AccueilLa UNEUne taxe Robin des Bois estampillée Kais Saied

Une taxe Robin des Bois estampillée Kais Saied

Ballotée entre l’imperturbable raideur d’un FMI retranché dans son orthodoxie d’un autre temps et le zèle louable mais pas suffisamment fructueux de l’Italie, la Tunisie se voit dans l’obligation de sonder d’autres biais pour sortir de tout ce maquis d’écueils qui continuent de miner son économie en grande difficulté.

Le pays  que le scénario le plus pessimiste destine au défaut de paiement, s’échine  à maintenir à flot son économie sérieusement malmenée, car semblable perspective signifie une flambée de l’inflation et une forte dépréciation du dinar tunisien, ce qui engendrerait d’autres problèmes qui s’aggraveraient probablement lorsque les contrôles de capitaux seraient mis en place pour empêcher les déposants de s’enfuir.

Une économie privée des liquidités s’enfoncerait dans une spirale irréversible, ce qui entraînerait une augmentation du nombre de bateaux chargés de migrants tentant de traverser la Méditerranée dans l’espoir d’atteindre les côtes européennes. C’est précisément la raison pour laquelle l’Union européenne a offert un prêt de 900 millions d’euros, subordonné à la conclusion d’un accord avec le FMI, tout en faisant pression sur le président de la République , Kais Saied,  pour qu’il présente une proposition alternative aux conditions du FMI, estime  le chercheur à l’université Johns Hopkins à Washington, Hafed Al-Ghwell, dans une analyse sur Arabnews  .

Bien que le gouvernement tunisien n’ait pas encore publié de document final décrivant ce qu’il considère comme des conditions plus acceptables, le chef de l’Etat tunisien  a déclaré sans équivoque qu’il n’instituera pas de réductions de subventions que réclame avec insistance le FMI. La stratégie économique de Saied, en particulier sa décision de rejeter les conditions de prêt de ce dernier FMI, a suscité à la fois des éloges et des critiques.

Les réductions de la compensation  n’étant plus d’actualité, les alternatives que la Tunisie pourrait proposer au FMI pour réduire les déficits et la dette à long terme restent spéculatives. Mais Saied propose une recette faite maison : taxer les couches les plus aisées de la société tunisienne. Une initiative qui fait  partie d’une stratégie plus large visant à revitaliser les finances tunisiennes et à stimuler la croissance économique.  Elle est considérée comme un pas vers la justice sociale, une tentative de combler l’écart croissant entre les richesses et d’assurer une distribution plus équitable des ressources. Selon son précurseur, le nouvel impôt visera les personnes disposant d’un patrimoine important, et l’argent ainsi récolté servira à financer les services publics et à réduire la dette croissante du pays.

Pas assez de recettes pour éponger le déficit

Une mesure que les experts ont vite comparée à une taxe « Robin des Bois », un système d’imposition progressif qui vise à redistribuer les richesses des riches vers les pauvres. Dans le cas de la Tunisie, l’objectif est clairement d’alléger le fardeau économique plutôt disproportionné qui continue d’être supporté par les plus pauvres, tout en levant des fonds pour stabiliser les finances de l’État et assurer le service de la dette substantielle du pays.

Mais, pensent-ils, il n’est pas certain que cela génère suffisamment de recettes pour réduire de manière significative le déficit de financement et apaiser les craintes des bailleurs de fonds. De surcroît, il est craint  que cet impôt décourage les investisseurs potentiels et déclenche un exode des capitaux d’une économie déjà à court de liquidités. Alors que la Tunisie est aux prises avec des pressions fiscales considérables, un environnement d’investissement attractif est une nécessité absolue. Il serait donc redouté que l’augmentation de la charge fiscale sur les riches ne les incite à délocaliser leurs actifs et leurs entreprises, ce qui déstabiliserait encore plus l’économie.

Bien qu’une taxe Robin des Bois puisse potentiellement générer des revenus supplémentaires, il est peu probable qu’elle apporte une solution à long terme aux difficultés fiscales de la Tunisie sans des réformes structurelles plus larges.  Il n’en demeure pas moins que la proposition représente une tentative courageuse de relever les défis économiques auxquels le pays est confronté. Son succès dépendra en grande partie de la capacité du gouvernement à trouver un équilibre entre la poursuite de la justice sociale et les nécessités de la stabilité économique et de la croissance.

Trouver le « bon équilibre »

Si elle n’est pas gérée avec prudence, la taxe pourrait être contre-productive. Par conséquent, la Tunisie doit naviguer sur cette voie avec prudence, en veillant à ce que la taxe n’entrave pas l’investissement tout en protégeant le bien-être de ses citoyens les plus vulnérables, estime le chercheur de l’université Johns Hopkins.

Il ne s’agit pas, bien sûr, de la proposition la plus novatrice, étant donné que des taxes similaires ont été mises en œuvre dans le monde entier, bien qu’avec des degrés de réussite variables. Un paramètre clé sera de savoir si le système fiscal est structuré de manière à encourager la redistribution des richesses sans étouffer la croissance économique.

Malheureusement, la Tunisie a déjà l’une des charges fiscales les plus élevées du continent africain. Cela s’est traduit par une augmentation des recettes fiscales entre 2010 et 2022, mais n’a pas permis d’élargir l’assiette fiscale, ce qui est absolument essentiel pour générer les ressources nécessaires à l’État pour maintenir son rôle de pourvoyeur de bien-être social, rappelle-ton.

Les économistes préfèrent  que la Tunisie réduise plutôt qu’elle n’alourdisse son budget déjà tendu en promettant, par exemple, d’indemniser jusqu’à 8 millions de Tunisiens qui seraient lésés par la suppression des subventions. Le défi consiste donc à trouver le bon équilibre pour s’assurer que la taxe ne découragera pas l’investissement et n’aggravera pas les difficultés économiques de la Tunisie.

A l’heure actuelle, la Tunisie a besoin de bien plus qu’une taxe Robin des Bois, ou toute autre solution de fortune qui ne parviendrait pas à remédier aux déficiences structurelles majeures responsables de l’effondrement de l’économie du pays, insistent-ils.

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