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Tunisie : Chahed et la braderie des banques publiques. Il y a anguille sous roche !

Dimanche soir chez «Al Hiwar», le chef du gouvernement tunisien évoquait, pour la seconde fois de en 6 mois, sa stratégie pour le secteur bancaire. Des déclarations qui faisaient suite à un CMR qui avait été consacré au plan de restructuration des 3 principales banques publiques. Les deux fois, Youssef Chahed paraissait remonté contre les banques publiques, les accusant chaque fois de ne servir à rien en matière d’appui financier aux efforts d’investissement de l’Etat.
On se demanderait presque, à le voir en parler en véritable amoureux éconduit, s’il n’aurait pas essuyé, lui, personnellement ou en tant que chef du gouvernement, ou l’un de ses proches ou amis, un quelconque refus d’une des trois banques !

⦁ Un chef de gouvernement, très remonté contre les banques
«Aujourd’hui, l’économie tunisienne est asphyxiée. L’investisseur tunisien est incapable de financer son projet à cause des grandes difficultés à cause des taux exorbitants, s’il y arrive», dit le chef du gouvernement, avec une gestuelle communicative qui transpire la colère contre le secteur bancaire tunisien et en prenant en exemple le secteur agricole, où justement la BNA a la main haute. «Aujourd’hui, nous avons trois banques publiques. La Tunisie a-t-elle réellement besoin de 3 banques publiques ? Pourquoi faire ?», demande-t-il avec une mimique, presque de dégoût.
Et de répondre à lui-même que «elles sont le bras financier de l’Etat. Financent-elles les projets difficiles, les agriculteurs [Ndlr : Encore la BNA]. Non. Elles ont des difficultés. Elles ne financent pas les secteurs délaissés par les autres banques, comme l’agriculture [Ndlr : Et encore la BNA], l’artisanat ou dans les zones intérieures du pays où elles sont absentes, alors que c’est cela le rôle des banques publiques», dit-il toujours aussi remonté.

«En 2015, nous avions injecté 700 MDT dans la STB [Ndlr : Il fait alors un recul du corps en répétant le montant, comme pour souligner gestuellement l’énormité de l’effort financier]. Où va-t-on ainsi ? Je puis vous assurer que si on ne fait rien, dans deux ans nous injecterons 500 autres millions DT. Il faut que cela s’arrête, ce n’est pas raisonnable », dit-il encore, en nommant cette fois-ci la BNA. La colère, ou du moins le mécontentement, du chef du gouvernement contre les banques publiques est ainsi perceptible, et plus encore quand il a cité ou pointé du doigt le secteur agricole, pour taper sur la BNA ! Est-t-elle pour autant compréhensible ? Son annonce, à peine déguisée et par la suite expliquée par ses adjoints, de céder les participations de l’Etat est-elle faisable et bancable ?
Il serait aisé d’accuser le chef du gouvernement de céder aux pressions du FMI et de vendre les «bijoux» financiers de l’Etat, pour combler son déficit budgétaire et palier un possible refus de ses bailleurs de fonds d’injecter encore plus d’argent dans une économie saignée par la masse salariale et accablée par sa peu de production. Sa décision de vendre n’en demeure pas moins incompréhensible !
Ce qui est sûr et certain, c’est que ni le FMI, qui n’a rien donné à ce propos, ni la Banque Mondiale, qui n’a financé que l’expertise et l’Audit, n’ont demandé, ni verbalement, ni par écrit, le démantèlement, la sortie de l’Etat et la vente de ses participations dans le secteur bancaire. Il y aurait donc anguille sous roche ?

⦁ Combien possède l’Etat dans les 3 banques et que peut-il vendre ?
Commençons d’abord par signaler que l’Etat ne possède, de manière directe à la BH (Banque de l’Habitat), que 33,37 %. Indirectement c’est l’Etap qui possède 16,57 % dans un capital total de 170 MDT. A la BNA, l’Etat ne détient que 23,49 % directement, la CNSS 7,6 %, l’Office des céréales 6,1 % et l’Office du commerce 5,18 %, dans un capital total de 160 MDT. C’est à la STB que l’Etat tunisien est actionnaire majoritaire à 71,54 %, à côté des 5,69 % de la CNSS (Caisse nationale de sécurité sociale), dans un capital total de 155,375 MDT.
A l’exception de la STB, et à moins de pousser toutes ses entreprises publiques, ses offices et ses caisses à sortir du capital des banques publiques, l’Etat ne pourra vendre que des participations minoritaires et en tout cas en-deçà des minorités de blocage. A moins de vendre ces participations au rabais et de brader des institutions financières de l’Etat, peu d’investisseurs se présenteraient pour acheter des banques qu’ils ne contrôleraient pas !

Pour des actionnaires comme l’Office des céréales, il sera difficile de vendre, avant que cet office, déjà fortement endetté, ne rembourse ses dettes. Il faudra par la suite trouver, et pour l’office et pour l’Etat lui-même, un autre bailleur de fonds pour les achats, incontournables et par avances de grosses sommes en devises, du blé pour faire du pain à la population. La même logique vaut pour l’Office du commerce. Chahed ne serait-il pas ainsi en train de mettre en péril le pain des Tunisiens ?

⦁ Qui sont ces banques, accusées de ne pas financer l’économie ?
Et si le gouvernement poussait en effet le reste des actionnaires publics à vendre, quel pourrait-être l’effet de cette sortie massive, d’abord sur la place financière et sur l’actionnariat local, qui pourrait perdre sa confiance et amorcer, lui aussi, un retrait massif de ses dépôts et de son épargne dans ces banques ? Tout cela a-t-il été pris en compte, avant d’annoncer une telle décision. Manifestement, le chef du gouvernement tunisien et ses conseillers ne faisaient pas partie des élèves en communication de l’ambassade britannique en Tunisie !

On ne sait pas si Chahed et son équipe se sont posé ces questions et se sont demandé qui a financé l’agriculture du pays depuis des décennies et quelle est la banque qui est obligée chaque année, sous la pression des petits agriculteurs mauvais payeurs, de leur faire des avances sur les campagnes agricoles, de leur rééchelonner leurs dettes impayées et même parfois de les effacer.
Se sont-ils aussi demandé qui est la banque qui a, pratiquement, créé un secteur de toutes pièces comme le tourisme et qui en supporte jusqu’à maintenant les lourds impayés dans le mutisme et l’indifférence totale des autorités de tous genres et du GUN depuis 6 mois ? Savaient-ils enfin qui a financé l’expansion urbanistique que connait la Tunisie, à partir de la CNEL (Caisse Nationale d’Epargne Logement) et jusqu’à la BH ? Ont-ils lu le dernier communiqué de la SNCFT pour voir qui en finance les achats de locomotives marchandises et de transport de passagers ? Savent-ils combien l’Etat lui-même doit à ces banques publiques et qui financent depuis la révolution ses propres bons de trésor pour ne pas que sa dette extérieure dépasse tous les ratios mondiaux de bonne gouvernance ?

⦁ Comment compte-t-il rembourser le 1 Milliard DT d’argent public ?
Il n’est un secret pour personne qu’il y a quelques mois, le même Etat tunisien qui demande désormais son solde de tous compte des trois banques publiques y avait injecté plus d’un Milliard DT. Cette injection d’argent frais s’était faite après accord des députés représentants du peuple. Pourra-t-il vendre sans revenir à l’ARP ? C’est peu probable. Ces derniers lui demanderont certainement alors comment compte-t-il rembourser l’Etat et partant, rembourser le contribuable. De plus, le Milliard de Dinars sur les fonds propres de l’Etat et de son budget a été injecté dans les banques publiques, sur l’unique base d’un plan de recapitalisation et de restructuration des 3 banques publiques. Un plan qui devait durer au moins deux années. Que se serait-il donc passé pour que Chahed et ses conseillers décident de tout vendre avant terme et sans attendre l’issue du plan de restructuration et sans attendre le retour sur investissement pour donner de la valeur à ce qui pourrait être un jour vendu ? Ne serait-ce pas de la mauvaise gestion caractérisée que de brader ainsi l’argent du contribuable ?

⦁ Pourquoi Chahed et ses conseillers ne regardent pas ailleurs ?
On va enfin supposer que le GUN n’a plus d’autres options que de vendre, tout et maintenant, car il manque d’argent. Force est pourtant de constater qu’il ne dispose pas que de ces participations à vendre, il y en a d’autres, comme celles de la Stusid Bank, de la BTEI, de la BTL, de la banque Zitouna, la BTK et autres. Des participations normalement plus faciles à vendre.
Il y a aussi beaucoup d’argent à récupérer chez certaines autres banques étrangères, soit toujours soumises au minimum d’impôt alors qu’elles ont été vendues aux étrangers, soit à travers une révision de la loi sur les conventions qui permettent à d’autres banques, comme Attijari et autres, de sortir chaque année des dizaines de millions de dinars en devises et à l’étranger. Pourquoi ne pas aller voir ailleurs avant de commettre l’irréparable ?

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