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Tunis : «4,5 %, ça fait dur à avaler», dit le Gouverneur de la BCT qui est pessimiste pour le chômage.

Il y a quelques jours, le FMI (Fonds Monétaire International) confirmait une «amélioration timide» de la situation économique en Tunisie. Le FMI, auprès duquel Tunis se prépare à contracter un nouveau prêt dont on ne connaît pas encore le montant, prévoit une croissance de pas plus de 3,5 % (3,2 % selon la Banque Mondiale), un déficit budgétaire de 7,3 % pour 2013 et des dépenses salariales et de compensation qui avoisinent les 80 % du budget de l’Etat. Tout ceci est loin des projections officielles, toujours aussi optimistes avec notamment une croissance de 4,5 %.

– Ayari affiche, haut et fort, sa différence avec les prévisions du Gouvernement.

Contrairement à ce qu’on avait cru, lorsqu’il avait dit au site Leaders que «la Tunisie est sortie de la récession», Chedli Ayari n’est pas tout aussi optimiste que le Gouvernement ; loin s’en faut. «Moi j’ai toujours dit que nous serons entre 3 et 3,4 % de croissance », indique-t-il, dans un entretien accordé à Africanmanager, pour commenter les chiffres du FMI et de la BM pour 2012. Pour 2013, le gouverneur de la Banque Centrale de Tunisie (BCT), s’inscrit même en faux par rapport au chiffre de 4,5 % du gouvernement. «L’Etat tunisien a effectivement prévu 4,5 % et j’étais le premier à monter en flèche pour dire, au Conseil même des ministres, que ce n’est pas réalisable». Il rejoint ainsi les instances économiques internationales, sans pour autant renier que l’économie tunisienne est sortie de la récession, ce qu’il confirme même avec vigueur.

Il nous relatera ensuite comment le Gouvernement tunisien a tenu tête, dans cette prévision de croissance, et comment il lui a expliqué que «vous avez tort de vous placer sur 4,5 %, car, dans cette période de transition, ça fait dur à avaler pour l’économie tunisienne». Selon lui, le Gouvernement estime le potentiel économique de la Tunisie plus proche de 5 que de 3 % «et donc, disent ceux qui ont confectionné le budget et dont je ne partage pas l’avis, nous avons la possibilité de faire un rattrapage en 2013 et encore accélérer en 2014 pour rejoindre le potentiel de 4,8 %. Ce à quoi, j’ai dit qu’il faudrait, pour cela, que l’appareil productif tunisien se remette en selle de telle manière à rejoindre les 4,8 %». Et Chedli Ayari d’expliquer à Africanmanager, que, «avec les aléas que nous connaissons sur le plan interne, la zone Euro qui est sinistrée en face de nous et l’exportation qui ne sera pas un moteur, des chocs exogènes du prix du pétrole et la variation du prix du Dollar américain, moi je préfère ne pas prendre de pari là-dessus». Entre sa vision et celle du Gouvernement, Chedli Ayari a proposé au Gouvernement la création d’une commission qui sera chargée du monitoring du budget avec obligation, s’il y a lieu, de réviser le taux de croissance cible.

– Ayari, complètement pessimiste sur l’emploi. «La Tunisie doit être un pays d’émigration».

Questionné par Africanmanager, sur le très peu de réalisations économiques, alors que le gouvernement parle de croissance, Chedli Ayari n’a pas cherché à cacher le soleil par un tamis, comme le dit le proverbe. «Bien sûr qu’on est en-dessous des attentes. Bien sûr qu’on traîne des casseroles au niveau des déficits du pays et qui sont emmerdants, je le sais», dit-il, sereinement désolé. Plus réaliste ensuite, le Gouverneur de la BCT nuance. «En 2011, on a fait du déficit avec la récession. En 2012, on a fait des déficits avec de la croissance». Une croissance, cependant, très peu créatrice d’emploi. Ce à quoi Chedli Ayari répond que «le lien entre croissance et emploi n’a jamais été démontré». Pour le professeur d’économie qu’il était, «l’arithmétique qui fait qu’un point de croissance vaut tant d’emplois, est fausse», martelait-il devant nous. Il explique cela par le changement des facteurs de création de l’emploi qui fait, maintenant, qu’il n’y a pas en Tunisie, y compris dans l’industrie, de secteur qui puisse créer massivement de l’emploi.

Manifestement donc, le schéma de croissance adopté par le Gouvernement Jbali, ne crée toujours pas assez d’emplois pour résorber le chômage, surtout additionnel. Chedli Ayari le confirme, lorsqu’il nous dit que «moi, je ne suis pas optimiste sur la capacité de n’importe quel modèle de développement économique en Tunisie à résoudre définitivement le problème du chômage, quel que soit le modèle. Quand bien même créerait-on 100 mille nouveaux emplois, le stock de chômeurs ne bougera pas», dit-il, manifestement consterné par cette vérité.

A cette problématique de l’emploi et du chômage, qui est au cœur de toutes les revendications de la Tunisie de l’après Ben Ali, le Gouverneur de la BCT ne semble pas voir de solution immédiate et considère tout ce qui se fait actuellement comme du replâtrage. «Incontestablement, la solution ne peut pas être dans les frontières tunisiennes, car nous avons raté beaucoup de chantiers d’ajustement», dit-il avant d’asséner que «il faut désormais considérer la Tunisie comme un pays d’émigration, il faut se mettre cela dans la tête». Et à notre demande de comment le faire, il répond qu’il ne le sait pas et qu’il nous faut réfléchir à cela !

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