AccueilLa UNETunisie-GAFI : Les diplomates arrivent comme les carabiniers…en retard !

Tunisie-GAFI : Les diplomates arrivent comme les carabiniers…en retard !

Dans ses annales postrévolutionnaires, La Tunisie a rarement eu affaire à autant de péripéties en si peu de temps. Deux événements, visiblement liés, ont, la semaine dernière, sinon empoisonné du moins troublé le cours des choses. D’abord l’inclusion dans la liste des pays exposés au blanchiment d’argent et au financement du terrorisme, et ensuite le limogeage, sans ménagement il est vrai, du gouverneur de la Banque centrale de Tunisie, Chedly Ayari.

Quoi qu’on en dise, il ne peut pas être question d’autre chose dans les deux affaires que de sanctions plus attendues que dites. Les investisseurs et les bailleurs de fonds internationaux, à l’égal de certains experts locaux, savaient que le couperet du GAFI, le Groupe d’action financière, allait tomber. Les tentatives de dernière minute des autorités tunisiennes de dissuader les députés du Parlement européens de conférer l’autorité de la chose décidée au verdict n’y ont rien fait. Au contraire, on n’en a retenu en l’amplifiant à l’extrême que le côté rocambolesque tenant aux cadeaux que la Tunisie aurait offerts aux eurodéputés pour s’assurer leur vote en sa faveur. C’est une fable, a asséné le ministère tunisien des Affaires étrangères dans un démenti aux « allégations dénuées de tout fondement » colportées par le quotidien parisien « Le Monde ». Et il ne tomberait jamais sous le sens que la diplomatie tunisienne ait même songé à se hasarder à pareille idiotie qui, de toutes les façons, n’est nullement dans ses traditions, ni dans celles de ses plénipotentiaires.

L’orthodoxie monétaire en jeu !

Le fait est, par ailleurs, que le vote du Parlement européen a vite fait une victime, le gouverneur de l’Institut d’émission auquel visiblement a été attribuée la responsabilité de cette déconvenue. Certes, les appels à son départ ont pris ces derniers temps une allure qui ne pouvait pas passer inaperçue. Chedly Ayari, dont le mandat à la tête de la BCT viendra à expiration en juillet dans quelques mois, en juillet 2007, ne serait pas en odeur de sainteté à la Kasbah, l’un et l’autre n’étant pas sur la même longueur d’onde concernant la politique à adopter en matière monétaire et commerciale extérieure, et leurs vues n’ont jamais concordé non seulement sur les moyens à mettre en œuvre à ce sujet, mais aussi et surtout sur les ressorts et l’efficacité de cette politique. Le chef du gouvernement, Youssef Chahed, a choisi en lieu et place une personnalité venue du sérail de la Banque mondiale auquel incombera la tâche d’assurer la cohérence des approches entre la Primature et l’Institut d’émission et d’en être le garant, selon des observateurs et analystes. Sera-t-il le gardien de l’orthodoxie monétaire comme c’est la vocation originelle et naturelle d’une banque centrale ? On va le voir à l’exercice.

Mais ce qui interpelle le plus dans cette affaire de l’inscription de la Tunisie dans la liste noire du GAFI, c’est essentiellement la façon dont elle a été gérée du côté tunisien, et ce dès les premiers commencements. Que le dossier soit technique, cela ne fait aucun doute, car les experts du GAFI qui s’y sont attelés ont, indiscutablement, travaillé sur des données avérées, recoupées et passées au crible selon les normes établies et applicables à tous les pays. Que le dossier soit aussi politique, cela ne peut pas être contesté non plus. La Tunisie, au sortir d’une révolution qui lui a imprimé une configuration singulière et qui échappe au « droit commun » des nations, s’est retrouvée dans une situation économique, financière et sociale très difficile, par moments dramatique, avec une dizaine de gouvernements en sept ans, des caisses de l’Etat auxquelles il arrivait souvent d’être presque vides, des entreprises en proie à des péripéties menaçant même la survie de beaucoup d’entre elles, et une agitation sociale endémique. Dans le même temps, l’Union européenne, qui n’avait de cesse tari d’éloges sur l’expérience démocratique naissante et unique dans le monde arabe, peine à mettre la main à la poche, et si elle se décidait à le faire , c’est avec parcimonie, malgré toutes les professions de foi dont elle s’échine à se fendre sans aller au bout de sa logique.

Des errements, et pas que cela !

Il n’en reste pas moins que les Tunisiens n’ont à se prendre qu’à eux-mêmes, surtout ceux mandatés à           prendre en charge leurs intérêts. En témoigne, le mode sur lequel a été géré le fameux dossier du GAFI, et plus encore celui des paradis fiscaux. C’est à présumer qu’ils n’ont pas pris la vraie mesure de ce qu’ils avaient à faire, soit par insouciance et impéritie, ou tout simplement parce qu’ils ont pris la chose à la légère, pis, pendant de longs mois où ils se sont catonnés dans un immobilisme manifeste.

Quant à la diplomatie, elle était plongée dans une somnolence d’autant plus inusitée qu’elle ne s’en est tirée qu’après que le mal a été fait. Et elle s’est alors mise en branle tout en étant peu outillée pour en découdre avec un dossier dont la résolution demande plus que de l’entregent diplomatique, de vraies task-force qui maîtrisent la finance et ses arcanes, et plus encore une communication sophistiquée et sans faille qui arrive à changer les idées répandues et les perceptions des vis-à-vis et des preneurs de décisions, que ce soit dans la sphère parlementaire ou exécutive.

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