Tunis : Les députés s’augmentent en «self-service» de 1.600 DT par mois

On dit souvent, que les peuples ont la mémoire courte. Il y a quelques années, lorsque la Troïka était au pouvoir, le premier des députés qui a parlé d’augmentation de l’indemnité parlementaire, a été vite vilipendé. Presse et société civile tunisiennes avait alors aussi crié au scandale. Et pourtant cela ne s’arrête pas. De nouveau, les députés demandent des augmentations salariales. Faisant eux-mêmes office d’autorité, les députés tunisiens n’ont pas besoin de l’UGTT ou d’un syndicat.

Selon le projet de budget de l’ARP (Assemblée des Représentants du Peuple), le total des dépenses (gestion et investissement) sera de 32,9 MDT pour l’exercice 2016, contre 22,783 MDT pour l’exercice 2015. Nos honorables députés ont donc décidé d’augmenter leur budget de plus de 10,1 MDT d’un coup, représentant une hausse de 44,4 % des dépenses des représentants du peuple en une seule année.

Comme c’est le cas pour tout le pays, la part majeure de ce budget sera consacrée aux salaires. Ces derniers (26,072 MDT) représenteront plus de 80 % des dépenses de l’ARP. Sur ces 26 MDT, un peu plus de 14 MDT iront directement dans les poches des chers Députés, pourtant en grande majorité, des hommes d’affaires, des avocats et des professionnels de la politique, déjà rémunérés par leurs propres partis.

Le plus intéressant dans ce budget, c’est d’abord cette ligne des «primes des autorités publiques», qui représente en fait le total des indemnités parlementaires servies aux Députés, en contrepartie de leurs efforts pour représenter le peuple. Cette indemnité a presque doublé, ou augmenté de plus de  44%. Le total de ces primes, passera ainsi, rien que pour les députés et sans compter les salaires des cabinets, de 10 MDT à 14,375 MDT. Cela veut dire que Messieurs les Députés, pourtant témoins directs de l’état délabré des finances publiques, témoins tout aussi directs de l’état de la dette de ce même Etat, se sont octroyés en «self-service», une augmentation annuelle brut de 4,375 MDT. Répartie entre les 217 membres de l’honorable chambre, chacun d’eux s’auto-votera une augmentation de plus de 20 mille DT par an. Au titre des 12 mois de l’année, les honorables représentants du peuple recevront chacun une augmentation mensuelle de plus de 1.600 DT par rapport à ce qu’ils recevaient l’année dernière. Cette augmentation représentera, à elle seule, 5 fois le Smig qui est le salaire minimum garanti (320 DT). La rémunération mensuelle de chaque député dépassera désormais en brut les 5500 DT.

Tous ces députés vivent pourtant dans un pays où 15,5 % de la population vit en dessous du seuil de la pauvreté, où plus de 15 % de cette même population sont chômeurs. Un pays où la dette avale à elle seule déjà plus de 53 % du PIB. Mais tout cela n’intéresse plus personne, depuis que la Troïka est partie. Et d’ailleurs, pourquoi leur en vouloir, alors que les salaires bouffent déjà 13,8 % du PIB. Tout le monde puise dans les caisses de l’Etat. Pourquoi pas les Députés, c’est après tout des Tunisiens. Certes un peu plus riches que ceux qui les ont élus, mais toujours des Tunisiens. Et après tout, au moins ils n’ont pas besoin d’une UGTT qui, pour l’heure, a d’autres chats à fouetter. Ils se servent tout seuls !