AccueilLa UNELa Cour introuvable ou la marmite du diable !

La Cour introuvable ou la marmite du diable !

Le président de la République, Béji Caïd Essebsi, remis du « grave malaise » à la suite duquel il a été hospitalisé, doit quitter ce lundi ou au plus tard demain matin l’hôpital militaire de Tunisie où il avait été admis jeudi dernier.

Dans l’entretemps, cet épisode a donné lieu à une débauche de commentaires, mais aussi de rumeurs dont la plus malveillante avait trait à une information qui s’est propagée, tel un feu de brousse, sur le décès du chef de l’Etat, aux côtés d’une autre, par bien des côtés, fantaisiste, sur un empoisonnement du président de la République, et enfin une troisième qui évoquait une tentative de complot pour s’emparer du pouvoir en place. Le fait est que si semblables bruits ont pu acquérir une certaine vraisemblance, c’est parce que la Constitution tunisienne adoptée en 2014, qui a, pourtant, prévu pratiquement tous les cas de vacance à la magistrature suprême du pays, n’a pas été relayée par les mécanismes qui régissent et organisent cette vacance, qu’elle soit temporaire ou définitive. Cela se nomme la Cour Constitutionnelle que les politiciens ont préféré, cinq années durant, garder sous le boisseau, sans avoir la plus petite clairvoyance de comprendre qu’en l’absence de cette haute juridiction, tout peut basculer d’un moment à l’autre.

D’autant que le pays était à quatre mois des élections législatives et présidentielles dont le décret de convocation des électeurs devrait être pris par le président de la République et publié au Journal officiel, avant le 6 juillet 2019. Sous peine de voir ces scrutins renvoyés à d’autres échéances. D’autant également que le projet de loi portant amendement de loi électorale avait été adopté et attendait, pour devenir loi de la République, d’être promulgué par le chef de l’Etat.

Un embrouillamini indescriptible

Un embrouillamini constitutionnel et politique qui n’aurait nullement lieu d’être si les partis politiques prépondérant au Parlement ne s’étaient pas dispensés de laisser traîner les choses, s’agissant de l’interminable succession des séances plénières consacrées à l’élection des membres de la Cour Constitutionnelle et qui n’ont jamais abouti, par la volonté, particulièrement, des élus du mouvement Ennahdha.

Un contretemps d’autant plus néfaste qu’en cas de vacance temporaire de la présidence de la République, la Constitution prévoit que la Cour constitutionnelle doit convoquer et charger le chef du gouvernement d’assumer les pouvoirs du Président pour une période de 60 jours. Mais si le poste devient vacant en permanence et de façon définitive, ladite Cour habilitera le président du l’Assemblée de la tâche d’assumer les pouvoirs du président de la République pendant une période de 45 à 90 jours, durant laquelle le pays organisera des élections. Mais ces dispositions posent aujourd’hui un problème majeur pour la Tunisie, en ce sens qu’aucun membre n’a jamais été élu pour siéger à la Cour constitutionnelle, qui n’existe que de nom. En conséquence, le pays se retrouve dans un bourbier que seuls ses députés en exercice peuvent résoudre, affirme la plateforme Stratfor, leader mondial du renseignement géopolitique.

Une importance indiscutable

Une crise de direction et de leadership n’entraînera pas nécessairement une rupture dans l’élaboration des politiques, explique le site, car le chef du gouvernement en Tunisie exerce un pouvoir politique et économique considérable, ce qui signifie qu’une vacance de la présidence de la République ne laissera pas le pays à la dérive. De même, il est peu probable qu’une telle crise affecte immédiatement la politique étrangère tunisienne, car le pays n’est pas, ne serait-ce que pour une raison ou pour une autre, une puissance régionale importante au départ.

Néanmoins, estime Stratfor, un problème de santé de Béji Caid Essebsi portera un coup à la stabilité politique de la Tunisie à court terme. Surtout, l’incertitude quant à son statut risque d’accentuer les divisions entre les partis politiques du pays, qui ont depuis longtemps montré une prédilection pour la fragmentation. Cette tendance affectera particulièrement les élections générales et présidentielles de cette année, d’autant plus que les forces politiques laïques continuent à se diviser en mouvements de plus en plus petits.

L’incertitude entourant le président de la République survient à un moment où l’économie tunisienne est en difficulté. Des niveaux élevés d’endettement public, ainsi qu’un chômage et un sous-emploi importants, entravent le potentiel d’une économie qui s’enorgueillit d’une des forces de travail les plus instruites de la région. Le cinquième examen par le Fonds monétaire international du mécanisme élargi de financement de la Tunisie, par exemple, a noté que le pays continuait d’éprouver des difficultés à gérer l’inflation et la dette publique.

Et puis il y a les problèmes de sécurité de la Tunisie, qui menacent l’industrie touristique vitale du pays. Le jour même où l’on a appris la détérioration de l’état de santé de Caid Essebsi, la police de Tunis a été visée par deux attentats suicides distincts, revendiqués par la suite par Daech. L’industrie touristique tunisienne a réussi à se redresser après les attaques visant directement les touristes en 2015, mais la reprise de l’activité djihadiste découragera naturellement le tourisme et les affaires, sans parler des effets tout aussi délétères qu’une crise du leadership aura sur le pays, conclut Stratfor.

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