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Tunisie : La situation de Tunisair est très difficile, mais ni catastrophique ni désespérée. Dixit le nouveau PDG.

Rabah Jrad ne connaît peut-être pas trop Tunisair. Il n’est, en effet, pas technicien de l’aviation. Gestionnaire, nourri pendant de très longues années d’expérience chez la Steg, aux spécificités des grandes entreprises, il a pourtant la tête de l’emploi. Et c’est cette connaissance, presqu’innée de tels dossiers, qui l’avait mis visiblement à l’aise en nous parlant des chiffres d’une entreprise dont il n’avait pourtant pris les rênes que depuis deux semaines. Un poste où ne l’envierait pourtant personne, avec les difficultés que connaît Tunisair, sous les coups de béliers répétés, du syndicat ouvrier et de la conjoncture touristique qui ne tourne toujours pas au rose. C’est donc avec un PDG, à peine débarqué, que nous avons parlé de tout cela. Interview.

Comment se présente la situation financière de la compagnie au vu des chiffres de deux premiers mois de l’année en cours ?

Vous savez que l’année 2011 a été difficile pour Tunisair comme elle l’a été pour le pays. Les répercussions de la crise et de l’après-révolution ont affecté l’entreprise avec la régression de l’activité, surtout au niveau des charters. Les répercussions étaient cependant moins importantes au niveau des vols réguliers. L’année 2011 s’est achevée sur un déficit annoncé qui était important…

Il dépassera quand même les 250 millions de dinars…

Non. Beaucoup moins. Il était estimé à 200 millions de dinars. Nous attendons toutefois pour le confirmer, les chiffres qui seront validés par le commissaire aux comptes. Tout cela pour vous dire que les résultats ont été meilleurs que ce qui était prévu. Les chiffres de deux premiers mois de l’année en cours sont un peu plus rassurants. Ils dépassent même ceux de 2010. Par rapport à ceux de 2010, ils sont en progression de 10%, pour ce qui est notamment des vols réguliers. Nous espérons qu’avec le retour du tourisme, au sujet duquel les prévisions sont meilleures que celles de l’année dernière, les résultats de 2012 seront meilleurs que ceux de 2011. Avec l’impact de la réintégration de plusieurs agents, le résultat ne va donc pas être positif en 2012. Il y aura une augmentation des charges. Nous allons tout faire pour comprimer les coûts et ils peuvent l’être, sans pour autant affecter la qualité du service de la compagnie. 2012 pourtant enregistrera une amélioration par rapport à 2011, ainsi qu’en 2013 avec le plan de redressement que nous allons établir bientôt, et à la faveur duquel nous espérons équilibrer la situation, fin 2013.

Comment expliquer alors les cris d’alarme émanant, comme nous le savons en tant que journalistes, des syndicats, et même de votre ministre de tutelle qui parle de situation catastrophique ?

La société n’a pas honoré ses engagements envers certains fournisseurs, tel que l’OACA vis-à-vis duquel elle a des dettes, de même pour la CNSS. Ceci fait que la trésorerie est très déficitaire. 80 millions de dinars de crédits d’exploitation. L’essentiel, c’est que les dettes vis-à-vis de nos fournisseurs habituels soient honorées. Il reste l’OACA et la CNSS. Avec la CNSS, on s’achemine vers un moyen pour solutionner le problème. Pour ce qui de l’OACA avec lequel nous sommes sous la même tutelle, nous allons nous rencontrer pour proposer éventuellement au gouvernement comment résoudre le problème. On trouvera certainement les solutions qui satisfassent les uns et les autres.

Quand l’entreprise est obligée de reporter certaines livraisons, de contracter des crédits d’exploitation, des crédits d’investissement, cela ne peut qu’alourdir les charges. S’y ajoute l’impact de tout ce qui est réintégration des filiales, avec tout le personnel qui est intégré et l’alignement des salaires. Toutes ces charges ne sont pas compensées par une amélioration du chiffre d’affaires…

Tout cela ne va pas affecter la continuité des services de Tunisair ?

Au contraire, nous accordons une importance capitale à l’amélioration de la qualité du service, car c’est la base pour avoir de nouveaux passagers et récupérer les passagers perdus par Tunisair. La qualité du service, c’est le premier des objectifs du processus d’amélioration. Ne parlons pas de la sécurité. Nous sommes intransigeants au niveau de la sécurité. Tunisair n’a jamais eu de problème à ce niveau. Elle a eu des problèmes au niveau de la ponctualité, un problème qui sera réglé dans le cadre de notre plan d’amélioration de la qualité du service. Nous faisons par ailleurs tout ce qui est possible de faire, pour réduire les retards. Il y a encore quelques perturbations, mai on constate une amélioration. Comme je lai dit plus haut, les résultats de 2012 nous rassurent sur les perspectives de l’année en cours. On va adopter par la suite la politique adéquate qui mette fin à toute malversation, à comprimer les coûts et à maitriser les facteurs exogènes. Heureusement, maintenant et désormais, on n’a plus d’interventions extérieures, plus d’immixtion de qui que soit dans la gestion de l’entreprise. L’entreprise est maîtresse de sa gestion.

Pourquoi on parle de corruption à Tunisair. Est-ce qu’il y en a tant au sein de l’entreprise ? Quand on parle de direction qui s’employait à mettre à genoux Tunisair pour la donner ensuite aux familles, y a-t-il derrière tout cela des surenchères syndicales ?

Ce que je peux dire, c’est que la commission nationale de lutte contre la corruption a demandé certains dossiers et que Tunisair a envoyé tout un paquet de dossiers qui ont été demandés par cette commission.

Des informations sur certains sujets ?

Des informations ont été fournies concernant les questions qui ont été posées par la commission à propos de certains sujets, et des documents demandés par la commission lui ont été envoyés. Deuxième chose : le Premier ministère a envoyé une équipe d’inspection, qui travaille depuis neuf mois. Cette commission n’a pas encore terminé son travail. Tunisair a mis à la disposition de cette commission indépendante tout ce qu’il faut pour qu’elle accomplisse son travail sans aucune intervention.

Qu’en est-il des représentations de Tunisair à l’étranger ?

Nous avons différentes représentations à l’étranger. Il y a au sein de la société une direction d’audit et une direction d’inspection. Chaque fois qu’il y a des informations selon lesquelles certaines choses ne marchent pas, la direction d’inspection effectue des interventions à la demande de la direction générale. Aujourd’hui, il y a deux représentants qui sont passés devant le conseil de discipline suite à des audits. Aujourd’hui, ce qu’on reproche, c’est des dépassements au niveau de la gestion. Le premier représentant concerné, était à Amsterdam. Il a été muté à Dakar. Le second, c’est le représentant à Londres. Il passe devant le conseil de discipline, et nous attendons la délibération du conseil.

Nous allons par la suite voir le résultat de la commission du Premier ministère si elle va auditer certaines agences et représentations. Il y a des échos sur certaines, on va cibler les représentations les plus importantes pour les inspecter et pour nous assurer qu’il n’a pas de dépassements, et s’il y en a, nous prendrons les mesures qui s’imposent.

Il est question de remettre en question la restructuration des filiales. Est-ce qu’il va y avoir «re-filialisation » de toutes les anciennes compagnies ?

Un accord a été signé, en février, entre le syndicat, le ministère et la société. Nous respectons les engagements. On va voir comment l’appliquer. Il y a en un début d’application. On ne va pas revenir sur l’accord et on verra par la suite avec le syndicat.

Est-ce que vous avez en tête l’ébauche d’un plan de restructuration, de sauvetage de Tunisair ?

Il y a une ébauche qui a été faite par mon prédécesseur et qui a été envoyée au ministre du Transport. C’est un plan de redressement, fait suite à un audit qui a été fait par une entreprise étrangère. Nous allons entreprendre une consultation pour voir avec les responsables de la société son actualisation. Nous allons, dans un proche avenir, arrêter ce plan et l’annoncer aux agents de la société, car il faut que toutes les unités de la compagnie y participent, le sauvetage d’une entreprise ne pouvant être fait que par ses propres cadres et agents.

Quelles sont les principales orientations de ce plan ?

Je dirais que nous sommes en présence d’une situation difficile mais pas accablante. On trouvera un arrangement pour les créanciers. Cela nous donnera une facilité pour repousser le règlement des dettes. Il y a le plan de vol qui est en cours d’examen. On a un laps de temps pour nous décider à ce propos. Enfin, il y a la question de la vente des avions présidentiels qui est sur la table, et nous espérons trouver des acheteurs rapidement pour que cela puisse nous alléger un peu les crédits et rembourser une partie de la vente qui a été faite et récupérer le prix de l’avion qui est déjà amorti, ce qui nous permettra d’avoir une bouffée d’oxygène. D’autre part, on va comprimer toutes les dépenses et fermer les vannes de toutes les fuites qui se trouvaient auparavant, et sensibiliser le personnel pour améliorer sa productivité et être partie prenante dans le sauvetage de son entreprise. Nous allons étudier les lignes existantes et les représentations existantes pour voir celles qui n’ont pas une rentabilité certaine , et prendre des décisions pour mettre en place une nouvelle organisation dont l’étude prouve qu’elles n’ont pas été utiles, et penser à ouvrir de nouvelles lignes .

Et ce fameux nouvel avion, est-ce qu’il a été vendu ou pas ?

Pas encore. Il y a des acheteurs potentiels qui ont exprimé leurs intentions, mais qui sont en cours d’évaluation .Il y a la commission nationale qui a été décidée par le gouvernement pour s’occuper de ce dossier, mais, jusqu’à présent, il n’y a pas d’offre concrète chiffrée.

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