AccueilLa UNETunis : Le pétard mouillé d’un chef de gouvernement en court d’appuis.

Tunis : Le pétard mouillé d’un chef de gouvernement en court d’appuis.

Faisons, d’abord, un petit retour sur l’historique des déclarations du chef du Gouvernement tunisien, Hammadi Jbali, depuis qu’il a fait éclater la crise politique qui secoue la sphère politique et sociale de la Tunisie et qui sévit toujours, depuis.

– Mercredi 6 février 2013. Costume et cravate noirs, en signe de deuil sans l’annoncer, Hammadi Jbali prend de court tout le monde et annonce, le soir même de l’assassinat de Chokri Belaid, son intention de mettre en place un nouveau gouvernement, apolitique et technocrate. «J’ai reçu le message, j’ai retenu la leçon et j’en assume la responsabilité», disait-il en précisant que «ce nouveau gouvernement aura pour unique mission la gestion courante du pays, jusqu’à l’organisation, dans les plus brefs délais, de nouvelles élections présidentielles et parlementaires, sous contrôle d’observateurs internationaux». Il demande incessamment au président de l’ANC, dans le même discours surprise, de fixer officiellement la feuille de route de la période de transition.

– Vendredi 8 février 2013. Costume bleu nuit et cravate bleue aussi, Hammadi Jbali introduit une légère variante sur son discours du 6 février. Il ne parle plus de gouvernement de technocrates, mais de «gouvernement de compétences nationales, apolitiques, car, dans chaque parti il y a une compétence», avant d’ajouter «Que tout le monde sache que je vais continuer sur cette voie !».

– Samedi 9 février 2013. Intervenant sur la chaîne française France 24, le chef du gouvernement tunisien, Hammadi Jbali n’a pas exclu la possibilité de présenter sa démission, s’il échouait dans la composition de son nouveau gouvernement apolitique et technocrate. «Si je ne trouve pas de soutien politique, je considérerai alors que j’ai échoué et donc j’irai au Président de la République, en application de la Constitution, afin qu’il nomme une autre personne pour former un autre gouvernement», avant d’ajouter que «si les politiciens s’opposent, je me retirerai et j’irai me reposer».

 

Le même jour, dans un communiqué, le chef du gouvernement tunisien, lance un appel à candidatures pour les postes de ministres et secrétaires d’Etat dans le gouvernement, apolitique et technocrate qu’il se propose de constituer, la semaine prochaine, précisant qu’il «n’accepterait aucune condition d’aucun parti en ce qui concerne ces nominations». Le délai pour tout cela était lundi 11 février».

– Dimanche 10 février 2013. Dans une interview accordée à la chaîne satellitaire Al-Arabia, Hammadi Jbali a affirmé ne pas être tenu de passer devant la constituante (ANC), tout en soulignant qu’au cas où la majorité de l’ANC ne serait pas favorable à son initiative, il s’adressera au peuple pour lui dire la vérité, et présentera sa démission au président de la République.

– Vendredi 15 février 2013. Neuf jours après son annonce d’un gouvernement, de technocrates, puis de compétences nationales, mais toujours apolitique, le chef du Gouvernement tunisien reporte son annonce de ce gouvernement. Il ne fixe plus de date. Il parle de continuer les consultations avec les partis politiques qu’il avait réunis pendant 4 heures, ce vendredi-là, sans pouvoir les décider à accepter son initiative telle qu’elle. Une réunion, bizarrement, dont tout le monde semblait être content, aussi bien Ennahdha qui l’avait refusée en bloc, que l’opposition qui l’avait soutenue en bloc !

Constat d’échec d’un homme de parti qui voulait devenir homme d’Etat.

Entre-temps, Ennahdha n’a pas changé d’un iota sa position de refus d’un gouvernement, même de compétences nationales mais apolitique. Dans une joute oratoire à l’iranienne, devant pas plus de 60 mille personnes, alors qu’il en promettait un million, sur l’Avenue Habib Bourguiba, Rached Ghannouchi dit même et redit qu’Ennahdha ne quittera pas le pouvoir. «Rassurez-vous, Ennahdha se porte bien (…) et ne cèdera jamais le pouvoir tant qu’il bénéficie de la confiance du peuple et de la légitimité des urnes », a clamé Ghannouchi qui poussera le bouchon jusqu’à dire qu’Ennahdha est «l’objet, depuis son arrivée au pouvoir, il y a un peu plus d’un an, d’une série de complots qui ont culminé avec la proposition d’un gouvernement de technocrates (…) ce qui équivaut à un coup d’Etat contre le gouvernement élu». Une journée auparavant, le CPRiste Salim Ben Hamidane, traitait Jbali de contre-révolutionnaire et de sniper contre les révolutionnaires. A Jbali, il y aura même l’obligation de se voir, de nouveau, nominé par Marzouki s’il présentait sa démission, et peut-être qu’il fera de nouveau le coup du gouvernement de technocrates, qui sera refusé, puis Jbali démissionnera de nouveau et sera de nouveau nominé par Ennahdha qui lui fera indéfiniment perdre la face. D’ici là, l’incertitude demeure !

Jbali voulait devenir un homme d’Etat, il a été vite rattrapé par son parti qui tient manifestement à le ramener à sa véritable dimension de SG d’Ennahdha. Le chef du Gouvernement tunisien, voulait aussi manifestement, accélérer le processus de la transition. Il semble cependant manquer d’appuis, ou surestimer le poids de ses supporters, au sein de son propre parti et peut-être à l’extérieur même des frontières. Les mauvaises langues pourraient, en effet, faire le lien entre le ballet diplomatique européen et américain, entre Montplaisir et Dar Dhiafa, et les voix qui s’élèvent maintenant pour un gouvernement, «hybride», disent-ils en politiquement correct. Jbali réussira, peut-être, à réconcilier tout le monde. Il n’en a pas moins échoué à le faire, tout seul et à sa manière, comme il l’avait promis à toute la Tunisie qui l’avait alors cru et soutenu !

Khaled Boumiza.

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