AccueilLa UNETunisie : Que se passe-t-il à Gabès, Médenine et Tataouine ?

Tunisie : Que se passe-t-il à Gabès, Médenine et Tataouine ?

Le dernier sondage d’opinion de 3 C Etudes réserve bien des surprises. L’une des moins importantes est, bien sûr, la bipolarisation de la vie politique entre Ennahdha qui se maintient bien qu’il ait perdu 32 % de son potentiel électoral depuis octobre 2011, et Nida Tounes qui devient la première formation politique en Tunisie, avec 29,8 % d’intentions de vote contre 29,4 % pour Ennahdha. Cela donne plus d’une explication sur les attaques incessantes du parti au pouvoir et ses satellites contre le parti qui rassemble désormais presque 30 % des intentions de vote. L’autre surprise, importante, est cette ascension, à plus de 49,2 % en février, du taux de ceux qui ne savent toujours pas pour qui voter. Un chiffre qui pourrait impacter le taux de participation à de prochaines élections et ouvrirait grandes les portes devant une domination d’Ennahdha qui redeviendra, ainsi, le parti unique de fait que tous les Tunisiens veulent éviter pour ne pas revivre l’ère Ben Ali.

– Le Sud tunisien content de ses hommes, même s’ils ne font rien !

Mais la surprise la plus importante dans l’absolu, dans les résultats du 14ème baromètre politique de 3 C Etudes, réside dans le très haut taux de satisfaction des résultats de l’action du gouvernement qui, plus est, est enregistré dans seulement trois régions de la Tunisie. Ce taux de satisfaction atteint 57 % à Gabès, 54 % à Tataouine et 41 % à Médenine, trois régions du Sud tunisien. Des ces trois gouvernorats, pourtant, il n’y a aucune information d’une baisse drastique du taux de chômage, aucune information d’une myriade de projets industriels ou d’infrastructures qui auraient enfin désenclavé ces régions en matière de développement et aucune inversion spectaculaire des courbes des prix ou de la hausse de ceux des salaires. Gabès ne vit que de l’industrie chimique, honnie par les habitants, souffre de la pollution et souffre le chômage. Tataouine et Médenine sont des régions aux confins du désert tunisien, qui ne vivent que du trafic et de la contrebande transfrontalière et d’un secteur touristique toujours sinistré. Que s’est-il donc passé pour que seules ces trois régions deviennent, soudain, super-contentes du rendement d’un gouvernement démissionnaire et qui a avoué son échec, qui fait, par ailleurs, l’unanimité dans la Tunisie de la révolution ?

 

Un brin d’explication pourrait venir du fait que Rached Ghannouchi est originaire de Ghannouch, une région qui fait partie intégrante du gouvernorat de Gabès. Nombre d’autres leaders du parti islamiste sont aussi issus de ces régions du Sud où la référence religieuse et le conservatisme font partie du mode de vie de ces régions intérieures. Des régions du Sud tunisien aussi, où le Salafisme djihadiste s’était installé depuis les confins avec la Libye et le Mali. Un autre brin d’explication pourrait venir de l’origine sudiste des «Mrazigues», la tribu d’origine de l’actuel président provisoire, Moncef Marzouki qui perd, certes, du terrain, mais qui se maintient lui aussi dans les intentions de votes présidentiels devant Hammadi Jbali et Béji Caïed Essebssi.

– Un référentiel politique, seul porteur d’appui électoral qui s’oriente vers les régions.

De l’avis des quelques politologues et sociologues que nous avons pu contacter, cette régionalisation d’au moins une partie de la scène politique tunisienne, est, en fait, l’effet boomerang de la révolution. Un effet accentué, certes, par les déséquilibres régionaux qui ont été révélés par la révolution. Mais un effet, surtout, exacerbé par l’absence de leadership dans la révolution qui avait fait fuir les anciens dirigeants tunisiens et surtout par un révérenciel populaire qui se détourne ainsi vers les figures régionales. A tout cela s’ajoute une intelligentzia politique qui puise, elle aussi, désormais, son référentiel et son soutien dans les régions. Avec Bourguiba ou Ben Ali, les députés ne représentaient pas les régions, mais le peuple tunisien dans les régions. Leur souci des affaires des peuples de leurs régions, se devait aussi de s’inscrire dans le cadre, beaucoup plus global, des soucis des affaires de toute la Nation et du pays en entier, les amenant, de fait, à relativiser les revendications régionales et à prendre la Nation comme référentiel unique de l’action politique. Avec l’éclatement de l’unité populaire par l’explosion du nombre des partis politiques, dont certains ont même une essence régionale, le référentiel politique, source d’appuis pour de prochaines élections, devient la région.

KaBou.

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