AccueilLa UNEIl en a marre et voudrait quitter. Le pourra-t-il ?

Il en a marre et voudrait quitter. Le pourra-t-il ?

Vendredi 31 janvier 2020, au tout début du conseil des ministres, le chef du gouvernement Youssef Chahed prenait la parole devant ce qui lui restait de ministres. Il commence par lancer une pique à l’ARP, en lui rappelant qu’il existe 70 projets de lois qui l’attendent, «ce qui pose une grosse question sur l’efficience du travail du pouvoir législatif».

Il s’adresse ensuite, compatissant, à ses ministres qu’il remercie pour avoir sur assurer la continuité de l’Etat dans des conditions devenues très difficiles et ardues. «La période [Ndlr : de gestion des affaires courantes qu’assure son gouvernement] s’allonge plus qu’il ne faut. Quatre mois après les législatives d’octobre dernier, une trop longue période. Et l’absence de visibilité, je le sais, vous oblige à travailler dans des conditions, inconfortables et ardues. Mais c’est le propre du devoir envers l’Etat».

  • «Faites vite votre gouvernement qu’on puisse partir», dirait presque Chahed

Il aurait pu s’en tenir à ce, par ailleurs justifiés, propos compatissants, envers une équipe gouvernemental, parfois obligée de se dédoubler, pour assurer le service. Mais Youssef Chahed semblait déjà en avoir beaucoup sur le cœur à propos de cette période, et voulait s’exprimer à ce propos. «Je suis désolé de le dire avec aussi clairement, mais la classe politique est inconsciente des difficultés dont je parlais. On voit tous les jours, sr les plateaux TV, des tiraillements politiques, qui confortent ce manque de conscience. Or, il y a urgence à composer, au plus vite, le gouvernement, aujourd’hui avant demain. J’entends des gens parler de nouvelles élections. Je leur dit en toute franchise, c’est un scénario catastrophique pour la Tunisie. La constitution le permet certes, mais l’Etat ne pourra pas supporterune période transitoire, plus longue que celle que nous avons vécue. Quatre à gérer les affaires courantes, c’est très difficile, et je salue votre résilience», disait Chahed avec sa mine la plus désolée, presque écœurée, et comme s’il ne demandait que de quitter La Kasbah au plus vite pour passer à autre chose.

Or, il le voit chaque jour et il en a conscience, cette perspective de départ pour aller voir ailleurs et s’occuper de son jardin, semble s’éloigner chaque jour un peu plus. Et il n’est plus exclu que son purgatoire de «chef de gouvernement de gestion des affaires courantes» qui est un statut, qui n’existe dans aucune loi, où ses prérogatives sont aussi restreintes qu’inchangées dure au-delà de l’été prochain si Fakhfakh échouait. jeudi 6 février 2020, il revenait à la charge pour dire que «On n’a pas besoin de ce scénario» des législatives anticipées.

  • «Témoin» d’une période turbulente, où il n’aura pas pu voir le fruit de son travail

Lui, il a fait ce qu’il a pu, parfois ce qu’il a voulu, et pas toujours ce qu’il aurait dû. Il n’a pas toujours su communiquer. Peut-être parce qu’il était mal entouré, et en la matière pas toujours bien conseillé. Son bilan, économiquement est honorable, et malgré tout ce qu’on peut en dire, défendable.Socialement cependant, il est fort discutable, et certainement, pour ceux qui faisaient prêches d’un Etat-providence et même pour les autres, détestable.

«Nous ne parvenons à faire des réformes, qu’en faisant semblant de faire la révolution», disait l’ancien premier ministre français Jacques Chaban-Delmas. Youssef Chahed, n’a pas essayé de faire semblant, d’autant que les réformes qu’il voulait faire, touchaient directement aux poches de ses administrés.Ces derniers voulaient, pour leur part, une révolution qui viderait les poches des autres et remplirait les leurs.

Lui c’est Jo, qui voudrait enfin faire son Go. C’est aussi «Joseph» qui a été témoin malgré lui, parfois même témoin-acteur, d’au moins deux guerres fratricides. D’abord celle de Nida dont le père n’a pas su faire une croix sur le fils, et qui se retrouve finalement chez le Saint Esprit, avec son Nida qui sombre désormais dans l’oubli. Ensuite, celle d’une famille centriste, théoriquement promue à un avenir meilleur, et dans la pratique vaincue dans toutes les élections du pays. Chef de gouvernement avec de légitimes prétentions, parfois modeste et pas prétentieux, et des fois à la tête dure et bourré d’immaturité (Il nous l’excusera).

Youssef a parfois été un bon Chahed, qui tirait de bonnes conclusions de ce dont il a été un témoin privilégié. Mais Chahed n’a pas toujours été un bon «Youzarsif» (nom donné au Prophète Youssef, dans une série iranienne sur sa vie) comme celui des pharaons qui sut bien gérer, en trop bon père de famille, le peuple qu’il a gouverné, les cours et arrières cours qui l’entouraient.

Entré jeune novice de la politique, Chahed avait pourtant vite appris à faire de la politique à la Tunisienne. Il avait vite appris à recevoir les coups, et à en donner lorsqu’il le faut. Et c’est peut-être cela qui avait déplu en lui, pour ceux qui croyaient pouvoir disposer d’un chef de gouvernement, à l’image de tout le régime politique mis en place, où tout le monde gouvernait et personne ne pouvait régner. Et c’est aussi grâce à ce rapide apprentissage, qu’il a pu, et surtout su, durer plus que tous ses prédécesseurs et engranger la plus longue longévité dans son poste (3 ans et 5 mois, contre 1 an et 5 mois pour Essid, 13 mois pour Jomaa, 11 mois pour Larayedh, et 2 ans et 3 mois pour Jbali).

  • … Et pourtant, il en aura quand même fait des choses le «témoin»

Adulé par les uns, honnipar d’autres, il aura surtout manqué de temps. Mais Youssef Chahed aura finalement fini (Dans quelques jours ou dans quelques mois), on pourrait presque dire en beauté, avec moult projets d’infrastructure réalisés, à temps et avec l’effet escompté.

Le dernier en date, est celui de Nawara qui va diminuer de 7 % le déficit commercial, et produire à lui seul un point de croissance.Des résultats aussi, quoiqu’on puisse en dire, en matière de baisse du déficit budgétaire, de hausse des recettes de l’Etat en fiscalité, notamment due à l’effort de recouvrement des impayés, et la lutte contre la fraude fiscale en général. Des résultats d’importance structurelle, que le simple citoyen ne peut percevoir, mais dont l’impact se ressent sur la santé du Dinar tunisien par exemple.

Entretemps, on se croirait toujours être en pleine séance théâtrale de Samuel Becket, qui attendait encore Godot !

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