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Tunisie : Des infractions à profusion, un vote sanction et la lourde responsabilité de l’ISIE et des «observateurs» européens.

Alors que le président de l’ISIE, Kamel Jendoubi, répète à qui veut bien l’entendre que son instance reste la seule source viable et crédible pour tout résultat des élections, il y a presqu’un consensus sur le fait que le parti islamiste Ennahdha vient de réaliser un raz-de-marée sur les voix des électeurs de la Constituante. Membre de ce Parti, Samir Dilou jubile même et assure à l’AFP que «l’on n’est pas très loin des 40%, ça peut être un peu plus, un peu moins, mais on est sûr de l’emporter dans 24 (des 27) circonscriptions » du pays, citant « les propres sources » de son parti. Le processus démocratique choisi par les Tunisiens impose donc d’accepter cette nouvelle réalité, car il n’est de l’intérêt de personne de perpétrer les pratiques de l’exclusion, même si elle a été aussi un choix  national de la Révolution. Le vote ressemble ainsi, de plus en plus, à un vote de sanction à l’encontre des 22 années de Ben Ali, contre la mauvaise gestion de la profusion des partis politiques par ces derniers, tout comme la mauvaise gestion d’une élection non basée sur les programmes où l’électeur moyen, abasourdi par la profusion, s’est retourné vers les visages déjà connus.
En espérant qu’elles ne seront pas les dernières que nous vivrons, les élections du 23 octobre 2011, auront certes constitué un exemple de réussite en matière d’organisation. Et même si cela rappelle une autre organisation de jeux sportifs où la Tunisie n’avait brillé que par la bonne organisation, il reste bon de se gargariser des différentes attestations internationales dans ce sens. Il n’en demeure pas moins vrai qu’un raz-de-marée, de quelque parti que ce soit, n’est pas ce qui pourrait arriver de mieux à la Tunisie de l’après dictature de Ben Ali.

Revue de presse des infractions et dépassements.

Ces élections semblent pourtant déjà entachées d’irrégularités, d’infractions et de dépassements de la part de plus d’une partie que la presse locale tunisienne rapporte. Le président de l’instance régionale indépendante pour les élections (IRIE), dans la circonscription de Nabeul 1, Abdelhamid Lamine, a ainsi déclaré à l’agence TAP que « les observateurs de l’IRIE ont relevé, dimanche, des dépassements commis par un parti candidat aux élections, et ce, dans certains bureaux de vote à Nabeul, Dar Chaâbane El Fehri et Hammam Ghezaz ».

 «Des observateurs de ce parti vont dans les cours des écoles pour discuter avec les électeurs et les inciter à voter pour leur liste », a-t-il précisé. Accompagnant le président de l’IRIE dans la circonscription de Nabeul 1, le correspondant de l’agence TAP a remarqué, par ailleurs, la présence de membres du conseil pour la protection de la révolution dans le bureau de Sidi Amor en train de discuter avec les électeurs sous prétexte de les  «renseigner». Le président de l’IRIE les a, immédiatement, évacués du bureau de vote, avec le soutien de l’armée.

L’observatoire du processus électoral « Chahed » fait le constat, dans un communiqué publié, dimanche à midi, d’infractions et de dépassements dans certains centres et bureaux de vote.  Selon les observateurs locaux de « Chahed », « de grands problèmes se sont posés pour les analphabètes qui n’ont pas pu accomplir convenablement leur devoir électoral », outre « l’encombrement enregistré dans plusieurs bureaux de vote », ce qui a contraint de nombreux électeurs à rebrousser chemin. L’observatoire relève, également, « le refus d’accueillir des électeurs pour ne pas avoir présenté leur récépissé d’inscription sur les listes électorales ».  « Chahed » attire l’attention, en outre, sur le fait que certaines listes électorales ne comportent pas les noms d’électeurs qui sont, néanmoins, munis de leur récépissé d’inscription.

D’autre part, des parties ont appelé les électeurs à voter en faveur de certaines listes à proximité de bureaux de vote, ajoute le communiqué de « Chahed », relevant également qu’à Deguèche, des sommes d’argent (jusqu’à 30 Dinars) ont été offertes à des électeurs pour donner leur voix à certaines listes.
La ligue tunisienne pour la citoyenneté a relevé, de son côté, des dépassements dans 6 circonscriptions électorales, indique-t-elle, dimanche, dans un communiqué. Les partisans de quelques partis ont continué de faire la propagande électorale au cours du scrutin. Certains membres de bureaux de vote n’ont pas respecté l’ordre des files d’attente et la saisie obligatoire des téléphones portables au moment du vote, précise le communiqué. Les dépassements en question ont été enregistrés dans les circonscriptions de l’Ariana, la Manouba, Tunis 1, Tunis 2, Ben Arous et Bizerte.

Des têtes de liste et des observateurs ont relevé plusieurs cas de dépassements dans les différents bureaux de vote du pays. A Médenine, ils ont signalé la poursuite de la propagande politique devant les bureaux de vote dans une dernière tentative d’influencer le choix des électeurs.

Plusieurs électeurs ont été inscrits de façon automatique dans des centres éloignés de leur lieu de résidence, constatent aussi plusieurs observateurs. Dans la circonscription de La Manouba, l’Instance régionale pour les élections a reçu des réclamations sur la poursuite, par certains partis politiques, de la campagne et de l’affichage électoral le jour du scrutin. Plusieurs têtes de liste se sont rassemblées devant le siège de l’Instance, appelant à l’urgence de prendre des mesures fermes contre les partis contrevenants.  Une enquête a été ouverte par l’IRIE qui a également informé l’instance supérieure indépendante pour les élections de ces délits électoraux, a assuré le rapporteur de l’IRIE au correspondant de la TAP.

Après la fermeture des bureaux de vote, l’Observatoire National de la Coalition de la Société Civile, piloté par la Ligue Tunisienne des Droits de l’Homme qui a déployé 3800 observateurs couvrant tout le territoire tunisien, a fait état de la poursuite de nombreuses irrégularités, dont notamment des tentatives d’influencer les électeurs et les électrices et d’acheter leurs voix.  L’observatoire en fournira ultérieurement les détails.

Citant l’observatoire électoral  « Chahed », l’hebdomadaire «Al bayane» rapporte plus d’une infraction.  Dans son 3ème communiqué, publié dimanche, il signale qu’au collège Bouhajla (Kairouan), le bureau de vote a fermé provisoirement ses portes devant l’état de désordre qui a régné, en l’absence des forces de sécurité. Plusieurs électeurs ont été privés du droit de vote en raison de la date de livraison de leur carte d’identité qui dépasse le 14 août 2011. Certains observateurs parlent, aussi, de sommes d’argent distribuées aux électeurs par des membres des listes en lice à la Manouba et Jebel Jloud.

Qui validera ces élections sans parler des infractions ? Qui donnera un blanc seing au raz-de-marée ?

Des dépassements similaires ont été relevés dans des bureaux de vote à Sousse, Sfax et Hammamet.  Autres infractions enregistrées : les tentatives de certains candidats d’influencer le choix des électeurs et d’intervenir lors du vote, en l’absence du chef de bureau (Jendouba). Un état de grande confusion a été observé dans le bureau de vote d’El Marr (Tunis), à cause de la forte affluence des électeurs (entre 2500 et 3000). Plusieurs d’entre eux ne figuraient pas sur les listes. Ils ont quitté les lieux sans accomplir leur droit  de vote.

Le site «Al Jarida.com » évoque «des infractions dans le bureau de vote de Bonn en Allemagne». Des membres de ce bureau de vote, selon le journal électronique, auraient invité les électeurs à voter pour la liste numéro 5 d’Ennahdha en infraction flagrante de la loi.  Selon Raouf Khamassi, président de l’association des Tunisiens à l’étranger, ce bureau enregistrerait d’autres infractions à la réglementation en vigueur.

Selon le journal Assabah Al Ossbouii, des dépassements ont été relevés dans des bureaux de vote à Sousse, Sfax et Hammamet, kébili, Kerkennah, Bizerte, Sidi Bouzid .Il s’agit de   tentatives de certains candidats d’influencer le choix des électeurs et d’intervenir lors du vote. Selon la même source, quelques islamistes se sont mobilisés pour inciter  plusieurs  personnes âgées dans la région de Kerkennah,  à voter pour le parti El Ennahdha.

Selon la Ligue tunisienne de citoyenneté, citée par Assabah Al Ossbouii, il y aurait eu des cas d’utilisation de téléphone portable, malgré l’interdiction d’en faire usage. A Kébili, des tentatives d’achat de vote par  distribution de colis alimentaire. A Béja, des tentatives d’achat de vote par  distribution d’argent liquide. À Nabeul, une propagande autour des centres de vote par certains partis politiques et transport en commun disponible  pour ceux qui vont voter en faveur  d’Ennahdha. Sur Facebook, devenue source irrévocable d’information, une femme voilée dissimule clairement sous ses habits un bulletin de vote dans un bureau de vote lors du décompte, et ce n’est pas l’unique témoignage qu’on retrouve sur les réseaux sociaux.

Des infractions existent donc. Cela ne fait plus aucun doute. A moins de faire comme Ben Ali et minimiser en disant qu’elles ne sont que le fait d’éléments isolés, comme pourraient le faire l’ISIE de Kamel Jendoubi ou les observateurs européens, il s’agit donc de les traiter et de prendre les sanctions que prévoit la loi. Il s’agit aussi de faire publiquement état du rapport de la Cour des Comptes à propos de l’argent de la politique, avant d’annoncer les résultats de ces élections. Les valider telles qu’elles sont et avant de traiter les infractions et de les sanctionner, équivaudrait  à valider le flou, le même système que celui de Ben Ali !

Khaled Boumiza.

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