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L’éducation « mère de toutes les réformes » renvoyée à la Saint-Glinglin !

En Tunisie, peut-être davantage qu’ailleurs, la pandémie du coronavirus a révélé l’échec de la société civile à réaliser une réforme significative du système d’éducation publique tunisien, qui est en difficulté. Au-delà du manque d’accessibilité, les difficultés rencontrées par les étudiants et les enseignants découlent de la faiblesse des infrastructures et de l’insuffisance des services de base, en particulier dans les zones rurales comme Kasserine, Kairouan et Sidi Bouzid. Mais il s’y ajoute d’autres défis comme la  fuite des cerveaux qui s’accélère à la vitesse grand V,  et le taux de décrochage  scolaire qui continue d’augmenter à un rythme alarmant. Les étudiants tunisiens ne bénéficient en moyenne que de 7,1 années de scolarité. Une grande partie des problèmes actuels de la Tunisie sont la conséquence des réformes populistes de Ben Ali à un système éducatif qui, sous son prédécesseur, Habib Bourguiba, avait distingué la Tunisie pour la qualité et la sélectivité de l’éducation de ses citoyens, rappelle l’analyste auprès de la Commission européenne, Tiziana della Ragione, par ailleurs, experte des politiques et des programmes de financement de l’UE dans la région MENA. 

Au lendemain de la révolution, reconnaît-elle, le système éducatif a connu quelques améliorations, avec un budget annuel accru et la formulation de différentes initiatives politiques, telles que le « Dialogue national sur la réforme de l’éducation » de 2015], le Livre blanc sur l’éducation de 2016] et le dernier Plan stratégique (PSC) 2018-2022[12], visant à réformer le système éducatif, à améliorer la formation des enseignants, à moderniser les programmes et les infrastructures. Ce qui manque pourtant,  c’est une réforme structurelle qui se concentre d’une part, sur le renforcement de la décentralisation des décisions financières, pédagogiques et administratives, et d’autre part, sur le renforcement de l’utilisation des nouvelles technologies de l’information dans les écoles].

Le gouvernement de Hichem Mechichi a les mains pleines pour relever les graves défis économiques du pays, aggravés par la pandémie de coronavirus. Il est clair que l’éducation n’est pas la priorité absolue du gouvernement, mais l’incapacité d’un gouvernement démocratiquement élu à relever efficacement les défis éducatifs n’a fait qu’intensifier le mécontentement populaire. En janvier 2017, les enseignants du primaire et du secondaire, avec le soutien de leurs syndicats, notamment le Syndicat général de l’enseignement de base (SGEB-UGTT) et le Syndicat général de l’enseignement secondaire (SGES-UGTT), tous deux membres de l’UGTT, se sont réunis dans tout le pays pour protester afin d’exhorter le gouvernement à garantir une éducation de qualité pour chaque étudiant et à exiger la démission du ministre de l’Education Neji Jalloul, obtenue quelques mois plus tard, mais les vrais défis sont restés les mêmes. La gestion des écoles n’a pas été améliorée et les infrastructures scolaires n’ont pas été modernisées ; les enseignants ont continué à protester, affirmant que l’enseignement était compromis par la précarité et le manque de sécurité de base dus aux infrastructures, en particulier dans les zones rurales.

Une mosaïque de petites organisations

Malgré les résultats limités de leurs syndicats, la société civile n’a pas renoncé à exprimer ses besoins dans le secteur de l’éducation et a trouvé d’autres canaux parallèles, tels que les ONG, pour défendre ses intérêts. Toutefois, à l’instar des syndicats, les ONG ont également connu une profonde transformation au cours de la période post-révolutionnaire.

Le cadre juridique de 2011 régissant la société civile a donné naissance à un nombre écrasant de nouvelles petites organisations aux programmes et orientations différents, ce qui a entraîné une polarisation entre les organisations laïques et religieuses. Le 19 septembre de cette année, 23 569 ONG étaient inscrites au registre national des associations, une myriade d’organisations politiques, économiques, religieuses, sociales, culturelles et de bonne gouvernance. Les programmes éducatifs de ces nouvelles organisations sont variés, allant de l’inclusion des étudiants les plus vulnérables dans le système scolaire ; la recherche d’investissements publics dans l’éducation, la réduction des différences dans le secteur éducatif entre les zones urbaines et rurales ; la promotion du débat éducatif et une plus grande sensibilisation aux besoins d’une réforme.

Le grand nombre d’organisations ayant des programmes concurrents a rendu presque impossible la coordination de leurs actions, d’autant plus que la plupart de ces organisations ont peu d’affiliés et un taux de rotation élevé, principalement en raison de ressources financières limitées, ce qui compromet leur survie. Cela est particulièrement vrai pour certaines organisations de la société civile du centre de la Tunisie, comme les provinces de Kairouan, Sidi Bouzid et Kasserine, qui souffrent d’un manque de ressources et sont souvent oubliées.

La « mère de toutes les réformes » peut attendre !!!!

Le nouveau gouvernement a été formé le 1er septembre 2020 et les premiers entretiens entre le Hichem Mechichi et le secrétaire général de l’UGTT, Noureddine Tabboubi, ont porté sur les défis économiques et l’urgence de la santé publique, tandis que la réforme de l’enseignement public n’a pas encore été abordée.

Il est difficile de prévoir combien de temps devra attendre « la mère de toutes les réformes », comme le président tunisien l’a lui-même mentionné à propos de la réforme de l’éducation. Même les cris des manifestants pour la mort de Maha Gadhgadhi, 11 ans, n’ont servi à rien et rien n’a changé, si ce n’est une intervention opportune et « urgente » visant à endiguer les fissures du système qui ne sont que trop visibles aujourd’hui.

Il est clair que sans une société civile forte et bien organisée, capable de coordonner ses actions et de parler d’une seule voix, ces protestations ne parviendront probablement pas à persuader le gouvernement de mettre en œuvre le type de réforme qui, selon les experts, pourrait contribuer à prévenir un nouveau déclin économique en produisant des diplômés dont les compétences répondent aux demandes du secteur privé et sont en phase avec les besoins de l’économie[34].

Dans ce contexte, où la pandémie de coronavirus pourrait s’aggraver en Tunisie, il est raisonnable de supposer que les conséquences les plus graves seront ressenties par les étudiants, dont beaucoup risquent d’être laissés pour compte, conclut l’analyste auprès de l’UE.

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