AccueilLa UNETunisie : Enfin, l’agenda tant attendu de l’après Jbali !

Tunisie : Enfin, l’agenda tant attendu de l’après Jbali !

La semaine dernière, à sa sortie du séminaire sur la lutte contre la corruption, le chef du Gouvernement provisoire tunisien, Hamadi Jbali, annonçait devant les journalistes que «la mission de mon gouvernement prendra fin le printemps prochain». L’information, même aussi imprécise, car le printemps dure 3 mois, était presque passée inaperçue. Elle précise pourtant sa déclaration précédente, au siège de l’Union Européenne à Bruxelles, que «les prochaines élections tunisiennes se dérouleront dans un délai de 18 mois». Il faut tenir compte, pour plus de précision, de cette autre déclaration de son conseiller politique, Lotfi Zitoun, que «les premières élections législatives de l’ère post-Ben Ali devraient se tenir en mars 2013».

Le mérite de la déclaration de Lotfi Zitoun à l’agence de presse Reuters, c’est d’avoir évoqué ce que toute la Tunisie politique attend, la feuille de route pour cette prochaine année (mars 2012-mars 2013). «Il existe un accord entre les partis de la troïka au pouvoir pour établir une feuille de route (pour des élections) afin de rassurer l’opinion publique ainsi que les investisseurs nationaux et étrangers », a ainsi indiqué Zitoun dont les déclarations ne suscitent pas pour une fois l’indignation de l’opinion publique tunisienne.

– Avant d’aller plus loin, il est bon de se poser la question sur le timing de cette nouvelle annonce, même si elle est bicéphale.

Elle intervenait, en effet, après des mois, durant lesquels toute la classe politique attendait que la troïka au pouvoir tienne sa parole donnée de ne rester qu’une année, le temps de préparer la nouvelle Constitution et d’organiser les prochaines élections. Une année où les indices d’une volonté non déclarée de prolonger la transition, se sont amoncelés. D’abord le gel de l’ISIE et le «traîner-le-pied » pour mettre sur pied une nouvelle instance des élections. Ensuite, le lâcher du pétard du complot contre le gouvernement Jbali. Enfin, l’extension à volonté du délai de mise au point de la nouvelle Constitution, jusqu’à en oublier presque les demandes urgentes de la Révolution qui avait fait arriver Jbali et toute Ennahdha au pouvoir et au gouvernement, même si c’était au détour d’un complot constitutionnel. Alors que s’achève la période de grâce de 3 mois, le gouvernement de Hammadi Jbali, peine encore à commencer son vrai travail de gouvernement et ne réussit qu’à allumer des brasiers sur plus d’un front. Les plus importants ont été ceux des médias, de l’UGTT et la division idéologique du pays entre laïques et religieux.

Elle intervenait aussi, presqu’au même moment que la tenue du meeting de Béji Caïed Essebssi à Monastir. Une réunion, à l’origine de laquelle se trouvait une initiative qui a fortement perturbé tous les plans d’Ennahdha. On en veut pour preuve les attaques répétées dont avait été l’objet l’initiative de l’ancien Premier ministre et même sa personne, par les plaintes déposées contre lui, alors qu’il n’en avait jamais été question, ni pendant son ministère transitoire, ni avant lorsqu’il fallait choisir un successeur au gouvernement de Mohamed Ghannouchi. Une initiative dont le but avoué était d’unifier le front de l’opposition qu’Ennahdha était arrivée à maintenir dans la division face aux choix que ce parti islamiste tentait d’imposer par tous les moyens.

– Il faut, enfin, tirer les conclusions de toutes ces déclarations du cabinet Jbali.

. La première de ces conclusions, est que la seconde période de transition se terminera, en mars 2013. Les dissensions partisanes, tant au sein de la troïka gouvernante qu’au sein de l’opposition, les ambigüités de gouvernance entre chef du Gouvernement et chef de l’Etat, les débordements devenus ingérables des ailes dures du mouvement religieux en Tunisie [Les Salafistes avec l’apogée de l’affaire du drapeau] et la multitude de gaffes commises, auraient ainsi fini par convaincre l’équipe dirigeante de mettre la clé sous la porte, d’une manière décente, sans risquer de perdre la face. Cela ne pouvait se faire qu’à travers le respect de la parole donnée dont Ennahdha peut tirer politiquement profit.

. La seconde de ces conclusions, est que le gouvernement Jbali a fini par avouer son propre échec à relever économiquement un pays mis à sac et mis à genoux par une population dont il n’a pas pu soigner les blessures d’un demi siècle entier.

. La dernière et non des moindres, est que la Révolution tunisienne a su rester assez vivace pour imposer ses propres choix, même aux vainqueurs. La pression exercée sur le parti au pouvoir et son gouvernement, par l’opposition, par la société civile dans toute sa diversité et même par les part dits de 0, %, a enfin réussi à modifier l’orientation prise par le nouveau pouvoir en place. Tout cela, à travers ses manifestations, ses communiqués, la résistance des médias et son refus du retour aux anciens réflexes.

– Il faut attendre le contenu de la feuille de route.

La Tunisie de l’après Ben Ali a ainsi gagné sa feuille de route pour la période de l’après Ennahdha.

Nul ne doute que le parti islamiste n’a jamais été à l’origine de la Révolution et qu’il en a seulement tranquillement cueilli les fruits. Plus rudement, on dira que c’était le premier à enfourcher la Révolution pour essayer d’en dessiner les perspectives. Il n’y a pas, jusqu’ici, réussi.

Selon les informations dont semble disposer le quotidien Al Maghreb, la nouvelle feuille de route, actuellement en discussion entre les partis de la troïka et d’autres n’y appartenant pas, et qui pourrait être annoncée dans les prochains jours, comprendrait 3 axes :

1) Une Constitution dont l’écriture se terminera avant la fin de l’année en cours et probablement adoptée, le 23 octobre prochain, pour la symbolique de la date.

2) Une Constitution qui sera consensuelle et évitera les sujets qui fâchent et qui pourraient être l’objet de gros différends comme pour le cas de la Chariâ.

3) Des élections législatives et présidentielles qui pourraient se tenir, le 20 mars 2013, toujours pour la symbolique de la date du 20 mars liée à l’Indépendance.

Même si tout cela reste encore du domaine des informations de presse, cette feuille de route semble indiquer au mois deux choses. La première est que l’accord paraît enfin être trouvé sur le maintien en l’état de l’article premier de la Constitution de 1956, évitant ainsi les différends et les tergiversations sur l’introduction de la Chariâ. Ceci avait été clair, dans différentes déclarations de différents seconds couteaux d’Ennahdha, le parti islamiste au pouvoir en Tunisie. La seconde est que le consensus politique semble être réalisé autour du type de régime politique à mettre en place pour la Tunisie de l’après Ben Ali : un régime présidentiel amélioré.

Si tout cela est vrai, si le gouvernement Jbali ne se dérobe pas et qu’il ne retombe pas encore dans le double langage de son parti, les préparatifs aux prochaines élections ne devraient pas tarder. Le premier indicateur devrait en être une annonce officielle qui redonnerait vie à l’ISIE dont l’expérience en matière d’organisation et de garantie de transparence n’est plus à démontrer. Donc, wait and see !

Khaled Boumiza

- Publicité-

LAISSER UN COMMENTAIRE

S'il vous plaît entrez votre commentaire!
S'il vous plaît entrez votre nom ici

Réseaux Sociaux

108,654FansJ'aime
480,852SuiveursSuivre
5,135SuiveursSuivre
624AbonnésS'abonner
- Publicité -