AccueilLa UNETunisie : Le gouvernement cachotier et le ministre naïf !

Tunisie : Le gouvernement cachotier et le ministre naïf !

En novembre dernier devant quatre Gouverneurs, le ministre de la Fonction publique, Abid Briki, parlait du redéploiement de 200 mille fonctionnaires, dans le but d’alléger la pression sur l’administration et d’améliorer le rendement des services administratifs et fournir des prestations de qualité aux citoyens. A la même époque, les discussions entre un gouvernement déjà engagé avec l’UGTT sur l’augmentation salariale et le FMI, qui liait son crédit de plus d’un milliard DT à la limitation du volume des salaires de la fonction publique à 13,6 Milliards DT, se passaient bien.

Le gouvernement Chahed avait alors «calmé» les responsables du FMI en leur indiquant qu’il ne va verser aux fonctionnaires que la moitié de l’augmentation de 2017. Il aurait oublié de lui préciser qu’en 2018, le budget de l’Etat devra verser la moitié restante de 2017 et toute l’augmentation due pour 2018. Et le FMI d’envoyer un mail au conseiller de Youssef Chahed chargé des relations avec le FMI, lui demandant de lui transmettre les prévisions salariales pour 2018 et les moyens de les financer, tout en restant dans les limites de 13,6 milliards DT pour la masse salariale.

Il y a quelques jours, et le lien entre les deux évènements est évident selon nos sources, Abid Briki changeait alors son fusil d’épaule et parle désormais de supprimer plus de 50 mille postes dans l’administration grâce à des plans de départ volontaire, le but étant de réduire la dépense publique. «L’objectif que nous nous sommes fixé est de voir plus de 50 000 fonctionnaires choisir de quitter leur poste volontairement pour réduire la masse salariale », disait-il à Reuters. Un projet qui sonne comme un «Plan B» que sortirait le gouvernement Chahed de sa poche, pour rester en capacité d’honorer ses engagement, tant avec le FMI qu’avec l’UGTT.

Selon Briki, le gouvernement serait ainsi disposé à verser aux fonctionnaires volontaires pour le départ 2 ans de salaire et l’accès facilité aux crédits bancaires pour lancer leurs propres projets. Le ministre qui se rend, enfin, compte que «avec 650 mille employés, le poids du secteur public est une véritable menace pour le budget de l’État», n’a manifestement pas révisé l’histoire et n’a pas essayé d’en parler avec ceux qui avaient, il y a plusieurs années, lancé un pareil projet. Il fut en effet un temps, lorsque Taoufik Baccar était encore à la tête de l’agence de l’emploi, la Tunisie de Ben Ali annonçait le projet de «vacances création d’emploi». L’idée était d’offrir un congé d’une année, tous frais payés, à tous ceux qui en useraient pour créer leurs propres projets. Ni le projet, ni les projets ne verront le jour !

De plus, le ministre de la Fonction publique et de la bonne gouvernance ne semble pas bien connaître ses concitoyens. Il vit, sans s’en rendre manifestement compte, dans un pays où le rêve de tout un chômeur est d’être fonctionnaire. Ce poste est en effet une véritable situation de rente viagère. Une sorte d’assurance vie, avec plein de jours de congé, l’assurance maladie et une retraite plus ou moins confortable. Il fut même un temps où un fonctionnaire avait plus de chances de trouver femme qu’un travailleur dans le secteur privé. Si on ajoute que presque tous les 680 mille fonctionnaires ont un «second bureau», un petit job parallèle, une petite affaire ou une seconde source de revenu, sorte de complément de retraite. On se demande ainsi comment le ministre Abid Briki peut-il avoir la naïveté de croire qu’un tel rentier pourrait imaginer de quitter la fonction publique pour une aventure entrepreneuriale au futur incertain ?

L’un des problèmes du secteur du phosphate est en effet ce désir de presque tous les habitants du bassin minier d’intégrer une compagnie (la CGT) publique, déjà surchargée d’employés de tous genres. C’est aussi la demande des employés des chantiers, comme ce fut le cas à Kerkennah. Etre fonctionnaire est aussi la demande des protestataires parmi les «Fichés par la police».
Le ministre oublie aussi, alors qu’il annonce vouloir décharger 50 mille fonctionnaires, que d’autres entreprises publiques continuent de recruter. La Steg, par exemple, annonce son intention de recruter 538 nouveaux employés, Tunisie Télécom cherche à recruter 160 autres, le 30 décembre dernier, le ministère de la Culture avait clôturé un concours pour le recrutement de 181 personnes, la société de transport du Sahel, déjà hautement déficitaire, le recrutement de 276 personnes, le ministère des Finances 6 cadres, l’Office de l’huile, lui aussi déficitaire et endetté, 12 agents, le RFR 20 personnes, la SNCFT 379 personnes, l’ATTT 130 personnes. En janvier 2017, le ministère des Finances revendiquait 20 analystes, le ministère de la Défense est aussi demanderesse de sous-officiers terre et mer, le ministère des Affaires sociales 51 agents, etc… Le recrutement ne s’arrête toujours pas, car c’est le seul moyen pour le gouvernement de donner l’image d’un gouvernement qui combat le chômage.

On se demande alors comment le ministre Briki voudrait diminuer la masse salariale publique, alors qu’il recrute encore ? Comment voudrait-il donner l’illusion d’une volonté d’alléger une fonction publique qu’il continue pourtant de remplir ? Gouvernement et ministre ne seraient-ils pas simplement des vendeurs de rêves et exportateurs d’illusions ?

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