AccueilLa UNEAhmed Néjib Chebbi :L'incompris

Ahmed Néjib Chebbi :L’incompris

Ahmed Néjib Chebbi revient sur le devant de la scène, ces derniers temps, par le biais de deux évènements : le dialogue de Sidi Dhrif et sa position nuancée sur la nouvelle mouture de la constitution. D’abord, on lui prête l’intention de se rapprocher d’Ennahdha en proposant le dialogue national entre partis à Sidi Dhrif pour torpiller le dialogue national initié par l’UGTT ; ensuite on lui reproche de se démarquer des positions de l’opposition sur la quatrième mouture de la constitution qu’il juge acceptable et garantissant les libertés fondamentales, et somme toute, perfectible au fil de la prochaine évolution du débat y afférent.

Les attaques contre Ahmed Néjib Chebbi ont été relancées, de plus belle, et ses détracteurs décèlent dans sa démarche son souci d’être le candidat de forces politiques influentes dans les prochaines présidentielles .

Il faut reconnaître que ce n’est pas la première fois que le leader d’Al-joumhouri est attaqué depuis la révolution.

Avant le 14 janvier 2011 déjà , on lui reprochait d’avoir rabaissé la barre des exigences des masses révolutionnaires en s’en tenant à revendiquer en pleine euphorie révolutionnaire le départ de deux ministres de l’équipe Ben Ali ceux de la Communication et de l’Intérieur .

Après la fuite de Ben Ali, on lui tient rigueur de se contenter de replâtrer l’équipe gouvernementale sortante sous l’égide de Ghannouchi , ensuite de son opposition à la logique des sit-ins d’Al-Kasbah 1et 2 qui a conduit à l’option de la constituante .

Ces positions lui valaient d’être attaqué par l’UGTT, et une frange de la gauche radicale a mené sa campagne électorale en s’attaquant aux listes PDP.

Imperturbable, Ahmed Néjib Chebbi a maintenu le cap pendant la pré-campagne et au fil de la campagne proprement dite, en défendant les acquis de la modernité, les réalisations de la Tunisie indépendante en matière de développement, l’intégration sans accroc de l’économie nationale dans le système économique mondial. Il n’a pas ménagé ses critiques aux carences du modèle de développement national et aux déséquilibres régionaux qu’il a générés .

Ahmed Néjib Chebbi n’est pas né de la dernière pluie. Il a été au centre des vicissitudes de la politique nationale depuis 5 décennies.

Il est vrai qu’il changé de convictions politiques à plusieurs reprises : du panarabisme au baathisme au marxisme –léninisme version maoïste ,aux idées de gauche panarabe ,pour s’accommoder en fin de compte d’un libéralisme démocratique en matière politique et d’un pragmatisme de bon aloi en matière de développement .

Politiquement, au moment où la gauche était la seule à s’opposer au gouvernement de Bourguiba , dans les années 1960 – 1970 ,il a rejoint sans état d’âme le camp de l’extrême -gauche , mais depuis l’émergence de la donne islamiste , il a commencé par rompre avec le léninisme , et puis définitivement avec le crédo marxiste , pour jeter plusieurs ponts avec cette nouvelle mouvance politique .

Il a défendu, en tant qu’ avocat , les islamistes comme victimes de la répression pendant les années 1980 , mais, à partir des années 1990 , il opère un revirement, pour donner à l’issue des assises du congrès nationaliste-islamiste tenu, en 1991, à Khartoum , un contenu plus politique à son alliance, alors de fraîche date, avec les islamistes .Bien qu’il ait toujours affirmé que le véritable tournant , en la matière , a été négocié au milieu des années 2000 , beaucoup d’observateurs pensent que les ponts entre Néjib et Ghannouchi étaient déjà établis .

Son engagement politique a toujours suscité des interrogations ,du Baath,au Marxisme –Léninisme maoïste , au libéralisme , le chemin parcouru est très long .Mais les observateurs ont décelé dans cette évolution un ratage continu :il quitte le Baath au moment où Saddam fort de son aura , ses grands moyens financiers et ses combats qui ont donné à beaucoup de nationalistes arabes l’impression qu’ils ont affaire à un nouveau Salaheddine . Il rejoint tout droit un groupuscule d’extrême gauche « Perspectives –Al-Amel Tounsi » qui, il est vrai, a acquis, ces temps, beaucoup de notoriété , et dont il a côtoyé les chefs en prison dans les années 1968-1970 . Il donne une chiquenaude à ce groupe politique aux idées sclérosées, et lui inocule le panarabisme et l’adoption de la langue arabe ; mais il ne parvient pas à y imposer son leadership. Les observateurs qui l’ont connu, lors de cette période relèvent que sa stature devient plus importante que la camisole de «Perspectives –Al-Amel Tounsi » , et ses vues deviennent plus larges que le Maoïsme moribond .

D’où cette quête, par souci d’efficacité, d’un déploiement plus large. Son rapprochement avec Ben Ali, qui s’est inscrit dans un élan national collectif, était vite oublié par la rupture brutale voulue et peut-être cherchée par Néjib lui-même. Lucidité ou témérité ?

Son leadership au sein de l’opposition à Ben Ali a été mené de main de maître: le RSP ,puis le PDP , le journal Al-Mawqef , et le collectif du 18 octobre 2005 ,ont rassemblé tout le monde ,mais lorsqu’il a misé sur le replâtrage du système Ben Ali , il devient la cible de tout le monde ,comme on l’a vu .

Tous ces développements politiques étaient-ils motivés par de la lucidité ou de la témérité ? Est-ce par conviction ou par opportunisme. Là, les avis divergent. Mais il faut reconnaître que Néjib a été l’un des rares politiciens à avoir dit ce qu’il pense quitte à embarrasser ses amis et dérouter ses adversaires .

Seulement est-ce que cette dernière manœuvre, qui le rapproche d’Ennahdha, va porter, et est-ce que son parti va y adhérer jusqu’au bout, en évitant les divisions ?

Aboussaoud Hmidi

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