Tunisie : Les correspondances à charge de la BCT contre le gouvernement qui aurait fait la sourde oreille

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La Banque centrale de Tunisie a dévoilé toutes les correspondances qu’elle a adressées à la présidence du gouvernement comprenant tous les efforts qu’elle a conduits dans le cadre du dossier ayant abouti à l’inscription de la Tunisie par le Gafi dans la liste des pays exposés au blanchiment d’argent et au financement du terrorisme.

Ces correspondances, datées et circonstanciées, ont été communiquées à l’Assemblée des représentant du peuple (ARP) dont la Commission des finances a procédé mercredi à l’audition du gouverneur de la BCT, Chedly Ayari, objet d’un processus de révocation initié par le chef du gouvernement, Youssef Chahed, de concert avec le président de la République, Béji Caïd Essebsi, auquel revient en dernier ressort la prérogative de promulguer le décret de révocation sur la base du vote des députés qui se réuniront demain jeudi en séance plénière.

La première correspondance remonte au 6 mai 2014, date à laquelle la BCT avait déjà informé la Primature de l’intention de la Banque mondiale de procéder à une évaluation du système tunisien de lutte contre le blanchiment d’argent et de financement du terrorisme (LBC/FT), et sollicitant son feu vert pour une mission sur terrain de la BM. A cette correspondance s’ajoutaient d’autres d’ordre procédural et technique. Le 21 septembre 2015, la BCT           a informé la Kasbah que la Commission tunisienne des analyses financières (Ctaf) a reçu la 3ème mouture du projet de rapport d’évaluation du système LBC/FT élaboré par les experts de la Banque mondiale au terme de leur visite en Tunisie. Une correspondance demeurée sans réponse de la part de la présidence du gouvernement qui en fait autant pour celle qui lui a été adressée le 18 février 2016 comportant les premiers résultats sur les nombreuses carences constatées en matière de LBC/FT comme pour une autre en date du 6 mai 2016, relative au rapport d’évaluation commune et ses résultats outre l’avertissement que la Tunisie serait placée sous la surveillance du Gafi au cas où elle ne prendrait pas les mesures d’ajustement requises durant la période de surveillance.

Les injonctions du Gafi

Dans cet ensemble de correspondances, il ya lieu de relever notamment celle, en date du 6 mai 2016, portant sur les résultats de la 3ème assemblée générale du Gafi pour la région MENA informant la Tunisie de son placement sous surveillance et suivi et lui enjoignant de présenter un rapport d’étape sur les mesures prises par les autorités tunisiennes. Elle a été suivie d’une autres relative aux recommandations du Gafi soulignant la nécessité de prendre les mesures d’ajustement requises avant le mois d’octobre 2017, notamment la promulgation du décret gouvernemental fixant les mesures d’application des résolutions du Conseil de sécurité relatives au gel des avoirs des personnes et des structures terroristes, l’accélération de l’amendement du Code des procédures pénales et le renforcement du système de contrôle du secteur bancaire.

Le 2 août 2017, la présidence du gouvernement a été informée que la Ctaf a reçu une invitation officielle pour participer à la réunion du Gafi à Kampala (Ouganda) le 21 septembre 2017 aux fins de la discussion des progrès réalisés par la Tunisie dans ses efforts visant à remédier aux carences relevées par le rapport d’évaluation commune, et ce dans le but de la faire sortir de la surveillance .

La BCT soulignait alors que le rapport du Gafi issu de la rencontre de Kampala aboutirait à deux résultats. D’abord, au cas où le Gafi/ Mena conclurait que la Tunisie a réalisé des progrès concrets dans ses efforts visant à remédier aux carences épinglées, il proposera la sortie de la Tunisie de la sphère de surveillance. Ensuite de quoi, le Gafi pourra proposer à son assemblée générale la poursuite par Gafi/Mena de la surveillance de la Tunisie à travers le suivi renforcé, et c’est ce que voulait la Tunisie.

Le gouvernement aux abonnés absents

En revanche, si Gafi/Mena constatait que la Tunisie n’a pas pris assez de mesures pour éviter les carences pointées par le rapport d’évaluation commune, il établira, en concertation avec le gouvernement tunisien, un plan d’action exigeant un engagement politique écrit de haut niveau de la part des autorités tunisiennes aux termes duquel elles œuvreront à mettre en œuvre le plan d’action conformément au calendrier qui leur est fixé, pour éviter les carences stratégiques. L’Assemblée générale du Gafi émettra, à ce propos un avis au public au sujet des carences de la Tunisie en la matière en octobre 2017, un développement chargé de conséquences négatives sur la notation souveraine de la Tunisie et sa crédibilité dans les marchés internationaux. C’est ce qu’il fallait éviter, avertissait la BCT qui ajoutait que sa correspondance à la présidence du gouvernement n’avait été suivie d’aucune réponse.

Ce fut le même sort qui a été réservé par la Primature à une autre correspondance de l’institut d’émission sur les propositions de la Ctaf demandant la tenue d’un conseil ministériel restreint pour la mise en place d’un plan d’action enjoignant aux structures et ministères concernés d’appliquer toutes les mesures exigées par le Gafi eu égard aux fâcheuses conséquences qui découlerait de la non application de ce plan.

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