AccueilLa UNEEst-ce la fin des errements et pérégrinations du Code des eaux ? 

Est-ce la fin des errements et pérégrinations du Code des eaux ? 

De nouveau et pour la énième fois, le  projet de Code des eaux va été soumis pour adoption en Conseil des ministres. Ce faisant, il  permettra de lutter contre le forage anarchique des puits et d’organiser le travail des groupements hydrauliques.

La mise en place de ce nouveau code des eaux incombe au ministère de l’Agriculture, des Ressources Hydrauliques et de la Pêche, dès lors  qu’il a vocation à assurer la  gestion de l’eau.  Ainsi, le Centre National des Etudes Agricoles rattaché  qui lui est rattaché a débuté en 2009 une étude sur le sujet qui a abouti à la mise en place de la première version du nouveau code des eaux. Cette version a dû être remaniée pour prendre en considération la constitutionnalisation du droit à l’eau prévu par l’Article 44 de la constitution de 2015. Après plusieurs échanges au niveau central et régional du mnistère de l’Agriculture et suite à la décision de mettre en place une commission spéciale dédiée à la concrétisation du nouveau code des eaux et la coordination avec les autres commissions agricoles concernées, une version publique a été déposée en 2015 sur le portail national de l’information juridique pour consultation. En 2016, une version actualisée a été présentée en conseil ministériel restreint. La prise en considération des ajustements proposés par les ministères et les institutions concernées, ainsi que ceux d’experts et de membres de la société civile choisis, ont abouti en 2017 à une nouvelle version du code accompagnée de dispositions législatives et rectifiée par le conseil juridique du Premier Ministre. Par la suite, un long débat concernant la version de 2017 a eu lieu entre l’UGTT et le Ministère de l’Agriculture. En effet, les deux parties n’ont pas trouvé de compromis sur cette version. L’UGTT s’est opposé à un certain nombre d’articles qu’elle considère comme nuisibles au bien public et ouvrant la porte à la privatisation du secteur de l’eau. De plus, l’UGTT refusait d’ « enterrer » le code des eaux de 1975 et proposait d’amender ses lacunes, ce qui a été refusé par la commission spéciale de la présidence du gouvernement qui a estimé que le plus approprié était de suivre la vision stratégique du Ministère de l’Agriculture en tant que ministère en charge de ce secteur. Finalement, ce n’est qu’en mai 2019 que ces deux acteurs ont déclaré avoir trouvé un compromis satisfaisant. Un autre conflit a été celui avec l’union tunisienne de l’agriculture et de la pêche (UTAP) qui a exprimé dans un communiqué en juin son mécontentement quant à la formulation du nouveau code des eaux, sa non-implication dans les processus de décision ainsi que le manque de considération pour ses propositions. Il a cependant finalement signé un accord avec le ministère de l’agriculture concernant le code des eaux le 10 juillet 201932. La version « définitive » sera donc déposée pour approbation au niveau du conseil ministériel, 10 ans après le début du projet.

Un droit aux perceptions erratiques

Le nombre important de versions et de modifications qui ont eu lieu depuis 2009 prouve l’importance de l’eau et les tensions que sa gestion peut susciter. Néanmoins, malgré la multiplicité des versions de ce code, des éléments essentiels ont surgi dans le débat général autour de ce nouveau code des eaux. En effet, si ce nouveau code des eaux a qualifié l’eau de «  patrimoine  », en lien direct avec les impératifs de développement durable et la notion de bien commun en harmonie avec la Constitution de 2014 et son Article 44, le nouveau code ne concrétise pas ce droit et ne veille pas, par des mécanismes clairs, à son application. De plus, si ce nouveau code des eaux intègre les changements climatiques, il ne donne pas d’importance aux cas extrêmes, alors que les inondations survenues fin 2018 à Nabeul et la gestion chaotique de cette catastrophe naturelle sont encore dans les mémoires.

D’autres points ont été critiqués par la société civile, mais deux points ont fait beaucoup couler d’encre : les articles du code en lien avec les PPP dans le service de l’eau et l’intégration de la notion de l’eau virtuelle.

En tout cas, il est plus qu’urgent que la procrastination qui entache  le  cheminement de ce code prenne fin, le pays étant en proie à des tourments hydrauliques  exceptionnels et chargés de périls. On savait déjà que son  potentiel hydrique de la Tunisie est modeste et dépendant en grande partie d’un climat capricieux. Il est peu extensible et largement utilisé. Selon l’Observatoire tunisien de l’économie (OTE), la  Tunisie est en train d’atteindre  le taux de mobilisation intégrale de ses ressources conventionnelles. Elle est déjà dans une situation de stress hydrique, proche même de la situation de pénurie. La pression humaine est très forte sur ces ressources. La collectivité supporte aujourd’hui les frais élevés de la collecte d’une ressource qui reste malheureusement insuffisamment valorisée.

Face à cette situation, la stratégie nationale de l’eau repose désormais sur l’économie des ressources conventionnelles et la mobilisation des ressources non conventionnelles. Les ressources les plus faciles à mobiliser et les moins coûteuses ont donc été utilisées. Les extensions futures nécessiteront des investissements plus importants, des études plus complexes et une technologie plus avancée. Aussi la Tunisie devra-t-elle orienter son action vers la maîtrise de la demande en eau, en particulier dans le domaine agricole, et l’amélioration des techniques de mobilisation de l’eau, pour assurer la disponibilité d’une eau de qualité satisfaisante au niveau national, et par la suite, la sécurité économique, sociale et politique du pays.

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