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Tunisie : L’Etat bafoué !

Dans l’un des récits publiés dans son livre « Comme le fleuve qui coule » Paulo Coelho, le romancier brésilien le plus lu au monde écrivait : « Plus que la faim, la soif, le chômage, la souffrance d’amour, le désespoir de la défaite, le pire de tout, c’est de sentir que personne, mais absolument personne en ce monde, ne s’intéresse à nous. » Quelque part, cette parabole cultive d’évidentes accointances avec ce qui vient de se passer à Sidi Bouzid, à l’occasion de 2ème anniversaire du déclenchement de la Révolution.

Berceau du soulèvement qui a balayé une exécrable dictature , Sidi Bouzid, un gouvernorat laissé pour compte autant et même davantage que bien d’autres, a , à juste titre, vocation à être le dépositaire de la conscience révolutionnaire , voire le gardien du temple. Et c’est sans doute, à ce titre, que ses habitants, devenus citoyens à part entière, se sont autorisés à dire leur fait à deux présidents, et non des moindres, celui de la République et celui de l’assemblée nationale constituante, venus leur « partager leurs réjouissances » marquant une Révolution dans la foulée de laquelle ils n’y ont vu, en fait, que du feu.

Et pour cause, leur région est laissée en l’état, presqu’en jachères, avec un taux de chômage qui flirte avec des records, des investissements qui tardent à venir, des infrastructures qui peinent à voir le jour , quelques pans de la population à la périphérie de la famine, et surtout un pouvoir dont les citoyens pensent qu’il les néglige. Un cocktail explosif, pourrait-on trouver, avec un déclencheur tout trouvé : la visite de Moncef Marzouki et Mustapha Ben Jaafar auxquels le chef du Gouvernement, Hamadi Jebali a eu, pour « cas de force majeure », la lumineuse et salutaire idée de fausser compagnie.

Tout ce beau monde ne pouvait s’attendre à recevoir un accueil autre qu’à tout le moins inhospitalier, ponctué de jets de projectiles, essentiellement des pierres et des tomates sur fond de furieuses bordées d’invectives ,de volées de bois vert et de vives remontrances qui cachent mal un composé de frustrations accumulées à mesure que tardaient les dividendes de la Révolution.

A la vérité, cet accès de fureur, rapporté à l’exaspération de la population, jeunes et moins jeunes confondus, pourrait sembler légitime eu égard aux innombrables promesses non tenues par des politiciens qui en avaient semé à tout vent, lors de la campagne électorale, et bien plus encore à l’indigence des stratégies de développement conçues et mal exécutées par le gouvernement et qui, plus est, offrent peu d’espoirs à des habitants qui, Révolution oblige, veulent tout et tout de suite.

Certes, le pouvoir n’a pas une baguette féérique pour congédier la plupart des obstacles auxquels est en butte le processus de développement, et pas davantage les moyens financiers et autres instamment mobilisables pour délivrer le gouvernorat de la situation qui est la sienne, mais force est de se convaincre que des mauvais choix ont été faits et que des approches qui ne le sont pas moins ont retardé d’autant les résultats palpables qui répondraient aux aspirations de la population.

Mais tout cela justifierait sans doute peu que l’autorité de l’Etat soit si pitoyablement bafouée, donnant une piètre image des institutions d’un Etat démocratique, issues d’élections unanimement saluées de par le monde. La Tunisie est habitée par l’ambition de devenir un pays où l’Etat incarné par ses représentants, a fortiori les présidents des deux pouvoirs, exécutif et législatif, s’attribue le statut d’un corps dans lequel se reconnaissent tous les Tunisiens.

Il tombe sous le sens que l’Etat a droit au respect de ses citoyens comme le devoir de répondre à leurs attentes du mieux qu’il pourrait. C’est une marque majeure de la symbiose qui doit présider aux relations entre les uns et les autres, et ceci réfléchit une image que les pays étrangers ont besoin de voir s’agissant d’une nation dont la Révolution a fait école et est citée en exemple pour tous les peuples qui ont hâte de s’affranchir des dictatures sous le faix desquelles ils continuent de crouler.

Mohamed Lahmar

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