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Tunisie : Un déficit, après modification, et des casseroles. Qui sauvera la STB ?

La première des banques nationales tunisiennes avait terminé l’exercice 2011 par un résultat net  bénéficiaire, mathématique, de 11,387 MDT. L’audit de la STB (Société Tunisienne de Banque) a cependant mis en évidence l’existence de risques provenant d’exercices antérieurs, des risques qui étaient acceptés, même par la BCT, et qui sont devenus après la Révolution, «insuffisamment couverts par des provisions». La banque a ainsi décidé  un provisionnement de 159 MDT en diminution des capitaux propres de 117 MDT et il en a résulté un déficit, après modification comptable, pour la banque, de 105,890 MDT. La STB étant aussi un groupe de 24 entreprises, sans compter celles qui restent en dehors du champ de consolidation, son résultat consolidé  devient lui aussi déficitaire de 130,749 MDT pour l’exercice 2011 après un exercice 2010 bénéficiaire de 18,628 MDT. Le premier pas vers la restructuration financière de la STB est ainsi engagé sous la conduite, sans concession, de la seule femme PDG de banque, Samira Ghribi

«Je n’ai jamais vu autant de réserves au cours de ma carrière», disait un actionnaire omanais.

Signe d’un temps de crise ou peut-être signe d’une volonté de serrer la ceinture en ces temps de rareté des ressources, l’AGO (Assemblée Générale Ordinaire) de la banque quitte le luxe des hôtels de la région du Lac où elle avait habitude de se tenir, pour se suffire du confort spartiate de l’amphithéâtre du siège de l’ancienne BDET qui avait fusionné avec la STB. On y découvrira alors les multiples réserves formulées par les Commissaires aux Comptes. Leur nombre avait même étonné un actionnaire étranger, du Sultanat d’Oman, présent à l’Assemblée avec deux autres, un Libyen et un Jordanien. «J’ai assisté, durant ma carrière, à des dizaines d’AGO. Mais, de ma vie, je n’ai jamais vu autant de réserves formulées comme j’en vois et cela jette un certain trouble sur les chiffres», disait d’un sourire ébahi l’actionnaire omanais, sans que cela n’inquiète outre mesure le reste des actionnaires.

Tout y passe, non exhaustivité de la base des données des garanties reçues, absence de réponses aux demandes des CC d’informations sur les litiges, absence d’informations restituées par le système comptable au titre des engagements hors bilan, absence d’un inventaire des garanties réelles reçues, absence d’une comptabilité multidevises autonome, 97 MDT de garanties retenues mais non appuyées par des justificatifs 781 MDT de garanties dont l’ancienneté remet en cause l’hypothèse de liquidation rapide. Et ce n’est pas tout, des réserves, encore des réserves et des comptes non apurés, qui justifient l’opinion et la réserve de l’actionnaire omanais sur la véracité des chiffres de la STB !

Des «casseroles» qui font perdre plus de 30 MDT et une myriade d’entreprises en liquidation.

Le groupe STB est composé, comme précisé plus haut, de 24 entreprises évoluant dans les secteurs des finances, de l’immobilier, du tourisme et des services. Au moins 8 sociétés du groupe étaient  déficitaires, en 2011. Le plus important déficit est bien sûr enregistré par la BFT avec 26,545 MDT de pertes. Mais il y a aussi «l’Immobilière de l’avenue » qui enregistre un déficit de 1,353 MDT, la société se recouvrement (-1,218 MDT), la «Générale des ventes » (-0,319 MDT), la société hôtelière Dkhila (-0,17 MDT) et même la société Activhôtels supposée bien gérer les hôtels repris par action de justice pour impayés (0,533 MDT), la Sofiges (-0,379 MDT) qui est intermédiaire en bourse, ou encore la Banque d’Affaires de Tunisie (-0,211 MDT). Au final, un manque à gagner chez ses filiales directes de 30,196 MDT. Toutes n’ont pas été toujours déficitaires, mais les vraies casseroles existent. On pourrait même dire qu’elles sont «cachées» dans la liste, dite des «sociétés normalement consolidables, mais exclues du  périmètre du groupe » pour diverses raisons. 8 sociétés parmi l’ensemble des 35 entreprises de cette liste, sont des sociétés hôtelières. 9 autres sont en liquidation et deux autres sous administration judiciaire. Le reste des sociétés ne communiquent rien à la banque sur leurs  états financiers ou se trouvent dans l’impossibilité de transférer des fonds à la société mère. Le plus importante est certainement que ces entreprises sont plus que déficitaires et ne font que générer un passif qui grossit au fil des années pour la STB. Sur les 210 MDT de PNB du groupe, plus de 107 autres millions DT, vont aux seuls frais du personnel et plus de 117 MDT vont en dotations aux provisions diverses (Source : notes aux états financiers consolidés 2011).

Qui sauvera la STB ?

L’état des choses que nous décrivons ici dans cet article, n’est pas nouveau et encore moins à mettre à l’actif de l’actuelle direction. Tout fin connaisseur des arcanes des finances, durant les vingt dernières années, dira même, que ce lourd passif, de la STB comme d’autres banques publiques, est moins à mettre à l’actif de leurs directions respectives qu’à celui de tout un système, fait d’ordres, d’instructions, de mises à l’écart et d’ascensions. Un système où rien ne se fait selon la logique purement bancaire. Se débarrasser des casseroles n’était donc pas l’affaire du seul PDG, mais du ministère des Finances, de bien d’autres départements ministériels et surtout de la présidence de la République.

L’état de la STB n’est donc pas nouveau. C’est même presqu’une redite et avec moins de détails croustillants que n’en avait dit la Cour des Comptes. L’état dans lequel se trouve cette banque publique ne vaut, à notre sens, que par le sort qu’en feront la nouvelle direction et sa tutelle du ministère des Finances.

Peut-on en effet en vouloir à la STB d’être dans cet état, si elle doit revenir à sa tutelle pour la moindre des décisions et si le PDG se retrouve pieds et mains liés dans une conjoncture hautement concurrentielle ?

Peut-on aussi en vouloir à la STB de supporter ce lourd fardeau de provisions et de casseroles, si la résolution de ces problèmes est mise dans un contexte, beaucoup plus large, celui de la résolution du problème de l’endettement du secteur hôtelier ?

Khaled Boumiza.

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