasse où s’était fourvoyé Ennahdha : mainmise sur l’administration centrale et régionale, hégémonie politique sur ses partenaires (Ettakattolet le CPR), aversion vis-à-vis des concurrents (Nidaa Tounes, El- Joumhouri etc…), et forces intermédiaires (Front populaire…) , usage structuré de la violence à travers les ligues de protection de la révolution , harcèlement des Journalistes et des médias . Bref, le parti Ennahdha qui tirait sur tout ce qui bougeait, s’est transformé en une machine à créer des ennemis

Les porte- parole du parti islamiste, durant cette période aux côtés de Rached Ghannouchi lui-même , ne sont autres que: Walid Benneni , Ameur Laarayedh, Lotfi Zitoun ,Houcine El-Jaziri , Mohammed Ben Salem auxquels s’est associé dans une alliance contre – nature Abdeltif El-Mekki que tout éloignait de l’intégrisme ambiant ( bien gratifié pendant le congrès, ayant été élu président à une large majorité , et de souche syndicale).

L’autre clan, dit rationnel et pragmatique, que l’on taxait d’être proche du chef du Gouvernement Hammadi Jebali était sous-représenté au niveau des médias , et n’arrivait pas à exprimer une identité politique propre :Samir dilou et Souad Abderrahim passent souvent inaperçus ou défendent des idées qui n’étaient pas forcément les leurs. Discipline oblige.

Les gens de l’extérieur, qui sont proches de Ghannouchi, ont défendu l’usage de la violence, toisé les partenaires de la troïka, attaqué l’UGTT.. . Ce qui faisait apparaître Ennahdha comme un parti monolithique, où il n’y a qu’un seul son de cloche : approche conservatrice à l’échelle sociale, esprit d’hégémonie et dilettantisme à l’échelle politique, et incurie dans la gestion des affaires de l’Etat.

Le déséquilibre entre clans au sein d’ Ennahdha, au détriment de l’aile modérée et pragmatique , donne une vision faussée de la vie intérieure de ce parti , l’empêche de présenter au citoyen tunisien une large gamme d’idées illustrant l’islam politique modéré , et rend difficile tout effort de s’accommoder des changements de la vie politique et d’en tirer profit .

Cet état des choses révèle qu’Ennahdha place la résignation, la discipline formelle prônée par Hassan El-Banna en 1928 , à la tête des principes politiques et organisationnels qui régissent la vie intérieure de ce parti . Cet anachronisme pèse pas uniquement sur le parti, mais sur le pays tout entier. ne

Aboussaoud Hmidi

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