AccueilLa UNELa désillusion pointerait-elle son nez? La presse française y croit

La désillusion pointerait-elle son nez? La presse française y croit

« C’est un provisoire qui s’éternise au point d’ajouter à un brouillard politique déjà bien épais en Tunisie », disait opportunément un article du Monde qui titrait « Impatiences en Tunisie face à l’état d’exception », il y a quatre jours. Très virulents sur les réseaux sociaux, les fans et soutiens de Kais Saïed fustigeront certainement cette opinion, pourtant de plus en plus diffuse après 57 jours d’une attente, tant du nouveau gouvernement à la Saïed, que de ses astuces constitutionnelles pour dénouer une crise qui s’étire sans une fin prévisible  au grand dam des « Pro-Saïed », qui ne comprennent pas comme lui ce besoin d’un nouveau gouvernement alors que tout marche sans lui.

  • Saïed perd des points de confiance chez 25/18 ans, et se rassure chez les 45/59 ans

Il est vrai que ni salaires, ni pensions de retraites, n’ont jusque-là manqué, et que ce qui reste du gouvernement Mechichi s’évertue toujours à trouver les moyens financiers qui évitent le Shutdown. Il est vrai aussi que 75,8 % des 45/59 ans, interrogés par Sigma conseil, estimaient que les choses vont dans le bon sens, et 77,5 % étaient dans la tranche d’âge des plus de 60 ans, toutes deux des tranches d’âge pour lesquelles le provisoire qui dure n’a pas de problème à s’accorder avec la continuité des mesures exceptionnelles (gel de l’ARP et démission du chef de gouvernement) tant que ces dernières ne touchent pas à la situation financière de la famille. Notons tout de même, et selon le même sondage d’opinion, que 41,2 % des 25/18 ans trouvaient que les choses vont dans le mauvais sens en Tunisie.

L’impatience a aussi impacté l’indice de confiance même des Tunisiens dans la personne du chef de l’Etat. En effet, selon Sigma conseil, l’indice de confiance de Kais Saïed a régressé de 10,1 points d’un mois à l’autre, et s’était stabilisé à 72 % de confiants. Même trend baissier pour Kais Saïed (-3,1) en réponse à la question sur l’avenir. Les deux taux demeurent élevés, et dépassent les 70 %. Ils n’en ont pas moins régressé, signe certainement d’une impatience d’une partie de la population, ce à quoi le chef de l’Etat devrait faire attention. Ses fans et soutiens battront certainement tout cela en brèche, et avec le langage ordurier qui convient sur les réseaux sociaux.

Et les deux journalistes du Monde, Lilia Blaise et Frédéric Bobin d’ajouter, en citant le politiste Sahbi Khalfaoui, que « Le chef de l’Etat n’a pas agi assez vite au lendemain du 25 juillet (…). Il s’est enfermé dans une forme de bulle et ne paraît pas réaliser l’urgence de la situation économique et sociale. Seule l’architecture constitutionnelle l’intéresse ».

De l’impatience et des incertitudes, qui pourront être source de danger, et pour le propre projet du chef de l’Etat contre lequel l’opposition qui était abasourdie par les décisions du 25 juillet se réveille et se réorganise, et pour une population qui se divise, si ce n’est pas ouvertement dans la rue, le fait sur les réseaux sociaux où la virulence pourrait amener à pire, estiment les observateurs.

  • La lutte anticorruption, désormais dévoyée de ses objectifs

Et Le Monde d’ajouter, en guise de tentative d’explication de ce qu’on pourrait appeler un certain désespoir que « l’invocation totémique du « peuple », une constante de la rhétorique de Kais Saïed, ne suffit plus à dissiper les craintes d’une dérive vers un pouvoir personnel (…). Kais Saïed espère apparemment contrer ces doutes en mettant en scène sa lutte anticorruption, cause populaire mais suscitant de plus en plus de controverses. »

Le même jour, l’autre non moins sérieux journal français, Le Figaro, titrait « Sus à la corruption » : le cri de ralliement du président tunisien », pour évoquer la corruption dont le chef de l’Etat tunisien fait désormais son cheval de bataille, au détriment, dirons-nous de notre côté, des vrais problèmes de la Tunisie qui sont le chômage, le mal-vivre économique, et le manque flagrant de ressources financières. Mais aussi, pourrait-on ajouter, alors que les vraies demandes des manifestants du 25 juillet 2021 n’étaient toujours pas satisfaites.

Ennahdha est en effet toujours là, et les enfants de certains de ses membres n’ont jamais été empêchés de voyager, contrairement à certains députés et beaucoup d’hommes d’affaires et de dirigeants d’entreprises. Différents dossiers judiciaires montraient clairement l’implication du parti islamiste tunisien dans des faits criminels. Mais tous restaient toujours dans les tiroirs du Parquet, pourtant placé  directement entre les mains du chef de l’Etat tunisien. « Kais Saïed, utilise la corruption comme un outil politique. Pourtant, les analystes doutent des réels effets de ses déclarations », disait Le Figaro.

« Je pense que les intentions sont là. Mais la méthode n’est pas la bonne », ajoutait le journal qui citait Khaoula Ben Mansour, maître assistante à la faculté des sciences économiques et de gestion de Tunis qui s’était montrée ainsi prudente face aux actions de Kais Saïed.

De son côté, Karim Ben Kahla, professeur à l’école supérieure de commerce de Tunis, dénonçait un dévoiement de la lutte anti-corruption, et affirmait que « l’agenda de la révolution tournait autour de trois mots-clés – la dignité, la liberté et le travail -, certaines organisations internationales ont voulu faire de la lutte contre la corruption sa finalité. C’est devenu un fonds de commerce pour régler ses comptes entre politiques et éliminer des personnes gênantes. Dans les faits, on voit beaucoup d’affaires dévoilées, beaucoup de règlements de comptes, de rumeurs, d’agitation, mais très peu d’affaires mènent à une condamnation. »

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