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Tunisie : Le gouverneur de la BCT pique une crise de nerf à cause de 300 MUSD !

Lorsque nous l’avons rencontré, le vendredi 22 août 2014, dans son bureau du 7ème étage, il s’était à peine levé de son siège pour nous saluer. Il était en fait affalé, entre les feuilles d’un dossier, à en passer et ressasser les incompréhensibles chiffres. Et lorsque nous lui posons la question de sa voir si «tout va bien», il éclate : «Aujourd’hui, j’ai piqué une crise de nerf, en voyant ces chiffres», nous dit-il en brandissant une chemise jaune sur la quelle il y avait écrit «Monsieur le Gouverneur».

Les chiffres dont parlait Chedli Ayari et qui lui faisaient peur et piquer une crise de nerf, sont ceux du commerce extérieur pour les sept premiers mois et 20 jours de l’année 2014. A cette date, les exportations tunisiennes n’étaient même pas en décélération, comme on en avait pris l’habitude. Elles étaient carrément en baisse de 0,7 %. En face, les importations étaient en grande hausse de 6,7 %, avec en lanterne rouge, les 17,2 % de croissance de l’énergie. «Ce gap n’a pas été enregistré depuis 20 ans », s’offusque le Gouverneur de la BCT.

Selon ses chiffres aussi, le déficit commercial se creusait encore et augmentait de 24,5 % et le taux de couverture baissait de cinq points. Jamais, depuis des décennies, le gap du déficit commercial n’avait été aussi grand. Plus de neuf milliards DT (9.063 MDT), contre 7.278 MDT en 2013, 6.702 MDT en 2012 et 4.716 MDT la première année de la révolution, «dans un modèle de production, complètement à contre-sens et un modèle de consommation énergivore».

Le poste qui explose le plus dans les importations tunisienne des 7 derniers mois et 20 jours, «qui constitue le gros problème de la balance commerciale et qui nous bouffe les tripes, car elle n’est pas justifiée par une dynamique de croissance» selon l’expression même de C. Ayari, reste celui des produits d’énergie. Alors que ses exportations, baissaient de 10 %, ses importations augmentaient de 17,2 %, sans compter que le trafic des carburants ne faiblit pas entre la Tunisie et ses deux voisins, la Libye et l’Algérie. Une production en baisse, du fait des tergiversations et des atermoiements de la commission de l’ANC (Assemblée Nationale Constituante) qui donnent un écho favorable aux appels de «Hizb Attahrir» de nationaliser les ressources naturelles tunisiennes et fait désormais peur aux investisseurs étrangers.

Selon les chiffres de l’INS (Institut National de la statistique), ce poste a littéralement explosé, depuis la révolution. Les importations tunisiennes en pétrole brut, sont passées ainsi de 232,6 MDT en 2010, à plus de 1.555 MDT en 2013. Celles du gaz naturel, de 517,9 MDT à 1666,6 MDT. Une explosion qui reste un mystère pour le Gouverneur de la BCT, surtout qu’il ne voit aucune augmentation de la production qui se traduirait par une augmentation des exportations. Même les exportations de l’agriculture et des produits agroalimentaires, ont baissé de plus de 30 % en juillet dernier. En avril 2014 déjà, l’indice de la production industrielle était en berne de 0,7 % par rapport à la même période 2013.

C’est encore ce poste qui donne des cauchemars à Chedli Ayari et lui fait du mauvais sang, tant il voit l’incapacité de la trésorerie tunisienne dont il connait les ficelles de la bourse, à pouvoir payer. Devant nous il explose : «Je continue à dire, à ceux qui veulent bien m’entendre, que ce pays [ndlr : la Tunisie] consomme des volumes d’énergie, qu’il ne peut plus et ne pourra pas payer ». Selon le trésorier de l’Etat tunisien (la BCT) la Tunisie n’a plus les moyens financiers pour payer l’énergie qu’elle consomme ».

Le coût de la consommation tunisienne en énergie, c’est en effet d’après les chiffres que nous a montrés le Gouverneur de la BCT, une facture mensuelle de 300 millions de dollars US, en devises, entre la Steg (compagnie de l’électricité et du gaz), l’Etap (Entreprise des activités pétrolières et importateur officiel du pétrole pour tout le pays) et la Stir (L’unique compagnie de raffinage). Et le Gouverneur de la BCT, toujours aussi remonté, d’ajouter que «ce rythme semble incompressible, est insoutenable… Je souffre le martyre. Chaque jour que le Bon Dieu fait, je suis obligé de claquer l’équivalent de 10 MDT en devises, rien que pour le gaz algérien».

Et lorsqu’on lui demande la solution, le Gouverneur de la BCT nous renvoie illico à ce qui se passe à l’ANC pour les contrats pétroliers. «Nous avons déjà un gap, que dire si au niveau de l’offre on créé des perturbations et on dit qu’il n’y a plus de permis [ndlr : d’exploitation], plus de recherche, un champ fermé par-ci et un autre perturbé par-là etc.. », s’offusquait encore Chedli Ayari.

Le gouverneur en arrive jusqu’à imaginer de possibles «délestages» ou coupures programmées de la consommation électrique et en parle même avec le ministre de l’industrie. «Lorsque tu arrives au point où tu es submergé par les factures énergétiques, comme c’est le cas aujourd’hui, alors que tu n’as pas les moyens de les supporter, il n’y a pas d’alternative».

Pour l’instant, Chedli Ayari ne peut qu’alerter le chef du gouvernement et il l’a fait, nous dit-il. «J’ai demandé que d’ici la fin de l’année, il améliore le déficit commercial d’un milliard DT ou 200 MDT par mois. On est arrivé à gratter seulement 300 MDT». La solution réside dans l’exportation et dans la hausse de la croissance. Or, au cours du 1er trimestre 2014, la croissance n’a été que de 2.3 %. Les projections de la BCT ne tablent pas sur plus de 2.4 %, une petite croissance dans une économie qui reste atone. On n’est pas sorti de l’auberge !

Khaled Boumiza.

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