La loi N° 41-2024, promulguée le 2 août 2024, modifiant et complétant certaines dispositions du code de commerce et portant, principalement, sur la nouvelle réglementation des chèques, entrera en vigueur à partir du 2 février 2025.
Ce texte introduit des changements majeurs dans la gestion et la régulation des chèques en Tunisie, des changements qui impactent tous les acteurs impliqués dans le cycle de vie d’un chèque (depuis la délivrance du carnet jusqu’à la régularisation des éventuels incidents de paiement).
Cette loi , dans l’esprit du législateur, a vocation à renforcer la sécurité et la fiabilité des transactions par chèque, améliorer les pratiques bancaires, réaliser le développement économique et la justice sociale et régulariser la situation des personnes condamnées ou poursuivies pour émission de chèque sans provision avec des garanties pour le créancier.
En vertu de cette loi, chaque banque doit ouvrir un compte courant, utilisable par chèque, pour chaque client qui en fait la demande. Avant de délivrer des formules de chèques au client, la banque doit consulter la Banque centrale de Tunisie pour vérifier la situation du titulaire du compte.
Elle doit prendre les mesures nécessaires pour éviter l’émission de chèques sans provision.
La valeur totale du chéquier est plafonnée avec une valeur maximale par feuille ne dépassant pas 30 000 dinars.
Tous les chèques doivent être barrés dès leur délivrance. Les feuilles non barrées doivent faire l’objet d’une demande spécifique. La durée de validité d’un chéquier ne dépasse pas 6 mois. Chaque chèque doit inclure des informations de vérification électronique (QR code).
La loi prévoit, par ailleurs, la création d’une plateforme électronique centralisée des chèques « PECC » qui sera mise en place et gérée par la Banque Centrale de Tunisie. L’ensemble des établissements bancaires sont tenus d’y adhérer. Elle permettra au bénéficiaire d’un chèque de vérifier instantanément l’existence d’une provision suffisante et de la réserver si souhaité.
Dépénalisation pour les chèques de moins 5000 DT
La nouvelle loi stipule, en outre, la suppression de la criminalisation de l’émission de chèque sans provision pour un montant égal ou inférieur à 5000 dinars. Elle modifie les règles de poursuites judiciaires qui ne sont plus déclenchées qu’à l’initiative du bénéficiaire et non d’une manière systématique. Ces poursuites ne sont désormais possibles que si le montant du chèque est supérieur à 5000 D.
Mise en place d’une plateforme électronique
Avant cet amendement, l’article 411 du Code de commerce prévoyait cinq ans de prison par chèque rejeté — les peines étant cumulables — et une amende de 40 % du montant de ces chèques. Désormais, l’amendement du Code de commerce contribuera à réduire la peine de prison à 2 ans et une pénalité estimée à 20% du montant et à dépénaliser les chèques ne dépassant pas 5 mille dinars et à plafonner les chèques à 30 mille dinars.
Le texte propose également de faire passer la peine à dix ans de prison dans le cas où celle-ci dépasserait initialement les vingt ans de prison et de la diviser par deux si celle-ci était inférieure à vingt ans.
Concernant les peines, elles ne seront plus cumulatives. Cela revient à dire que l’émetteur de vingt chèques en bois aura la même peine que celui qui en émet un seul. Il est également question de réduire la peine qui est actuellement de cinq ans de prison pour chaque chèque en bois émis. Notons également que cette nouvelle disposition bénéficie aux personnes actuellement incarcérées dans la mesure où les nouveaux textes auront un effet rétroactif.
On note également la suspension de la peine pour les détenus honorant leurs engagements financiers lors de leur incarcération. Le projet de loi annulera enfin les frais et les pénalités pour les condamnés en cas de paiement de la somme due.
Plus de 500 personnes seraient derrière les barreaux
La question des chèques en bois pose vraiment problème en Tunisie. Des chiffres officiels communiqués fin 2022 font état d’une situation alarmante : plus de 500 personnes seraient détenues pour avoir émis des chèques sans provision et plusieurs milliers de personnes seraient recherchées. La Banque centrale de Tunisie a enregistré quant à elle plus de 400 000 chèques rejetés, totalisant 3,5 milliards de dinars (environ 1 milliard d’euros) pour la seule année 2023.