AccueilLa UNEVers une tarification carbone en Tunisie

Vers une tarification carbone en Tunisie

Spécialistes et activistes environnementaux sont d’accord pour signaler la persistance, en Tunisie, d’un hiatus entre un discours très engagé en faveur de la lutte contre le changement climatique et des actions concrètes  plutôt timides en faveur de ce qui est appelé décarbonisation, ou neutralité carbone, définie comme étant la réduction maximale des émissions de gaz à effet de serre (GES) et plus particulièrement le dioxyde de carbone ou gaz carbonique, principal facteur du changement climatique.

Or, l’étau se resserre un peu partout et pour tous les pays, et toute fuite devient impossible, malgré l’apparence de relâchement. La prise en considération de la dimension carbone s’est étendue à tous les aspects de l’activité humaine, qu’elle soit de nature économique, ou sociale.

Des rapports internationaux indiquent que les banques et les institutions financières d’investissement sont devenus maintenant très réservées en matière de financement des projets douteux, comme les projets d’activités pétrolières et prospections de pétrole et de gaz ou utilisant le charbon, dits sources d’énergies fossiles par opposition aux énergies propres générées à partir du rayonnement solaire ou du vent par exemple.

La cotation en Bourse devient sensible à ce volet. En France par exemple, l’investisseur est obligé de donner des informations aux souscripteurs sur le bilan carbone de son projet.

Cette dimension couvrira bientôt toutes les exportations et l’ensemble des échanges économiques et commerciaux.

Aussi, selon l’Agence nationale de maîtrise de l’énergie, la Tunisie envisage de mettre en place les conditions favorables lui permettant d’instaurer une politique de tarification carbone pour appuyer sa politique de transition énergétique et d’atténuation des émissions de gaz à effet de serre.

Dans ce cadre, l’initiative de la Banque Mondiale « Partnership for Market Readiness » constitue une opportunité pour appuyer la Tunisie dans ce processus, indique l’Agence.

De son côté, l’expert financier Ahmed El Karam a fait récemment des suggestions dans ce sens.

«La Tunisie devrait créer son marché carbone, pour accompagner la transition écologique, atteindre la neutralité carbone et faciliter le financement de certaines opérations des entreprises», a-t-il affirmé, lors d’un séminaire sur «La compétitivité des entreprises face au risque carbone», organisé, en novembre dernier à Tunis. Il a ajouté que la Tunisie dispose de tous les atouts et des compétences nécessaires pour créer ce marché carbone, un système d’échange de droits d’émissions de gaz à effet de serre, de crédits carbone et de quotas carbone très développé actuellement en Europe et dans d’autres pays.

Mise à niveau impérative

Ahmed El Karam a recommandé une mise à niveau des entreprises exportatrices sur ce plan, avec le soutien des partenaires européens, afin de les aider à appliquer les nouvelles normes européennes relatives à l’émission de carbone.

De son côté, le spécialiste Abdelaziz Belhouji a expliqué que les importateurs dans les pays européens seront tenus, bientôt avec l’entrée en vigueur du Mécanisme d’Ajustement Carbone aux Frontières (MACF) à déclarer la teneur carbone des 5 produits importés, à savoir l’électricité, l’acier, l’aluminium et le ciment et les engrais, dans le cadre d’une période de test de deux ans (2023-2025).

«L’entrée en vigueur du MACF aura un impact financier sur les entreprises exportatrices, car elles seront tenues de payer le coût différentiel de la tCO2e du produit exporté et provoquera une perte probable de compétitivité et des parts de marché, ce qui exigera une mise à niveau ou un changement de la chaîne de valeur du produit exporté», a averti l’expert, appelant à prendre en compte le «risque carbone» dans la stratégie de développement des entreprises,

La part de la Tunisie dans les émissions de GEZ atteint seulement 0,007% de sorte qu’elle peut vendre les quotas dont elle n’a pas besoin sur le marché carbone.

Plateforme numérique

Ainsi donc, le marché carbone est un mécanisme qui permet d’échanger les émissions de gaz à effet de serre, notamment le gaz carbonique de la même manière que les titres financiers. On y vend et achète les émissions de gaz selon un quota dont l’unité est la tonne équivalent carbone, sur la base d’un prix fixé du quota.

Outre les marchés de carbone, les pays ont utilisé aussi la taxe sur le carbone, un impôt similaire aux diverses autres formes d’impôt.

Un rapport récent publié par le site spécialisé en la matière « novethic » signale que le monde compte actuellement 68 mécanismes de tarification carbone, taxe ou marché du carbone. Les recettes réalisées en 2022 dépassent 100 milliards de dollars.

Ainsi, le Fonds d’investissement public d’Arabie saoudite et le groupe Tadawul, sous l’égide duquel est placée la Bourse saoudienne, ont lancé la « plateforme d’échange volontaire de Riyad », un nouveau mécanisme qui permettra de vendre et acheter des crédits carbone « vérifiés, approuvés et de haute qualité » produits dans la région.

Dans un rapport paru il y a quelques jours, la Banque mondiale souligne que les marchés du carbone sont considérés depuis plusieurs décennies comme une partie intégrante de la lutte contre le changement climatique. Ils ont été jusqu’ici marqués par la prédominance du secteur privé, mais cette situation est appelée à changer. Plus des deux tiers des pays prévoient d’utiliser les marchés carbone pour atteindre leurs engagements au titre de l’accord de Paris, à savoir les « contributions déterminées au niveau national » (ou CDN).

Le même rapport ajoute que plusieurs pays sont déjà en train de se doter d’une infrastructure numérique de bout en bout, à la pointe de la technologie, pour intégrer les marchés internationaux du carbone.

S.B.H

- Publicité-

LAISSER UN COMMENTAIRE

S'il vous plaît entrez votre commentaire!
S'il vous plaît entrez votre nom ici

Réseaux Sociaux

108,654FansJ'aime
480,852SuiveursSuivre
5,135SuiveursSuivre
624AbonnésS'abonner
- Publicité -