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Fitch dégrade la note souveraine de la Tunisie à ‘CCC’.  En voici les raisons

L’agence de notation Fitch Ratings a annoncé, ce vendredi, qu’elle a abaissé la note de défaut émetteur (IDR) à long terme en devises étrangères de la Tunisie de ‘B-‘ à ‘CCC’.  Elle n’a pas attribué comme c’est généralement la règle,  de perspectives de quelque nature que ce soit, ni a appliqué  de modificateurs aux souverains dont la note est égale ou inférieure à ‘CCC’.

Dans l’attribution  de sa notation, Fitch souligne s’être basée sur un certain nombre de facteurs  en tête desquels le risque de liquidité accru. A cet égard, l’agence explique que la dégradation de la note à ‘CCC’ reflète des risques de liquidité budgétaire et externe accrus dans le contexte de nouveaux retards dans l’accord sur un nouveau programme avec le FMI après les décisions politiques du 25  juillet 2021, « ce qui est nécessaire pour accéder à la plupart des créanciers officiels de soutien budgétaire ». L’opposition sociale bien ancrée et les frictions permanentes avec les syndicats limitent la capacité du gouvernement à adopter des mesures énergiques d’assainissement budgétaire, ce qui complique les efforts visant à garantir le programme du FMI, souligne encore Fitch.

Au sujet de l’éventualité de passage par le Club de Paris, l’agence de rating indique qu’ « avec la flambée des prix des produits de base, la lenteur de la mise en œuvre des réformes pourrait conduire à une situation où une restructuration de la dette serait nécessaire pour assurer la viabilité de la dette, même dans le cadre d’un programme du FMI ». Cependant, rappelle-t-elle, le gouvernement a fermement déclaré qu’il n’envisageait pas de restructuration de la dette et la Tunisie ne s’est jamais engagée dans un traitement du Club de Paris.

Déficits budgétaires importants

Fitch  prévoit , dans ses attendus, que le déficit budgétaire  restera élevé, à 8,5 % du PIB en 2022, contre 7,8 % en 2021 et la médiane de la catégorie  » B  » de 4,6 %,, mais que  les recettes se redresseront en 2022 avec l’expansion de l’économie et l’expiration des mesures d’exonération fiscale. Toutefois, cela  sera largement compensé par la hausse des subventions aux prix du carburant, du gaz domestique et des céréales, ainsi que par une charge d’intérêts croissante. Les salaires et les intérêts absorberont près de 70 % des recettes et continueront de limiter considérablement la flexibilité budgétaire malgré un gel des recrutements.

Fitch prend soin de noter qu’elle s’attend à ce que le déficit se réduise à 6,9 % du PIB en 2023, en grande partie  suite à la baisse des dépenses liées aux subventions énergétiques et alimentaires à mesure que les prix internationaux se modèrent. Le ratio dette/PIB atteindra 84,0 % en 2022 et 84,7 % en 2023.

 Les besoins de financement du gouvernement sont élevés en raison du déficit important et des échéances de la dette qui s’élèveront à 9,2 % du PIB en 2022 et 8,9 % en 2023, dont 3,1 % du PIB et 4,2 %, respectivement, d’amortissement externe, indique l’agence de rating, jugeant « essentiel » que la Tunisie et le FMI conviennent d’un accord succédant au programme qui a expiré en 2020, eu égard à ses répercussions sur  le financement extérieur, car la Tunisie a perdu l’accès aux marchés internationaux. Bien que l’engagement des créanciers officiels extérieurs à aider la transition démocratique de la Tunisie et à contenir les flux migratoires à travers la Méditerranée reste fort, le soutien financier de nombreux partenaires est lié à un accord avec le FMI, note Fitch .

En tout cas , le  budget 2022 suppose qu’un programme du FMI sera en place au milieu de l’année et que la Tunisie recevra environ 4 milliards de dollars de financement extérieur, provenant d’un prêt de 700 millions de dollars non conditionné à un accord avec le FMI, de créanciers officiels, d’une émission d’obligations garanties par les États-Unis, couvrant les deux tiers des besoins de financement. « Notre scénario de base suppose un accord sur un programme du FMI  au second semestre 2022, les décaissements étant conditionnés à l’adoption de certaines réformes » , précise Fitch, ajoutant  que cela entraînerait probablement des retards supplémentaires dans les décaissements des fonds créanciers officiels par rapport au calendrier budgétaire et il existe également des risques d’exécution. Il est attendu que la Tunisie continue de compenser la faiblesse de son financement extérieur net en empruntant massivement auprès de sources intérieures.

Risques pour le programme du FMI

Malgré les progrès réalisés pour combler les différences entre les positions du gouvernement et du syndicat sur le programme de réformes,  souligne Fitch, il existe toujours une forte opposition sociale aux réformes fiscales et des événements politiques à venir éventuellement litigieux, tels que le référendum constitutionnel prévu (juillet 2022) et les élections législatives (décembre 2022). Cela signifie qu’un accord pourrait ne pas être conclu et que le gouvernement pourrait avoir du mal à mettre en œuvre les réformes convenues requises pour les décaissements prévus du FMI. La qualité de l’exécution dont a fait montre  la Tunisie dans le cadre des deux précédents accords avec le FMI a été faible, avec des revues  au cours du dernier programme qui ont été constamment  entachées  de longs retards et d’une résiliation anticipée pour manque de conformité.

La restructuration de la dette n’est pas exclue

En 2021, le FMI a jugé que la dette de la Tunisie « deviendrait insoutenable à moins qu’un programme de réforme solide et crédible ne soit adopté avec un large soutien ». Dans un scénario de non-réforme, la Tunisie pourrait finalement être considérée comme nécessitant un traitement du Club de Paris avant d’être éligible à un financement supplémentaire du FMI, avec des implications pour les créanciers du secteur privé, souligne Fitch .

Une inflation de 8% en 2022

La dépendance croissante de la Tunisie vis-à-vis  des financements domestiques  et des prix mondiaux élevés des produits de base ont entraîné une hausse de l’inflation, dont il est prévu une moyenne d’environ 8 % en 2022, une partie de la hausse des prix étant absorbée par les subventions publiques. Dans le même temps, Fitch dit s’attendre  à une pression sur les réserves extérieures avec des coûts d’importation en hausse et des emprunts extérieurs limités. Toutefois, la banque centrale pourrait se montrer réticente à relever les taux d’intérêt pour maîtriser l’inflation et endiguer les sorties de capitaux extérieurs, compte tenu de la reprise économique modeste et de l’impact négatif que cela aurait sur les coûts de financement du gouvernement. « En l’absence d’un accord avec le FMI, nous nous attendons à une érosion progressive des réserves internationales (de 9,9 milliards USD à la fin de 2021) et à une dépréciation du dinar », avertit l’agence de rating.

Une reprise économique modeste

Le PIB de la Tunisie a augmenté de 3,1 % en 2021 après une contraction de 8,7 % en 2020. Cette reprise terne est sous-tendue par l’absence de reprise du secteur du tourisme, le niveau élevé d’incertitude politique et économique, qui a freiné l’investissement privé, et la faible reprise de la consommation privée. Fitch prévoit  que la croissance économique restera inférieure à 2,5 % à moyen terme, car le tourisme ne se redresse que progressivement, l’orientation budgétaire du gouvernement devient plus restrictive et le coût des intrants augmente.

S’agissant enfin du volet politique, le score de pertinence ESG  est de  » 5  » pour la stabilité et les droits politiques ainsi que pour l’État de droit, la qualité institutionnelle et réglementaire et le contrôle de la corruption, comme c’est le cas pour tous les souverains. Ces scores reflètent le poids élevé des indicateurs de gouvernance de la Banque mondiale (WBGI) dans  le modèle de notation souveraine adopté par Fitch. La Tunisie est classée au 46ème percentile de l’indice WBGI, précise Fitch,  ce qui reflète une « faible stabilité politique, un état de droit et des droits de participation au processus politique établis mais en perte de vitesse, ainsi qu’une capacité institutionnelle et un niveau de corruption perçus modérés ».

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