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Un scrutin qui sonne le tocsin d’alarme

Les élections législatives tunisiennes du 17 décembre ont tout fait sauf atténuer les fissures profondes qui minent la société. Environ 89 % se seraient abstenus de voter pour un parlement désormais dépourvu de pouvoir, signalant une profonde désaffection et, avec elle, la mort de l’illusion que le « projet » politique de Saied pourrait enfin apporter « pain, liberté et dignité » aux Tunisiens, écrit sur « The Hill », le 1er site l’information politique et institutionnelle américaine, la directrice régionale MENA de l’Institut Républicain International, Patricia Karam.

Saied a été élu en 2019 en prônant une forme de « populisme par le haut » qui cherchait à opposer les élites au peuple (qu’il prétendait représenter). Les sondages d’opinion ont d’abord montré que les actions de Saied étaient soutenues par des Tunisiens frustrés par une décennie d’inefficacité politique et de politiques qui n’ont pas réussi à lutter contre le chômage et la pauvreté.

La loi électorale récemment décrétée par Saied stipule que le nouveau parlement sera constitué non pas par des députés représentant leurs partis mais par des personnes représentant leurs districts. Cette loi, en créant des contraintes financières et sociales pour les candidats, comme l’élimination du financement public des campagnes et l’interdiction de la publicité des partis politiques, a effectivement scellé le sort de la démocratie des partis en Tunisie. Et bien qu’environ cinq partis et quelque 1050 candidats se soient présentés, 12 des partis les plus influents, dont le modérément islamiste Ennahdha, ont boycotté ces élections, remettant en question la crédibilité globale du processus et la légitimité de Saied. Alors que Saied prétendait autrefois que les efforts déployés pour promouvoir sa vision paternaliste de la politique tunisienne illustraient la volonté du peuple, le soutien populaire à cette vision est désormais difficile à vérifier.

Déviation vers le parti unique !

L’économie est l’un des éléments qui pourraient encore faire dévier la trajectoire de Saied vers le parti unique. Au cours des 18 mois qui ont suivi le lancement de son projet, la Tunisie est allée de mal en pis : inflation galopante, chômage incontrôlé et inégalités persistantes. L’aggravation du clivage entre la côte et l’intérieur du pays a vu le littoral prospérer au détriment de l’intérieur et des agglomérations populaires  des environs de Tunis qui ont été pratiquement négligés par les investissements internationaux.

 Aujourd’hui, les Tunisiens ordinaires sont tout aussi préoccupés par leur survie au quotidien. Les prix des denrées alimentaires ont grimpé en flèche ces derniers mois et les pénuries de produits de base – lait, huile, sucre et même eau en bouteille – menacent de transformer le mécontentement public en une agitation plus large, avertit l’IRI.

Et d’ajouter : « Le fait que de nombreuses personnes semblaient prêtes à parier sur un dictateur véniel qui promettait d’améliorer leur vie tout en centralisant le pouvoir n’est pas surprenant étant donné la culture dominante du « grand État » qui prétendait assurer la sécurité, les opportunités économiques et un filet de sécurité sociale, indépendamment du système politique. La nouvelle assemblée châtrée dispose d’encore moins de pouvoirs, incapable de démettre le gouvernement ou de déloger le président dont les projets de loi prévaudront sur ceux proposés par les membres du parlement. Mais la plupart des citoyens ont aujourd’hui le sentiment que leur qualité de vie s’est encore plus détériorée que sous Ben Ali, et leurs demandes d’emploi et d’accès aux ressources de l’État sont largement insatisfaites ».

Le bénéfice du doute s’érode

La réaction d’une grande majorité de l’électorat lors des récentes élections – le silence – suggère que le bénéfice du doute initialement accordé à Kais Saied et à son équipe s’est érodé. De nombreux Tunisiens qui avaient initialement soutenu Saied le considèrent désormais moins comme un sauveur visionnaire que comme un autocrate incompétent qui n’a pas été capable, malgré les mesures drastiques prises, d’améliorer la vie des gens, souligne la DR de l’IRI. Pour la première fois depuis le coup d’État constitutionnel de juillet 2021, ils envoient le message que, peu importe ce que l’élection apporte, le leadership de Saied ne peut pas résoudre les graves problèmes économiques et sociaux auxquels ils sont confrontés. Plutôt que de l’apathie ou du désintérêt, il s’agit d’une démonstration d’agressivité passive de la part d’un public désabusé par le processus politique, qu’il soit incarné par Kais Saied ou par des politiciens avant lui.

Si cette élection prouve l’échec réel de la poussée autocratique en Tunisie, il ne faut pas confondre ce rejet populaire avec une adhésion aux opposants de Saied. Tant qu’il n’y aura pas d’alternative cohérente, les Tunisiens ne joueront pas le jeu. Cela devrait être un signal d’alarme pour toutes les forces politiques qui défendent la démocratie et la justice sociale, afin d’évaluer ce qui n’a pas fonctionné, de regagner la confiance du public, et surtout, de convaincre les Tunisiens de l’intérêt de se réengager dans le processus politique, en utilisant ce moment comme une opportunité de construire une nouvelle expérience démocratique plus fonctionnelle en Tunisie, conclut Patricia Karam.

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1 COMMENTAIRE

  1. Dans cet article, il y a du vrai et du faux et quand il y a ce mélange le lecteur n’a pas confiance à cette analyse, on a l’impression que l’auteur de cet article n’est pas neutre. Les élections législatives ont donné un taux d’absentéisme record soit 89% environ, à quoi est du ? tout simplement à ce que les électeurs ne connaissent pas les candidats et les candidats n’ont aucune expérience dans la vie économique et politique. Aussi le parlement de cette législative n’a aucun pouvoir d’agir, donc c’est inutile d’aller voter et perdre son temps. Pour ce qui concerne le développement du littoral au détriment des régions e l’intérieur, cette situation date depuis les années 70 jusqu’à maintenant et donc ce n’est pas l’affaire de KS sans oublier que les gouvernements d’avant 2011 ont adopter des politiques de décentralisation positive et engageante à tel point que les investissements prévus dans les zones de développement prioritaire auront des subventions allant jusqu’à 30% de l’investissement global, ces subventions ne sont pas remboursables, c’est du gratis. Il y a en a même des investisseurs qui ont profité de ces subventions pour migrer dans le littoral et investir dans le commerce. On déduit que le développement de l’intérieur est une question de patriotisme des individus des régions, ce sont eux qui développent et investissent dans leurs régions, malheureusement c’est le contraire qui s’applique, même s’ils ont de l’argent ils préfèrent investir dans les régions côtières, peut être à cause du manque d’infrastructure d’accueil (Théatre, cinéma, jardins publics, commerce moderne, lieu de distraction, clubs, musique, centres de loisirs, écoles haut niveau, administration décentralisée, banques, institutions d’appui, routes, transport ….

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