AccueilLa UNEARP : La fin du duopole Ennahdha-Nidaâ !

ARP : La fin du duopole Ennahdha-Nidaâ !

Pour ordinaire qu’elle soit, la session parlementaire qui s’ouvre demain n’en cultive pas moins une singularité non seulement due au fait qu’elle est la dernière de l’actuelle législature avant les échéances électorales ( législatives et présidentielle) de 2019, mais surtout parce qu’elle s’offre à une recomposition qui pourrait mettre fin à ce duopole qu’exerçaient à ce jour les deux partis majeurs, le vainqueur du scrutin de 2014, Nidaâ Tounès, et celui qui a raflé la mise en s’arrogeant la part du lion en dépit de son rang de second couteau, le mouvement Ennahdha.

C’est que chemin faisant, une troisième force parlementaire et ipso facto politique a pris naissance sur les décombres de la formation politique dont le fondateur n’est autre le président de la République, Béji Caïd Essebsi, dont le fils Hafedh, croyant sans doute à une hypothétique succession dynastique, s’est signalé par une gestion si malavisée qu’elle a relégué son parti au rang de faire-valoir, au mieux d’un partenaire qui a de moins en moins voix au chapitre. A coups de désertions qui se chiffrent par dizaines, Nidaâ Tounès a vu ses « militants » et pis, ses élus, aller chercher ombrelle sous d’autres latitudes sans pour autant proposer leurs services à des parties adverses.

La « Coalition nationale » -c’est ce dont il s’agit- est désormais une donnée dont il importe de tenir compte. Avec un groupe parlementaire qui compte pas moins de 43 députés, pour l’heure, car il est fort vraisemblable qu’ils soient rejoints par d’autres, ce nouveau conglomérat aura vocation à peser de tout son poids sur le travail parlementaire, l’adoption ou le rejet de projets et propositions de loi et à devenir le soutien sans égal dont le chef du gouvernement, Youssef Chahed, a cruellement besoin. Un accotoir si crucial qu’il lui permettra de parer aux coups et aux barrages de tirs de son ex famille politique qui le voue aux gémonies en tant que renégat, et plus encore aux menées du président de la République qui le somme de solliciter un vote du Parlement. Sans parler bien sûr de la centrale syndicale en état de belligérance permanent contre sa personne-dont elle se défend, pourtant- et ses politiques portées par des réformes dont elle ne veut point entendre parler.

Chahed a-t-il totalement les coudées franches ?

Pour autant, Chahed aura-t-il véritablement les coudées franches pour mener à bien ses politiques, même avec 43 députés, alors qu’Ennahdha en compte 68 et Nidaâ 47 ? S’il semble assuré de l’appui du parti de Rached Ghannouchi, moyennant quelques contreparties, dont la plus exigible et celle de ne pas se porter candidat à l’élection présidentielle, rien ne permet de conclure catégoriquement qu’Ennahdha a rompu les ponts avec BCE comme annoncé par celui-ci lors de sa dernière apparition télévisé du 24 septembre. D’ailleurs, le parti qui détient la majorité parlementaire de facto, s’est empressé d’affirmer, le lendemain même, dans un communiqué des plus officiels qu’il est toujours attaché à la « voie du consensus » en tant que fondement de la stabilité de la Tunisie.

L’un de ses hauts responsables, Saïd Ferjani, a affirmé dans une déclaration à  » Middle East Eye » (MEE) que « l’alliance n’a pas pris fin », tout en estimant que « la dernière annonce de Béji Caïd Essebsi et la réponse d’Ennahda sont significatives car elles montrent que le système semi-présidentiel inscrit dans la constitution est plus puissant que l’affirmation de BCE selon laquelle il avait une suprématie de facto en tant que président ». «Le président n’a plus de pouvoir absolu, son pouvoir est maintenant limité en vertu de la constitution de 2014 », a-t-il ajouté.

Un réalignement politique, sans plus !

Cette assertion est corroborée par des analystes, cités par MEE, qui ont exclu la fin de la coalition au pouvoir en Tunisie et considèrent ce qui se passe comme une « période de réalignement politique dont les conséquences ne se sont pas encore pleinement concrétisées ». Michaël Ayari, grand analyste tunisien à l’International Crisis Group, a déclaré: «Pour le moment, l’alliance gouvernementale entre Nidaâ Tounes et Ennahda n’est pas interrompue », estimant que « la période de duopole entre Nidaâ Tounes et Ennahdha a été quelque peu étouffante et n’a pas connu de réformes profondes ».

«Il faut lire entre les lignes. La rupture est entre Béji Caïd Essebsi et Rached Ghannouchi, le président du parti islamiste, et peut-être entre l’actuelle direction exécutive de Nida Tounes et la direction d’Ennahdha », a-t-il déclaré à MEE. « Ce n’est pas entre les deux parties dans leur ensemble, et surtout pas entre les islamistes et les soi-disant laïcs. » Ayari a estimé que les votes parlementaires détermineront désormais l’avenir des alliances. « Si le bloc de Nida Tounès prend une position différente de celle d’Ennahdha, nous pourrons parler alors d’une rupture de l’alliance parlementaire actuelle. Ce n’est pas encore le cas ».

Pour sa part, Anthony Dworkin, haut responsable politique au Conseil européen des relations extérieures, a déclaré que de nouvelles alliances pourraient constituer un développement positif en Tunisie. « La période de duopole entre Nidaa Tounes et Ennahdha a été quelque peu asphyxiante et n’a pas connu de réformes profondes, il est donc temps d’adopter une nouvelle approche, même si cela comporte également des risques », a-t-il déclaré à MEE.

L’UE, le plus grand partenaire économique de la Tunisie, continuera de travailler en étroite collaboration avec Youssef Chahed car elle «partage largement son approche réformiste», a déclaré Dworkin. Un porte-parole de l’UE a précisé à MEE que l’UE ne prend pas position sur la politique intérieure, mais ‘«elle a un intérêt stratégique dans une Tunisie démocratique, stable et prospère».

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