Tunisie : Le pays où un terroriste «repenti» vaut mieux qu’un homme d’affaires, simplement soupçonné !

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Deux, ou plutôt trois évènements, ont focalisé l’attention la semaine dernière en Tunisie. D’abord deux polémiques faites autour du même sujet. Ensuite, le silence de 100 jours et l’échec, plus cuisant, de bientôt deux années aux deux têtes d’un pouvoir qui n’a pas de pouvoir.

D’abord les deux polémiques. Celle des déclarations du chef de l’Etat tunisien à Paris, en premier lieu. Dans une interview accordée à l’AFP, lors de la présentation de son dernier livre, le président Béji Caïed Essebssi a indiqué que «la Tunisie est obligée, de par sa constitution, d’accueillir tous ses enfants, y compris ceux qui reviennent des zones de conflit ». Et BCE, comme le nommait Manuel Valls, d’ajouter que le «terrorisme est aujourd’hui du passé et bien derrière nous» et que la Tunisie «n’a pas assez de prisons pour enfermer tous les djihadistes revenant des zones de conflit».

Polémique, en second lieu, de l’émission de Samir El Wafi, qui invitait justement dans son émission TV, un terroriste qui se dit repenti, qui a longtemps parlé de ce qu’il faisait et de ses liens avec les «barons» du terrorisme international et auquel les autorités tunisiennes proposent même la protection officielle, au simple motif qu’il est menacé par es anciens amis de Daech. L’homme, dont l’animateur dit qu’il est hautement recherché, parle tranquillement, dans une émission de grand public, en sort en tout cas, libre comme l’air et peut-être même sous bonne garde.

  • «Nos» enfants les terroristes … repentis !

 

On ne fera aucun commentaire sur ces deux polémiques, mais une constatation. Polémique rime avec réflexion, car s’il y a polémique autour d’un sujet, elle part forcément d’une réflexion et suscite donc un débat d’idées. Et on peut même lire, dans l’encyclopédie Wikipédia que, «pour le juriste allemand Carl Schmitt (La notion de politique) et son disciple français Julien Freund (L’Essence du politique), le polémique caractérise le politique (également compris en un sens englobant). Pour ces deux auteurs, le polémique se reconnaît par la polarisation ami/ennemi qui constituerait le principe même du politique». Le lien est ainsi établi entre politique, celle d’une partie de la classe dirigeante, et polémique, celle du retour de ceux que Rached Ghannouchi a présentés simplement comme des musulman en colère. Lui, comme son coéquipier sur la barque Tunisie, ont bien sûr fait des correctifs de leurs déclarations, mais les mots étaient déjà dits et le coup parti !

  • Nos ennemis, les hommes d’affaires dont on veut l’argent !

 

En face, c’est la «caste» des hommes d’affaires, depuis 2011 diabolisée, accusée, rarement jugée, toujours harcelée et intimidée, quelques fois rackettée, encore diabolisée, mais pas encore réhabilitée. Etat et gouvernement en appellent à leur patriotisme, soit pour l’investissement dans les régions délaissées par l’Etat lui-même, soit par la contribution au redressement des finances de ce même Etat.

Depuis 2011 et contrairement aux anciens adversaires de Ben Ali [Ndlr : Rappelez-vous cette émission TV dans ce qui avait été Attounissiya, animée par un avocat désormais notoire et qui a blanchi des terroristes qui ont été par la suite retrouvés dans presque tous les actes terroristes de l’après Ben Ali], cette «caste» qui a pourtant créé richesses, plus-value et emplois, ne trouve pourtant pas de défenseur. Au premier qui le ferait, qui donnerait même la parole à l’un d’eux, on jettera la pierre. Nombre d’entre eux sont interdits de voyage six ans après la «révolution», d’autres sont doublement punis, comme le cas de l’ambassade du Canada qui interdit à Hédi Djilani de voir ses petites-filles.

Ce dernier a plus d’une fois crié son désespoir, sans qu’aucun média ne l’écoute même ou ne l’invite pour en parler. Il n’a pourtant jamais été terroriste, n’a enrôlé que de jeunes entrepreneurs pour la création d’autres richesses pour le pays, n’a jamais financé que des voyages pour l’investissement et plus de développement. Eût-il été un Tarak Maaroufi dans une autre vie, il aurait certainement été invité sur plus d’un plateau TV ! Mais Djilani n’est qu’un cas parmi tant d’autres que, ni l’Utica, ni la Connect, défendent, autrement que de manière timide, entre 4 yeux et dans les coulisses, comme on défendrait des pestiférés.

  • BCE et Chahed ont, tous les deux, failli

En presque deux années à la tête de l’Etat, Béji Caïed Essebssi n’avait soulevé que rarement cette problématique des hommes d’affaires diabolisés, mal-aimés, sauf pour leur argent que tout le monde appelle de ses vœux les plus chers.

Le chef de l’Etat a certes lancé son initiative de réconciliation économique. Il ne l’a cependant pas assez ardemment défendue. Il est même revenu dessus quelque peu au premier tollé, en en rectifiant la cible sur l’Administration.

Depuis, cette initiative dort dans les tiroirs de la vénérée ARP, une Assemblée de démocrates musulmans, mais qui prêchent presque le communisme. BCE a certainement zappé un chapitre dans son livre !

On n’a pas, non plus, encore entendu BCE dire à la presse, que la Constitution interdit qu’on interdise à un Tunisien de se déplacer librement ou qu’on le maintienne 6 années sous la menace d’une instruction latente. Il avait aussi «oublié» de dire que ce qu’endure le monde des affaires en Tunisie, est aussi contraire à plus d’une convention internationale signée par la Tunisie !

En 100 jours de GUN, Youssef Chahed n’a aussi jamais rien dit de tel. Le chef du gouvernement tunisien n’a en effet presque jamais défendu les hommes d’affaires. Il est même resté muet, lors d’un récent clash, en sa présence, avec son ministre des Affaires sociales qui participait indirectement à leur diabolisation, à l’occasion d’une rencontre avec le BE de l’Utica.

Il les a appelés à investir plus, mais n’a jamais cherché à les réhabiliter et à les libérer des entraves d’une justice qui les maintient, depuis 6 ans, en semi-liberté. Cette même justice avait pourtant, maintes fois, libéré des officiellement-soupçonnés de terrorisme, pour «manque de preuves» ou pour vice de procédure. Une justice qui ne semble pas avoir le même souci de mansuétude avec le monde des affaires.

Peut-on prétendre redémarrer la machine économique alors qu’on maintient toujours entravés ses principaux opérateurs ? Peut-on se permettre d’être aussi conciliants et magnanimes avec des terroristes, en projet ou repentis, et avoir simplement peur, de dire haut et fort, que les hommes d’affaires sont tous innocents jusqu’à preuve, irréfutable et à apporter par la justice et les accusateurs de tous bords, du contraire ?

Khaled Boumiza

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