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La Tunisie devra-t-elle faire le deuil des avoirs des Ben Ali & Trabelsi à l’étranger ?

 Les autorités judiciaires tunisiennes viennent d’émettre deux commissions rogatoires pour bloquer les avoirs de l’ancien président tunisien et de ses proches à l’Etat des Emirats arabes unis et à l’Etat de Qatar, annonce une source autorisée au ministère de la Justice que rapporte l’agence de presse tunisienne TAP. Ces commissions rogatoires, délivrées respectivement les 3 et 12 mai par l’intermédiaire du ministère des Affaires étrangères, précise-t-on de même source, ont été remises aux autorités judiciaires des deux pays par les missions diplomatiques tunisiennes.

Quel que soit le pays, ces commissions sont cependant le premier acte légal de l’action, plus globale et de plus longue haleine, de récupération des biens, supposés mal acquis, des familles Ben Ali &Trabelsi, de l’ancien président tunisien après leur fuite. Le gel étant simplement une mesure conservatoire.
La question est, en tout cas désormais en Tunisie, d’actualité. Après le gouverneur de la BCT qui en a parlé, raisonnablement, c’était, la semaine dernière, le tour des avocats. Le seul mérite de ces derniers aura été l’apport d’experts internationaux que le bâtonnier a invités et qui ont été plus sereins que leurs hôtes.

Combien et où ? Personne ne sait !

Avant de parler de récupération, il faut d’abord déterminer le volume de ces avoirs et où ils se trouvent. Durant quelque vingt-trois années, les deux familles ont en effet utilisé tous les ressorts, économiques et politiques, pour amasser de l’argent. La partie qui en a été découverte dans le palais présidentiel n’est certainement qu’infime par rapport à ce qui se trouve à l’étranger, en Suisse, en France, dans les Emirats du Golfe  et certainement d’autres paradis fiscaux qu’il faudra identifier. Le volume de ces avoirs, personne ne semble en avoir exactement connaissance, tout comme les endroits où ils sont cachés. Le gouverneur de la Banque Centrale de Tunisie qui tenait, le 13 mai point de presse à ce sujet, n’en sait apparemment rien, bien qu’il se soit abrité derrière le mutisme à ce propos en expliquant qu’il ne faut pas donner plus d’éléments aux membres des deux familles qui pourraient leur permettre de tracer les recherches tunisiennes et s’en dérober. Jusque là, personne ne sait combien d’argent a été sorti au dehors des frontières tunisiennes et où il a pu être placé. Des chiffres fusent ça et là, évoquant des dizaines de milliards DT, mais personne ne semble connaître la vérité. Peut-on alors rechercher ce qu’on ne connaît pas ?

Récupérer les milliards de Ben Ali passe par des actes et des jugements de justice.

Parlant,  samedi dernier, au cours d’un séminaire organisé par l’Ordre des avocats tunisiens au sujet des avoirs pillés et déplacés à l’étranger, Mme Maude Vessière, déléguée générale de l’association Sherpa, l’a dit. «L’opération est extrêmement compliquée, dans la mesure où les sociétés écran et les hommes de paille sont légion et sont bien outillés juridiquement par leurs mandataires afin d’échapper aux enquêtes et aux poursuites judiciaires», a-t-elle précisé. Il serait en effet, selon plus d’une source judiciaire que nous avons questionnée, «trop candide de croire que ces gens-là sont assez idiots pour laisser des traces apparentes de leurs forfaits et qu’ils ont mis tout leur argent dans des endroits où il serait facile de les identifier, encore moins de les récupérer, alors qu’ils savent que cet argent est tout ce qui leur restera ».

Cela d’autant plus, comme l’a indirectement confirmé, samedi dernier, l’avocat Me André-Pierre-Dumont lors du séminaire tunisien à ce propos, lorsqu’il affirmait que «rien n’est prévu dans les décisions du Conseil de l’Europe en date du 4 février 2011 relatives au gel des avoirs de Ben Ali, à propos de la récupération par la Tunisie de ces avoirs, si jamais il est décidé qu’ils ont été réellement spoliés». A tout cela, s’ajoute que l’action de confiscation des bien de Ben Ali et consorts, a été faite par un décret-loi qui ne s’appuie sur aucun jugement qui prouverait la culpabilité de l’ancien président tunisien et des membres de ses familles, ni d’ailleurs l’origine non régulière de leurs fortunes. Il faudra donc, selon plus d’un expert, que des jugements dans des procès où toutes les garanties existent, soient prononcés par des juges et qui prouvent aux juges des pays auprès de qui la Tunisie fera demande de restitution, que les biens en question ont été véritablement mal acquis. Le gouverneur de la BCT l’a bien expliqué, le 13 mai, devant les journalistes, lorsqu’il a indiqué que «il faut que  les lois ou les jugements soient opposables chez les pays concernés» ou les pays où les Ben Ali et Trabelsi ont caché leurs fortunes dérobées.

Quel coût pour la Tunisie et qui paiera ?

Il semblerait, à en croire le gouverneur de la BCT, que le gouvernement, jusque-là peu au fait des procédures dans ce genre de dossiers qu’il traite pour la première fois, s’oriente vers le prononcé de jugements qui prouveraient que l’argent et les biens à récupérer auraient été acquis par des moyens détournés et illégaux. Cela demandera certainement beaucoup de temps,  et ce n’est qu’alors que débuteront les vraies procédures de récupération des biens de Ben Ali et ses familles. En attendant, il faudra identifier ces biens, les évaluer. Une commission a ainsi été constituée, outil indispensable pour toute action avec les pays où se trouveront ces avoirs, dont ceux qui ont été déjà gelés. Cette commission agira de concert avec les juges. Cette commission aura recours, selon les déclarations du gouverneur de la BCT, à des cabinets d’avocats et des spécialistes étrangers. Les coûts n’étant pas des moindres dans ce genre d’investigations, ils pourraient être supportés, nous dit le gouverneur Mustapha Kamel Nabli, par des aides étrangères.

Et même s’il reste optimiste, certes dans le flou et sans donner aucun chiffre ni sur le montant de ces biens, ni sur leur coût ni encore sur le taux de récupération expliquant cela par l’obligation de discrétion, Nabli n’est pas dupe et termine en disant que «c’est un travail de longue haleine». Sans en faire complètement le deuil, pour l’instant donc, il vaudrait mieux ne pas trop compter sur ces grandes sommes !

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