AccueilLa UNELes Tunisiens voteront-ils pour un candidat en prison ?

Les Tunisiens voteront-ils pour un candidat en prison ?

Il est connu et reconnu que le peuple, en Tunisie, a toujours adoré défier l’autorité de l’Etat et s’était toujours, même s’il comprend les motifs de ce dernier en exerçant cette autorité, et s’est mis du côté de celui qui s’en aurait ressenti. Le Tunisien avait toujours gardé rancune contre Bourguiba pour le cas Ben Youssef, même si beaucoup n’ignoraient pas que le second avait projeté d’assassiner le 1er. Le Tunisien en a fait autant contre Ben Ali pour le cas des islamistes, même si beaucoup ne se faisaient pas d’illusions sur leurs véritables desseins en termes de changement de son modèle sociétal. Rappelons, pour être juste, que Nabil Karoui est loin d’avoir le statut de militant pour le 1er et de politique pour le 2ème.

  • Le déficit en communication du candidat Chahed

En juillet dernier, le gouvernement n’avait pas, assez ou pas de la bonne manière, communiqué sur la question des amendements du code électoral qui auraient pu régler le cas Karoui. La contre-offensive en communication de crise, de la partie impactée par ces amendements, avait été plus réactive, plus immédiate et plus percutante. Le bombardement intensif, d’arguments qui paraissent à première vue justes, avait fait que le peuple n’avait retenu de ces amendements que l’effet rétroactif, présenté en tentative d’exclusion de celui que tous les sondages donnaient pour gagnant.

Le même peuple, déjà remonté contre une autorité en place (le gouvernement), que presque tout le monde accusait de toutes les difficultés économiques et financières des 3 dernières années, a vite fait de classer Nabil Karoui dans la case de la victime de l’autorité et avait déjà décidé, en sanction à l’autorité que représente Chahed, de le soutenir. D’où le fait qu’il soit resté en tête des sondages, qui donnaient déjà la tendance du vote de sanction. Instinctivement presque, et sans même connaître son programme pour la Présidentielle, une partie de la population s’est rangée du côté de «la victime» de l’autorité que représente Youssef Chahed.

Quand bien même l’ancien chef de gouvernement n’aurait eu aucun lien avec tout ce qui est arrivé à Nabil Karoui, ce qui reste à vérifier par l’enquête diligentée par le ministère de la Justice et dont les résultats tardent, cela aurait eu peu d’impact sur ce penchant du Tunisien d’être pro-victimes. Cela aurait aussi laissé Karoui, par dépit, par incompréhension ou refus populaire des résultats de Chahed à la tête du gouvernement, et aussi par désir de sanctionner ces résultats, aux premières loges des sondages d’opinion.

  • Des campagnes électorales aux antipodes

Peut-on alors aller jusqu’à dire que le candidat Chahed rate encore sa communication électorale, en la focalisant sur son bilan, au lieu de l’axer sur celui de son concurrent et en démontrer ses lacunes et ses faiblesses ?

Pour l’instant, les campagnes électorales, de l’un et de l’autre, ne sont pas au même niveau et n’utilisent pas les mêmes moyens. Chahed mène une campagne, plus que conventionnelle, multi-cibles, avec des apparitions sur un ton presque monocorde, loin des envolées Macronistes qui créent l’enthousiasme populaire et dessinent au scalpel son image de battant. Qui plus est, il s’obstinait à faire du bilan de ses 3 ans à la tête du gouvernement, son faire-valoir, presque sans verve et en tout cas en l’absence de son rival, de peur certainement de confirmer les accusations qui lui sont lancées d’être derrière.

Karoui focalise à fond sur son statut de victime de Chahed, et utilise pour cela tous les moyens. Relayé par deux chaînes de TV et une armée de fans (par conviction, par dépit ou par vengeance, peu importe), sur les réseaux sociaux, il en invente des modes de communication (la dernière campagne sous le thème «Mriguel» par exemple). Une campagne qui n’a pas peur d’être «line-border» même avec les lois et les règles, mais qui laisse des traces, et qui pourrait même être boostée, si le juge lui permettait aussi de la faire à partir de sa prison.

  • Le second tour sera encore plus déterminant dans la Présidentielle

Auraient-il des indices qui les détermineraient déjà en tant que ses principaux concurrents, l’un de l’autre, à la fin du 1er tour de la Présidentielles anticipée ? Ils savent, pourtant, que le principal vrai concurrent de toute la tendance politique des modernistes et des démocrates et de la «Tunisian Way of life » que défend toute cette tendance, est bien Abdelfattah Mourou et quelques autres têtes d’Ennahdha. Cette autre bataille, plus idéologique, pourrait d’ailleurs bien être le point focal de la guerre du second tour de la Présidentielle, qui sera aussi fortement impactée par les résultats des Législatives qui se dérouleront entre les deux tours du scrutin présidentiel.

Karoui est actuellement en prison et pourrait le rester jusqu’à la fin de la campagne électorale de la Présidentielle anticipée. Il pourrait avoir accès, si la justice le veut selon le président de l’ISIE, à quelques apparitions média, mais ne pourra pas enchaîner les harangues vers sa base. Les Tunisiens pourraient bien jouer à fond la carte de la sanction contre Youssef Chahed et propulser Nabil Karoui au 1er tour.

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