AccueilLa UNEL’Etat, très mauvais payeur, maître chanteur et tueur d’entreprises !

L’Etat, très mauvais payeur, maître chanteur et tueur d’entreprises !

D’abord, ce Post de l’ancien «patron des patrons» tunisiens, Hédi Djilani. «L’État signe des contrats avec les entreprises, qui prennent des crédits pour acheter les équipements. L’état ne paye pas, et les entreprises forcément ne payent pas les banques, et rapidement, les établissements financiers sont en difficultés, surtout le secteur du leasing qui est en train de mourir. Il est urgent que l’État assume sa responsabilité et paye les entrepreneurs, pour sauver le secteur des entreprises de VRD, et le secteur du leasing». disait, à juste titre, l’ancien président de l’Utica.

Ensuite, cette histoire, racontée par Nabil Karoui, le soir de sa sortie de prison. L’ancien candidat aux présidentielles anticipées de 2019, raconte, en effet, avoir rencontré derrière les barreaux un septuagénaire qui purgeait une lourde peine pour émission de chèques sans provision. Il s’agirait en fait d’un entrepreneur qui aurait eu des marchés publics, impayés par l’Etat. Un autre homme d’affaires, qui a requis l’anonymat, nous a fait part d’un crédit de 200 MDT qu’il aurait contracté auprès de différentes administrations.

Tout cela illustre en fait la situation, de plus en plus difficile, de la grande majorité des entreprises qui travaillent sur des marchés publics. La problématique n’est pas nouvelle, mais elle concerne désormais des sommes d’argent super-importantes. Cela ne caractérise, cependant, qu’un seul volet du problème. D’abord, le volet fiscal, où l’Etat doit des milliards de dinars aux entreprises tunisiennes, qui restent impayés.

  • La carotte des contrats de l’Etat, et le bâton du contrôle fiscal approfondi

Radhi Meddeb s’est penché sur la question. «En 2008, l’Etat retenait 1,5 Milliard DT des entreprises», dit-il à Africanmanager. Il s’agissait, en fait, de trop-perçu en taxes et impôts reçus par l’Etat. «Cette année-là, le PIB de la Tunisie était de quelque 80 Milliards DT. En 2019, il devrait être de 115 Milliards DT et 125 Milliards DT en 2020 », dit encore Meddeb qui citait, jusque-là, des chiffres MF (ministère des Finances). Et de continuer que «si on reste dans la même proportion de 2 % du PIB en 2008, qui est l’argent des entreprises retenu par l’Etat, on devrait maintenant être à 2,5 Milliards qui sont du trop-perçu en taxes et impôts que les entreprises n’ont pas récupérés de l’Etat», précise Radhi Meddeb, pour donner une idée précise sur ce problème. Et l’expert d’expliquer que «à chaque contrat facturé à l’Etat, ce dernier fait une retenue à la source de la facture, variant entre 1,5 et 15 % du montant de la facture, à faire valoir sur l’impôt final».

L’idée était, au début, de mettre un «fil à la patte» à toutes les transactions de l’administration avec les entreprises. Les services du fisc devenaient ainsi en mesure de connaître toutes leurs transactions et de les tracer au dinar près. Et partant, de mieux quantifier les taxes et impôts dus.

Au fil des ans, les retenues non remboursées deviennent plus volumineuses que tout l’impôt dû par les entreprises à l’Etat. Des entreprises, parfois déficitaires et endettées, et qui subissent pourtant toujours ces retenues à la source.

Des retenues, presqu’impossibles à recouvrer et qui s’ajoutent, parfois indûment, aux ressources de l’Etat. Un énorme manque à gagner pour les entreprise, et un gros boulet financier qui handicape les entreprises, d’autant que son recouvrement reste conditionné à des demandes des entreprises, qui déclenchent automatiquement presque des contrôles fiscaux approfondis, et de longues procédures judiciaires pour des redressements fiscaux où la justice se range rarement du côté de l’entreprise. Sur cette question des contrôles approfondis, le ministère des Finances reste muet à nos demandes d’information.

Un ancien président français avait, de son temps, décidé que le trop perçu en TVA doit être remboursé sous quinzaine aux entreprises. Cette simple réduction des délais de remboursement avait alors permis d’injecter 12 Milliards € dans la trésorerie des entreprises, et partant, dans l’économie.

  • Des marchés de l’Etat qui a des difficultés à payer ses fournisseurs

L’autre volet, c’est celui du paiement des contrats accordés ou remportés par les entreprises, dont les publiques. L’impayé, dans certains cas, dépasse même le délai des 360 jours. Radhi Meddeb cite des exemples dans le secteur des BTP où «le projet est généralement financé à 80 % par des fonds arabes ou étrangers et à 20 % par l’Etat tunisien. Et ce sont ces 20 % qui restent impayés aux entreprises».

  1. Meddeb ne le dira pas, et refusera même de le commenter, mais cela permet à l’Etat, selon d’autres experts qui ont requis l’anonymat, de cacher une partie de son déficit budgétaire, en n’inscrivant pas les dépenses au titre de ces projet, les montants n’étant pas encore déboursés.

Des techniques qui remettraient presqu’en cause le taux de 3,9 % de déficit budgétaire inscrit dans les documents officiels. Mais des pratiques, celles des impayées aux entreprises, publiques et privées, qui mettent en danger ces entreprises. Parfois même, comme en avait témoigné l’ancien candidat aux présidentielles à sa sortie de prison, l’intégrité physique des dirigeants de ces entreprises.

Des pratiques qui ont, cette année, presque mis à genoux le secteur du leasing, mais aussi celui des banques, où les impayés des entreprises s’accumulent, obligent à des provisions qui amoindrissent les bénéfices des banques et parfois plus que cela. Mais des pratiques aussi, qui impactent les délais d’exécution de certains projets d’infrastructure et leur mise en activité. En un mot, des pratiques avec lesquelles l’Etat se met le doigt dans l’œil, tuent les poules aux œufs d’or, en emplois et en fiscalité, que sont les entreprises.

  • Et l’Etat qui payait ses dettes aux entreprises, publiques et privées ?

Rappelons, après tout cela, que toutes ces pratiques d’impayés fiscaux et de contrats de prestation de services, sont dues au fait que l’Etat manque d’argent. Un manque d’argent, à son tour, consécutif au fait que presque la moitié des ressources de l’Etat vont va salaires et au paiement des dettes qui vont, elles aussi, en grande partie aux salaires, à la compensation des produits de première nécessité, dont le thé, le café et le sucre, et très peu à l’investissement. C’est tout cela que le prochain gouvernement aura à gérer et à solutionner.

Reste à savoir s’il le pourra. La réponse devient problématique lorsqu’on sait que l’actuel ministre des Finances et ses services du fisc ont déjà fait, cette année, tout (et même un peu plus) ce qu’il fallait faire pour augmenter les ressources de l’Etat. A fin septembre 2019, ils avaient collecté un peu plus de 23,830 Milliards DT, dont 21.377.2 MDT (en hausse de 18,5 %) en impôts et taxes. Des ressources propres, en hausse de 19,1 % par rapport à septembre 2018.

Le prochain gouvernement pourra-t-il faire mieux, sans trucider cette fois la poule aux œufs d’or ? Tirer sur l’ambulance, fera-t-il ressusciter une économie déjà mourante ?

Imaginons, pour terminer, le volume d’argent qui pourrait être injecté dans l’économie, si l’Etat remboursait plus facilement les trop-perçus fiscaux et payait, plus vite ses fournisseurs. Il n’y aurait au moins plus de crise de liquidité, les entreprises paieraient leurs dettes aux banques. Ces dernières n’accableraient plus les entreprises avec les taux d’intérêt et les pénalités de retard, et ne seraient plus obligées de puiser dans leurs bénéfices pour provisionner les impayés des entreprises.

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1 COMMENTAIRE

  1. Malheureusement, l’état qui nous représente paye ceux qui ne travaillent pas aux dépends de ceux qui travaillent. A qui la faute ? Certainement à la course vers les chaises politiques, à la peur des rançonneurs et de ceux qui veulent à tous prix mettre la main sur tout gouvernement qui s’installe.
    La question de qui fait quoi en Tunisie, s’est plusieurs fois posée.
    Les compétences et les solutions existent, mais il faut du courage et de la juste justice pour écarter ceux qui ne sont pas rentables d’une part et réduire les bénéfices sur – calculés pour éviter les risques d’autre part.
    Nous attendons l’état fort et juste.

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