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Tunisie : Le chômage n’est pas seulement un problème économique, mais aussi politique, affirme l’expert Mongi Mkaddem

Mongi Mkaddem, universitaire et expert en économie, met le doigt sur les faiblesses du modèle économique tunisien, considéré comme la cause principale de l’accroissement du taux de chômage. Il suggère quelques recommandations pour résoudre ce problème préoccupant. Interview :

Le taux élevé du chômage estimé à 17,5% est, dit-on, la conséquence d’un modèle économique inadéquat adopté, durant plusieurs décennies par le régime déchu. Qu’en pensez-vous ?

Le chômage a un caractère structurel, et cela est dû au modèle de développement qui régit la question de l’emploi en Tunisie. C’est un modèle qui a échoué, puisqu’il a généré des taux de chômage très élevés, des inégalités régionales, des déséquilibres à tous les niveaux. Il est tout à fait normal que le problème réside fondamentalement dans la conception de développement, dans les grands choix qui fondent effectivement ce modèle.

Quels sont les points faibles du modèle adopté ?

Les faiblesses touchent, en premier lieu, les déséquilibres fondamentaux et les déséquilibrés structurels. Si on regarde les vingt dernières années, on constate qu’il ya des choix qui ont été faits mais qui n’étaient pas les bons choix.

En effet, la priorité a été donnée à l’intégration de la Tunisie à l’échelle internationale plutôt qu’à l’intégration nationale, c’est-à-dire que la Tunisie est beaucoup intégrée dans le cadre international qu’avec ou au sein de l’économie tunisienne elle-même. Ceci a eu des répercussions négatives.

Aussi, on a beaucoup favorisé la croissance au détriment du développement. Ce qui a compté dans ledit modèle, c’est la quantité : comment accroître la production, commet réduire le déséquilibre extérieur, comment réduire le déficit de la balance de paiement, mais on a négligé l’aspect qualitatif de la croissance, le niveau de vie, les régions et surtout la population défavorisée. Le résultat, on est en proie à l’accroissement de la pauvreté, à l’accroissement du chômage.

Il y a aussi un autre déséquilibre fondamental, c’est le fait de compter sur les avantages coopératifs basés sur quelque chose de figée. Il s’agit de la main d’œuvre bon marché, c’est à dire que le seul élément de compétitivité avec le quel on se fait valoir, c’est justement qu’on a une main d’œuvre bon marché. Or, ceci ne peut pas continuer actuellement dans la mesure ou la compétitivité entre pays ne se joue pas uniquement au niveau des salaires, ou de ce que coûte la main d’œuvre, mais elle se joue sur d’autres éléments comme la productivité, la technologie.

Constat : on a favorisé les secteurs qui font travailler une main d’œuvre non qualifiée, c’est à dire qu’on a négligé les secteurs à haute valeur ajoutée.

Cette vérité explique dès lors le taux du chômage des diplômés de l’enseignement supérieur, et ce en raison d’un système productif qui n’a pas besoin de cette catégorie. Au niveau de l’agriculture, de l’industrie des services, on n’a besoin que d’une main d’œuvre peu qualifiée

8OO mille chômeurs en Tunisie et le gouvernement multiplie les efforts et les initiatives pour y faire face. Des efforts qui restent désormais au deçà des attentes des citoyens qui ne cessent de mettre en garde contre la politique adoptée à cet égard. La nouvelle stratégie en cours de préparations permettra-t-elle de relever ce défi ?

D’abord, c’est une stratégie se situe toujours dans le moyen et le long terme. Ce la signifie qu’il faut pas s’attendre à ce que, aujourd’hui, on donne des recettes qu’on va appliquer demain et à partir de demain le chômage va se mettre à diminuer.

Donc, on parle d’une stratégie : édifier les bases d’une économie capable de créer des emplois. Evidement, répondre à cette question n’est pas une chose facile.

Actuellement, rien n’a été réglé. On continue toujours de vivre ce problème de manière très grave. Nous vivons une période transitoire.

Quelles sont les mesures à entreprendre pour remédier à cette situation ?

Tout ce qu’on peut faire actuellement, c’est de mettre en place des mesures à court terme en vue d’alléger les souffrances de la population en chômage.

Il faut chercher à créer des emplois nouveaux qui relèvent de l’économie sociale à l’économie solidaire afin d’absorber une partie de cette population. Il faut intégrer une partie de cette population dans les microprojets, inciter les banques à s’occuper davantage aux régions.

Dans un climat délicat, la Tunisie sera-t-elle capable de relever ce défi ?

Le chômage n’est pas seulement un problème économique, c’est aussi un problème politique. Aujourd’hui, on a besoin de clarifier énormément des choses avant de s’engager dans l’application de cette stratégie.

C’est bien beau de définir la stratégie, mais au niveau de son application, cela demande énormément d’efforts. Dans l’état actuel des choses, tout est flou. On est en train de vivre une situation aléatoire.

Comment voulez-vous que, dans le contexte actuel, on puisse s’engager dans une stratégie ou même prendre des mesures à très court terme ;

Ceci devient très difficile au regard des perspectives d’ordre politique et économique.

Wiem Thebti

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