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Tunis : Amel Karboul fait ses comptes pour 2014 et estime que 3 + 1 = 7 millions, « mais je ne signe pas ».

Elle est ministre d’un an, pour un secteur dont les difficultés, rien que financières, demanderaient dix ans pour être résolues. Elle est ministre transitoire, pour un secteur dont les problèmes sont séculiers, et elle le sait. Depuis la publicité inespérée que lui a faite un malheureux député de l’Assemblée Constitutionnelle tunisienne, cette fille d’un ancien homme d’Etat, ne cesse de bouger, brassant de l’air parfois, mais faisant presque toujours mouche pour l’image du tourisme et d’un pays, jusque là identifiée sur la sienne.

Après juste un mois de son entrée dans le bureau de ministre du tourisme, Amel Karboul semblait déjà connaître son dossier et en parlait même avec une certaine assurance, lorsque nous l’avions rencontrée au ministère, voisin de l’ONTT, sur le boulevard Mohamed V à Tunis. La ministre a déjà pris connaissance des études stratégiques et les diagnostics, déjà faits pour le secteur du tourisme et ne compte pas en faire d’autres. La tâche ne semblait en tout cas pas lui faire peur et sa sérénité ne semble avoir d’égal que sa confiance en elle-même. «Je veux mettre en place le programme nécessaire pour sauver le tourisme, de manière à ce que n’importe quel ministre qui viendra après moi, trouve déjà une équipe au travail». Et lorsque nous lui demandons ce qu’elle compte faire, la réplique est vite donnée : «commencer par toutes les actions nécessaires, même si elles demandent beaucoup de temps». Pour cela, en vrai spécialiste du coaching, sa stratégie est déjà prête. Fièrement, elle l’appelle «3 + 1», les premiers en front-office et le dernier en back-office. Amel Karboul assure que cette stratégie a été mise en place avec les professionnels et nous rit presque au nez, lorsqu’on lui demande si elle a déjà eu le temps de les voir et de les concerter, en précisant, avec le même sourire, que «de quoi tu parles, c’était même avant de voir mes directeurs que j’ai fait deux workshops avec les professionnels ».

En premier lieu, le branding. «Je voudrais redéfinir et reconstruire l’image de la Tunisie, jusque-là bâtie sur le soleil et la plage», dit-elle avant de nous raconter l’anecdote de l’ambassadeur de Malaisie qui lui a dit que «si on avait ce que vous avez, on aurait 20 millions de touristes par an», et éclate d’un rire franc lorsqu’elle précise qu’elle lui a donné raison. Amel Karboul nous annonce , en outre, que «la cellule branding, déjà mise en place, travaille aussi sur la mise en valeur des spécificités touristiques de chaque région de la Tunisie», et fait le souhait de mettre en place «une cartographie touristique de la Tunisie, pour en tirer profit au niveau de la diversification du produit». Elle en profite, cependant, pour écorner quelque peu les professionnels du secteur, même si sa remarque n’est pas fausse. «Je crois qu’on n’est pas encore très professionnels sur la question du branding. Nous ne savons pas encore tirer profit des richesses dont nous disposons, comme l’effet révolution ou l’effet nouvelle Constitution et nous ne communiquons pas dessus. On manque beaucoup de know-how et de RH. On investit beaucoup dans le matériel et peu dans l’immatériel», dit-elle à juste titre. Elle oubliait que la grande majorité des hôteliers tunisiens travaillent en contrat d’allotement et ne sentent pas encore la nécessité de la communication.

En second lieu, dans sa stratégie, l’on découvre qu’elle ne réinvente pas la roue mais dépoussière de vieux dossiers, la qualité en matière surtout d’environnement, de propreté et de sécurité. «Nous mettons, pour la propreté, une task-force, car nous ne voulons pas faire dans le populisme. Avec beaucoup de ministres, on est en train de mettre au point une stratégie systémique», dit-elle comme dans un clin d’œil à ceux l’en auraient accusée.

En dernier lieu, la diversification du produit et les régions. «On a des régions sinistrées, comme le Sud-ouest et le Nord-ouest, mais aussi la diversification pour sortir du 80 % balnéaire qui est d’ailleurs dans une spirale vers le bas, par le golf, le saharien, la thalasso et le culturel».

Cela complète les 3 premières priorités de la nouvelle ministre. Le plus, ce qu’elle appelle le «+ 1» en back-office. «Cela veut dire, modernisation de la gouvernance au sein du ministère du Tourisme pour atteindre les 3 premiers objectifs, c’est-à-dire revoir les méthodes de travail et la manière dont on est structuré et qui n’aide pas actuellement à mener le tourisme tunisien vers le futur», explique-t-elle sans vouloir utiliser le mot «restructuration du ministère», mais «modernisation et mise en valeur». A la question de chiffrer ses objectifs, au moins pour le court terme, la ministre du tourisme évoque le chiffre de sept millions d’entrées. Elle se rétracte ensuite pour dire que «je ne vais pas vous signer cela, car si demain, quelque chose arrive, tout changera». Signe en tout cas, que la ministre sait très bien qu’elle travaille, parfois aussi, dans un environnement dont elle ne maîtrise pas tous les intrants. Pour l’instant, elle travaille sur un paquet fait d’événementiel, de subvention de l’aérien, de publicité conjointe avec les TO et surtout de thèmes de la propreté. Des actions qui ne réinventent quand même pas la poudre, tant qu’elles ont été toujours ruminées par tous ses prédécesseurs.

Amel Karboul refuse qu’on lui dise qu’elle est une ministre d’une année et elle prend un petit malin plaisir à dire avec un petit air enjoué, qu’elle «n’est pas là pour refaire les mêmes bêtises», et lorsqu’on lui rappelle qu’elle n’est pas là, non plus, pour refaire le monde car elle sera jugée sur le court terme qui est la prochaine saison estivale, elle se concentre de nouveau, répond «non» et évoque sans trop les détailler les «priorités de la prochaine saison 2014, où « toutes mes équipes travaillent depuis l’année dernière, et je mets le paquet sur le moyen et long terme, sans prioriser l’un sur l’autre, sinon il faudra choisir quelqu’un d’autre», toujours avec une voix enjouée. Dur, dur d’être ministre dans la Tunisie de la transition.

Khaled Boumiza.

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