AccueilLa UNETunisie : La Constitution, tout sauf un morceau d’anthologie !

Tunisie : La Constitution, tout sauf un morceau d’anthologie !

Le Tunisien est maintenant en droit de pousser un soupir de soulagement. L’assemblée nationale constituante qu’il a élue voici un an, lui a sorti un avant-projet de la Constitution qui devra être le texte fondateur de la 2ème République tout autant que l’expression des valeurs dans lesquelles il se reconnaît qu’il s’agisse de libertés, de droits, de mode de gouvernement et , pour être bref, de tous les éléments constitutifs d’un Acte fondamental qui consacre l’appartenance de tout un chacun à une Nation.

Nation, avons-nous dit ? Eh bien ! Ce terme n’existe nulle part dans le préambule ni dans les principes généraux énoncés dans l’avant-projet de la Constitution. Volontaire ou spontanée, cette omission est absolument grave et impardonnable, car que valent un pays, un peuple, un territoire, sans une Nation, sinon un ensemble d’individus regroupés en une communauté à la quelle manque le ciment de l’unité et surtout d’une identité faite d’histoire, de culture, de civilisation et encore plus d’aspirations communes et d’un vouloir-vivre ensemble?

Ne pas avoir une idée de la Nation signifie, en tout premier lieu, l’émergence de particularismes exprimés à travers des appartenances aussi nombreuses que variées, et d’abord une appartenance tribale qui se manifeste dès lors que l’idée de la Nation fait défaut. On en a vu les manifestations les plus funestes lors des affrontements qui ont souvent éclaté entre des communautés qui se défendent les unes contre les autres, très fréquemment en ayant recours à la violence, en donnant libre cours à leurs frustrations accumulées , des siècles durant, et qui n’attendent qu’un fait, le plus souvent anodin , pour faire valoir et mettre en en avant la solidarité communautariste, avec les effets que l’on peut aisément imaginer.

Ceux qui nous ont « pondu » l’avant-projet de la Constitution de la Tunisie, avaient-ils à l’esprit cette donnée fondamentale, et pourquoi l’ont-ils ignorée, s’occupant à ergoter sur des postulats inutiles et superfétatoires, comme la place de l’islam dans l’Acte fondamental, alors que le commun des Tunisiens est musulman et tient à l’islam comme à la pupille de ses yeux ? Et puis, pourquoi s’évertuer à vouloir placer la Charia comme exergue de l’article premier de la Constitution, quand on sait que la Charia est  naturellement une source fondamentale de l’islam ?

A l’évidence, ce sont des questions qui ont empêché la commission d’élaboration de la Constitution d’aller au fond des choses et de proposer au peuple une œuvre qui réponde à ses vraies attentes et à ses aspirations légitimes. D’autant qu’une Constitution n’est pas destinée à un pays à un moment donnée. C’est un Acte pérenne qui va au-delà de la génération actuelle pour rythmer l’existence civique de toutes celles à venir, en s’adaptant à leurs conditions futures et à l’air du temps.

Et puis, tel qu’esquissé et élaboré, cet avant-projet ne devait nullement demander tout ce temps, une année pleine et entière, à palabrer à des fins généralement inutiles dont les acteurs sont ces Constituants, occupés à faire autre chose qu’à remplir la mission pour laquelle ils ont été élus, à savoir, répétons-le, l’élaboration d’une Constitution. Que de temps perdu , que d’argent dilapidé, que d’énergie mal dépensée, et que d’attentes déçues ! La Révolution n’autorise nullement pareil gâchis, alors que le pays a un cruel besoin de repartir du bon pied, de se donner les moyens de sa relance et de prendre le cap d’une vie meilleure, revendication essentielle du 14 janvier 2011.

Et ce ne sont pas uniquement les Tunisiens qui sont suspendus à l’élaboration de la Constitution. A cet égard, l’impatience des investisseurs, aussi bien nationaux qu’étrangers est plus qu’éloquente. Leur leitmotiv qui revient régulièrement est celui où l’on perçoit une forte exaspération vis-à-vis de la lenteur de l’élaboration de la Constitution, car, ils ont besoin d’être fixés sur le cap que prendra le pays pour se décider enfin à investir. D’ailleurs , il n’ya qu’à lire et relire les évaluations des agences de notation pour se convaincre que telle est aussi la demande impérieuse et insistante de la communauté financière internationale.

En fait, ce qui nourrit encore les doutes, c’est encore la latitude que prendront les constituants pour donner sa version finale à l’Acte fondamental. Et il y a fort à parier que la Constitution ne sera pas pour demain, sachant la propension incorrigible des membres de l’assemblée nationale constituante à ergoter, discutailler et vétiller.

Après tout cela, pourrait-on dire que l’on va avoir un morceau d’anthologie qui se nomme Constitution ?

Mohamed Lahmar

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